LE PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE ET 1 ERE CIV,6 MARS 2013

Publié le Modifié le 07/03/2013 Vu 17 851 fois 3
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Le principe de communication spontanée des pièces au procès est indispensable dans l'intérêt d'une bonne justice. C'est ce que l'on dénomme le principe de contradiction ou principe du contradictoire régi par le code de procédure civile, et la déontologie de l'avocat. La première Chambre Civile, le 6 mars 2013 pourvoi N° 12-14.488 n'a pas hésité à rappeler son importance dans le cadre de la libre communication des pièces aux débats.

Le principe de communication spontanée des pièces au procès est indispensable dans l'intérêt d'une bonn

LE PRINCIPE DU CONTRADICTOIRE ET 1 ERE CIV,6 MARS 2013

" Que soit entendue aussi l'autre partie Audiatur et altera pars ! "

Ce principe de contradiction ou du contradictoire, vise le respect des droits de la défense dans l’égalité des armes.

Il s'applique à tout moment de la procédure ,qu’elle soit civile, pénale, administrative ou disciplinaire. Il implique qu’avant de débattre sur une argumentation juridique, des moyens de faits ou de droit, des pièces, chaque partie doit être mise à même de débattre sur l'énoncé desdits faits et moyens,communiqués dans un délai raisonnable...

Il implique qu’avant de débattre sur une argumentation juridique, des moyens de faits ou de droit, des pièces, chaque partie doit être mise à même de débattre sur l'énoncé desdits  faits et moyens,communiqués dans un délai raisonnable...

I- Un principe de transparence et de loyauté  

A) La finalité du principe de contradiction 

 Il s’agit d’assurer le respect des droits de la défense, la loyauté des débats, une équité et une égalité des armes .

Il suppose que toutes parties au procès prenne connaissance des arguments et pièces qui vont être soumis au Tribunal pour lui permettre de prendre une décision.

Respecter les droits de la défense, cela suppose de permettre aux parties de présenter des observations écrites ou orale et  de se faire assister ou représenter en justice.

Cela suppose que :

1°-chaque partie s’informe dans un délai raisonnable de ses prétentions ainsi que des moyens de fait et de droit.

y compris qu’elles communiquent leurs écritures dans les procédures écrites par représentation obligatoire d’un avocat(assignation, conclusions, pièces produites au tribunal dans un délai raisonnable).

3ème Civ,13 septembre 2011, pourvoi N°10-23.496 

 a jugé que viole le principe du contradictoire la cour d’appel qui fonde sa décision sur un constat d’huissier produit par une partie dès lors qu'il n'apparaît pas des bordereaux de communication de pièces que cette pièce, non visée dans les conclusions des parties échangées, ait fait l'objet d'un débat contradictoire.

Dans le cadre d'une procédure orale, le Juge veillera  à ce que chaque partie ai pu répliquer aux arguments de l'autre, soit par écrit, soit oralement à l'audience.

Une demande de renvoi de l’audience pour répondre pourra souvent être acceptée

2°-les expertises soient librement débattues 

1ere Civ,1er février 2012, pourvoi n°10-18.853

a rappelé strictement ce principe au visa de l'article 16 du Code de procédure civile en matière d’expertise.

L'expert doit soumettre aux parties les pièces annexées au rapport afin de permettre à ces dernières d'en débattre contradictoirement devant lui avant le dépôt de son rapport

Désormais, les experts devront être très vigilants sur ce point afin que leurs rapports ne soient pas annulés.

3°-avant toutes plaidoiries 

toutes pièces justificatives qui seront produites en justice et tous les arguments de faits et de droit soulevés soient communiqués à l’adversaire

1ère Civ,6 mars 2013, pourvoi N° 12-14.488

Qu'en statuant ainsi, alors que Mme Y... soutenait, sans être contredite, avoir demandé en vain par voie de sommation la communication des pièces dont se prévalaient les consorts X..., la cour d'appel, à laquelle il incombait, dès lors, d'ordonner cette communication, a violé les textes susvisés

B) Un principe rappelé dans les textes

 1°- Dans la CEHD

 Article 6 – Droit à un procès équitable

 1-Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien‑fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

Article 13  - Droit à un recours effectif

Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.

La Cour Européenne ne manque pas d'énoncer que le libre accès aux observations et pièces produites par l'autre partie sont l'une des conditions du débat contradictoire.

2°- Dans le Code de Procédure Civile

Article 14 du NCPC

Nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée.

Article 15 du NCPC  prescrit une communication complète et spontanée des pièces entre les parties:

"Les parties doivent se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquels elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu'elles produisent et les moyens de droit qu'elles invoquent, afin que chacune soit à même d'organiser sa défense."

Article 16 du NCPC

« Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.
Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations. »

Article 132 du NCPC

«  La partie qui fait état d’une pièce s’oblige à la communiquer à toute autre partie de l’instance.

La communication des pièces doit être spontanée »

3°- Dans le code de la sécurité sociale

L'article R.441.11 prévoit que le dossier peut être communiqué par la Caisse Primaire à l'employeur, à sa demande, et il en est également de même pour la victime et ses ayant droits.

