Les fautes graves ou renouvelées aux devoirs du mariage qui rendent intolérables le maintien de la vie commune, telles que visées par l'article 242 du code civil peuvent fonder une demande en divorce aux torts exclusifs de l'époux fautif et subsidiairement partagés .
Toutes les fautes invoquées dans le cadre d'un divorce peuvent être prouvées par tous moyens tant que la preuve n'a pas été obtenue par fraude ou violence.
L’article 259 du code civil dispose:
"Les faits invoqués en tant que causes de divorce ou comme défenses à une demande peuvent être établis par tout mode de preuve, y compris l'aveu. Toutefois, les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux."
I- La question du respect et de l'atteinte à la vie privée dans la preuve de l'adultère
A) La proscription
1°) des caméras
Dans une décision du 27 juin 2013, la Cour d'appel d'Amiens a considéré que le fait pour le mari d'installer des micros et caméras dans le domicile conjugal présente un caractère injurieux pour l'épouse et constitue dès lors une faute grave et renouvelée imputable à l'époux de nature à rendre intolérable le maintien de la vie commune.
2°) du témoignages des enfants
Toutefois, les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux, donc sur l'adultère (article 259-1 du code civil).
Article 205 du CPC
"Chacun peut être entendu comme témoin, à l'exception des personnes qui sont frappées d'une incapacité de témoigner en justice.
Les personnes qui ne peuvent témoigner peuvent cependant être entendues dans les mêmes conditions, mais sans prestation de serment. Toutefois, les descendants ne peuvent jamais être entendus sur les griefs invoqués par les époux à l'appui d'une demande en divorce ou en séparation de corps"
Toute atteinte à la vie privée pour obtenir un élément de preuve rendrait la preuve irrecevable. (Exemples : enregistrement de la conversation d'une messagerie, obtention de documents protégés par mot de passe, ou code ...).
1ère Civ, 4 mai 2011 pourvoi N°10-30.706 et plus récemment 1ère Civ,9 juillet. 2014, pourvoi N°13-17804
3°) plus généralement de tous modes de preuves déloyaux obtenus par fraude ou violence
"Un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve qu'il aurait obtenu par violence ou fraude"
B) Pas de " pause " ni d'autorisation d’adultère tacite durant l'instance en divorce ou quand le devoir de fidélité est toujours présent
1°) L'interdiction de commettre l'adultère même après l’introduction de la procédure de divorce ( dépôt de la requête)
1ere Civ,1 er avril 2015,pourvoi N° 14-12823 (rejet)
Attendu, d'abord, que l'introduction de la demande en divorce ne confère pas aux époux encore dans les liens du mariage une immunité destituant de leurs effets normaux les offenses dont ils peuvent se rendre coupables l'un envers l'autre ; que la cour d'appel en a justement déduit qu'il était possible d'invoquer, à l'appui de la demande en divorce, un grief postérieur à l'ordonnance de non-conciliation ;
Attendu, ensuite, que le grief de la seconde branche du moyen n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
2°) L'Interdiction de commettre l'adultère pendant l'instance en divorce
1ère Civ, 14 Avril 2010, pourvoi N° 09-14006 au visa de l’article 242 du code civil.rappelle que lors de la tentative de conciliation, le juge rendra une ordonnance qui, si elle autorise les époux à résider séparément, ne met pas un terme aux devoirs du mariage.
Tous types de griefs survenus avant, pendant ou après le prononcé de l’ONC sont donc recevables.
Une grande prudence s’imposera au regard de la faute, en particulier pour s'éviter le grief d’infidélité susceptible d’être invoqué dans le plus grand paradoxe après la fin de la cohabitation , ou code ...).
B) Les circonstances atténuantes de l'adultère
Le juge appréciera souverainement si l'adultère existe et s'il peut être excusé ( ex femme abandonnée depuis des années, )
L'argument tiré des fautes de son conjoint pour se justifier, peut atténuer la gravité de fautes ou contester leur existence.
Pour 1ere Civ, 15 mai 2013 pourvoi N°11-27121 en cas d'adultère, l'abandon du domicile conjugal par le conjoint n'est pas considéré comme fautif et ne permet pas de prononcer le divorce à ses torts exclusifs.
Rappelons qu'en vertu de l'article 215 du code civil :
"Les époux s'obligent mutuellement à une communauté de vie."
II- L'adultère sans consommation ou quand le virtuel agit sur l'intention ...
De plus en plus, nous sommes confrontés en raison des moyens modernes de communication, à la dissolution d'unions issues de rencontres virtuelles et de dials liés à des sites sur internet.
Certains, tentent par cette voie de doper leur quotidien et de tromper leurs habitudes, s'emballant et s'enflammant sur des personnes qu'elles n'ont souvent jamais vues, fantasme issu de leur imagination en quête d'idéalisation...Le virtuel et le textuel.
L'absence de consommation est-elle assimilable à l'adultère ?
Pour certains époux, l'intention de la tromperie indépendamment du résultat conduira à la mise en place d'une procédure de divorce ...
Justement celle-ci est entamée parfois après la découverte d'une liaison ou pseudo-liaison à travers des sms ou des mails échangés . Mais aussi après consultation des derniers sites de rencontres consultés par leur conjoint .
D'autres soutiendront que l'infidélité n'est pas l'adultère à partir du moment où ils rentrent le soir chez eux pour retrouver leur conjoint(e)...
Chacun se fera sa propre opinion. Pour les tribunaux, seule la notion de violation(s) grave(s) ou renouvelée(s) des devoirs du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune reste essentiel. L'adultère au sens physique sera relevé .
L'adultère au sens moral (sur le net), l'intention de l'adultère reste ont assimilables à une certaine forme d'injure,
Or, il faut savoir que l'injure est constitutive d'une faute (grief ) qui pourra être argué dans une procédure pour soutenir la violation grave ou renouvelée aux devoirs de l'époux et d'une demande de dommages et intérêts .
Le juge du fond appréciera ces points de façon souveraine.
Un adultère virtuel et donc non consommé peut être sanctionné.
1 ere Civ, 30 avril 2014, pourvoi N° 13-16649. à l'encontre d'un conjoint qui fréquentait un site de rencontre et a prononcé le divorce à ses torts exclusifs.
En l'espèce une épouse recherchait à avoir des relations sexuelles par le biais d’un site internet de rencontre sur lequel, elle échangeait des mails avec des hommes et des photographies intimes, mais sans relations physiques.
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine