Le code civil en ses articles 270 à 281 du code civil envisage la prestation compensatoire en matière de divorce.
Dans cet article, j'envisagerai le sort de la prestation compensatoire en cas de décès du débiteur.
Qui sera tenu de la verser ? Comment y échapper? Quelles seront les possibilités de révisions, le cas échéant ?
Les articles 280, 280-1 et 280-2 du code civil, issus de la Loi N° 2004-439 du 26 mai 2004, sur le nouveau divorce, entrée en vigueur le 1 er janvier 2005 nous renseignent.
I- Le Principe : la transmission de la prestation dans le passif successoral de l’ex conjoint décédé
Antérieurement à la Loi précitée, les héritiers qui acceptaient une succession, devaient payer celle-ci, sur les biens recueillis, y compris sur leur biens personnels en cas d'insuffisance d'actif. Cette obligation était vécue comme injuste par ces derniers.
Depuis la Loi N° 2004-439 du 26 mai 2004, entrée en vigueur le 1 er janvier 2005, les choses ont changé. La prestation incombe désormais à la succession, aux héritiers du débiteur; elle sera payée sur le patrimoine du défunt et ne sera plus à la charge des héritiers sur leur patrimoine personnel.
A) la transmission d’une dette successorale…
Cette prestation compensatoire entre dans le passif du patrimoine d'un des époux et de ce fait oblige ses héritiers (ex enfants, nouvelle épouse) ; lesquels peuvent se voir contraints de la verser en cas de décès à l'ex-conjoint dès lors qu’ils recueillent la succession.
La prestation compensatoire est prélevée sur la succession, avant tout partage.
En cas d'insuffisance d’'actif successoral, tous les héritiers et légataires particuliers, y sont tenus proportionnellement à leur part dans la succession.
Pour échapper à cette obligation, il conviendrait purement et simplement de renoncer à l'héritage.
B) Une dette qui sera évaluée (capitalisée) au moment du décès avant tout prélèvement sur la succession, mais dans les limites de l'actif successoral.
Les héritiers, depuis le 1 er janvier 2005 ne sont donc plus tenus personnellement, sur leurs biens propres de régler la dette que représente la prestation compensatoire, si le montant de la succession ne permet pas d'en solder son montant.
Le solde de la prestation sera considéré et évalué, avant d'être prélevé sur la succession de l'époux débiteur, mais dans la limite de l'actif successoral.
Les dispositions de l'article 280 du Code civil modifié prévoient:
« A la mort de l'époux débiteur, le paiement de la prestation compensatoire, quelle que soit sa forme, est prélevé sur la succession. Le paiement est supporté par tous les héritiers, qui n'y sont pas tenus personnellement, dans la limite de l'actif successoral et, en cas d'insuffisance, par tous les légataires particuliers, proportionnellement à leur émolument, sous réserve de l'application de l'article 927. Lorsque la prestation compensatoire a été fixée sous forme d'un capital payable dans les conditions de l'article 275, le solde de ce capital indexé devient immédiatement exigible.
Lorsqu'elle a été fixée sous forme de rente, il lui est substitué un capital immédiatement exigible. La substitution s'effectue selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat. »
Ainsi la prestation versée sous forme de rente, se transformera en un capital exigible immédiatement, après capitalisation de la rente.
A préciser que si le créancier perçoit une pension de réversion, celle-ci sera déduite du capital calculé pour remplacer la rente, selon un barème fixé par décret et après déduction de la pension de réversion voire II-B) .
S’il avait été prévu, dans la décision de divorce définitive, un échelonnement de paiement du capital sur 8 ans, le solde du capital devient immédiatement exigible après indexation.
II- Les atténuations au principe
A) l’engagement personnel des héritiers contenu dans un acte notarié
Par dérogation à l'article 280 du Code civil précité, les héritiers peuvent décider ensemble de maintenir les formes et modalités de règlement de la prestation compensatoire qui incombaient à l'époux débiteur, en s'obligeant personnellement au paiement de cette prestation.
Que pourront décider ces héritiers tenus de payer une rente viagère ?
En l’état de la législation, ils pourront:
- soit, demander la conversion de la rente en capital (ce que nous avons exposé ci-dessus) ;
- soit, poursuivre le paiement de ladite rente mensuellement.
Dans cette dernière éventualité, ils toucheront l’intégralité de leurs droits dans la succession, sans déduction de la prestation, mais en assureront son paiement, sur leur patrimoine personnel, en cas d’insuffisance de l’actif pour couvrir l’intégralité des sommes.
Leur accord unanime devra respecter les modalités de l’article 280-1 du code civil, qui prévoit que :
A peine de nullité, l'accord est constaté par un acte notarié. Il devient opposable aux tiers à compter de sa notification à l'époux créancier lorsque celui-ci n'est pas intervenu à l'acte.
Lorsque les modalités de règlement de la prestation compensatoire ont été maintenues, les héritiers du débiteur de la prestation disposent des actions ouvertes à ce dernier de la même façon et pourront demander au Juge aux Affaires Familiales :
- la révision des modalités de paiement du capital en cas de changement important dans leur situation ;
- étalement plus important du paiement du capital ;
- suspension, suppression de la rente ;
- la substitution d'un capital à tout ou partie de la rente viagère ou temporaire.
Enfin , les héritiers pourront aussi se libérer à tout instant du solde du capital indexé si la prestation a été envisagée sous forme d’un capital payable en plusieurs versements périodiques avec un étalement.
B) L’article 280-2 du code civil : la déduction des pensions de réversion du montant de la prestation compensatoire versée sous forme de rente.
« Les pensions de réversion éventuellement versées du chef du conjoint décédé sont déduites de plein droit du montant de la prestation compensatoire, lorsque celle-ci, au jour du décès, prenait la forme d'une rente. Si les héritiers usent de la faculté prévue à l'article 280-1 du Code civil et sauf décision contraire du juge, une déduction du même montant continue à être opérée si le créancier perd son droit ou subit une variation de son droit à pension de réversion. »
Il s’agit de la partie de la retraite dont bénéficiait ou aurait pu bénéficier l’assuré décédé, qui est reversée, au conjoint survivant sous certaines conditions : ex dès 55 ans, en fonction des conditions de ressources
Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm
Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris
…