La décision de reconnaissance de la nature professionnelle d’un accident du travail ou d’une maladie sera opposable à l’employeur de la victime, lorsque les règles du contradictoire auront été respectées par l'organisme

Pour déterminer si le dossier a été instruit de façon contradictoire vis-à-vis de l’employeur la cour de cassation considère qu'il faut comparer la date de l’envoi de la lettre par la Caisse à l’employeur à la date de prise de décision indiquée par la lettre peu important que la Caisse ait pris sa décision plus tard...Avis n° 0100005P du 20 septembre 2010.

4°- Dans le code de déontologie de l’avocat

L’avocat est soumis à un ensemble de règles professionnelles de philosophie morale dont le respect est assuré par l’Ordre des avocats et son bâtonnier (chef de l’ordre).

un devoir de loyauté est imposé, au même titre que des règles de confidentialité d’indépendance, de courtoisie et de délicatesse entre confrères.
Il devra respecter les principes directeurs de la procédure tel que le principe du contradictoire. Il ne pourra par ses agissements, porter atteinte à l’honneur ou à l’intégrité de la profession.

Rappelons pour conclure que des  exceptions encadrées au principe du contradictoire existent. Ainsi citons les mesures d'administration judiciaires prises par le tribunal; ex renvoi, jonction,ou les procédures gracieuses ou sur requête.

II-Présentation de 1ère Civ,6 mars 2013 pourvoi N°12-14.488

Cassation

Sur le premier moyen :

Vu les articles 16, 132 et 133 du code de procédure civile

Attendu qu'aux termes du premier de ces textes le juge doit, en toutes circonstances, faire observer le principe de la contradiction et ne peut retenir dans sa décision les documents invoqués ou produits par les parties que si celles ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'aux termes du deuxième, la communication des pièces doit être spontanée ; qu'aux termes du troisième, si tel n'est pas le cas, il peut être demandé, sans forme, au juge d'enjoindre cette communication ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 4 juin 2009, Bull. 2009, I, n° 123), que des difficultés se sont élevées dans la liquidation et le partage de la succession de Gérard X..., décédé le 7 octobre 1990, entre Mme Y..., sa fille née d'une première union, et sa veuve et leurs deux enfants, M. Philippe X... et Mme A... (les consorts X...) ; que, dans ses dernières conclusions, Mme Y... a fait valoir que les cinquante huit premières pièces visées au « bordereau récapitulatif de pièces communiquées », annexé aux dernières conclusions des consorts X..., ne lui avaient jamais été communiquées ; que la cour d'appel a statué au fond ;

Attendu que, pour rejeter la demande de Mme Y... de réouverture des débats afin que soit ordonné sous astreinte aux consorts X... de lui communiquer lesdites pièces, l'arrêt attaqué relève, d'une part, que celle ci a reçu le bordereau de communication de quatre vingt cinq pièces le 6 octobre 2010, que cette communication a été réitérée avec de nouvelles pièces dans les conclusions du 31 août 2011, d'autre part, que ces pièces communiquées par bordereau entre avoués sont à la disposition des parties, de sorte qu'il appartenait à Mme Y... de les obtenir matériellement si une telle remise n'avait pas été faite spontanément, pour en déduire que, dans ces conditions, il n'y a pas d'atteinte au principe de la contradiction ;

Qu'en statuant ainsi, alors que Mme Y... soutenait, sans être contredite, avoir demandé en vain par voie de sommation la communication des pièces dont se prévalaient les consorts X..., la cour d'appel, à laquelle il incombait, dès lors, d'ordonner cette communication, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 octobre 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence.

 Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm

Sabine HADDAD

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1 Publié par Visiteur
11/03/2013 17:39

Bonjour Maître ,
Heureuse de voir que la Cassation confirme l'objet de mes soucis. Mais désespérée à l'idée d'imaginer qu'il faille attendre 10 ou 20 ans pour savoir que vos droits ne sont pas respectés.
Partie civile dans une affaire pénale que vous avez eu à connaître j'attends depuis plus de 6 mois communication de la procédure (pv d'auditions etc..)ne serait ce que pour vous consulter à nouveau. A quelques jours du délai de l'avis a partie, j'en suis toujours à "harceler" le juge d'instruction, mon avocat ne jugeant pas utile ou n'ayant pas le temps de faire le nécessaire. Comment pallier aux insuffisances, aux " trous" de la procédure quand on a pas les moyens de se payer un tenor du barreau, de changer d'avocat à ce stade là (3 ans après la plainte)..
N'est il pas désespérant de devoir compter sur appel (le 2e dans ce cas) cassation pour que le simple droit de base de tout citoyen européen soit respecté ?

2 Publié par Visiteur
11/03/2013 19:25

Maître , après avoir relu votre texte ainsi que certains précédents de vous aussi, j'ai un doute : vous dites dans" toute procédure" mais dans le cas jugé il est question de procédure civile et du code civil que vous citez.
J'espère qu'il en est de même pour les procédures pénales et que les droits de la partie civile sont aussi bien protégés que ceux de la défense.

3 Publié par Visiteur
07/11/2013 22:22

bonjour maitre,
je veux savoir dans quelle mesure le juge d'appel ou de cassation peut soulever d'office des moyens liés à l'atteinte du principe du contradictoire et celui du droit à la défense.
merci pour tout.

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