Dans cet article je présenterai uniquement les notions de mariage gris et blanc ainsi que les sanctions administratives et pénales qui en découlent.
I- Notions de mariage blanc et gris
Le mariage avec un conjoint français peut permettre d'obtenir un titre de séjour, favoriser une demande de nationalité française, mais aussi de bénéficier de droits favorables ( exemple maintien dans les lieux suite à abandon ou décès en matière de logement ; sécurité sociale, droits à vocation successorale etc…).
C'est face à ce contexte de droits, sans penser aux devoirs que les mariages gris ou blancs se font jour, sans parler des paternités ou maternités grises dont on parle moins...
Un tel acte, sera détourné de son but légitime pour représenter un consentement tronqué (sorte de dévoiement du fondement de la famille, de l’union et de sa solennité...)
A) Définition du mariage blanc
Les "mariés"sont d'accord sur la tromperie destinée à offrir la nationalité française ou un titre de séjour à l'un des conjoints.
On ne peut parler réellement d'escroquerie sentimentale du point de vue des conjoints, puisqu'ici les deux conjoints sont volontairement fraudeurs et malhonnête en toute connaissance de cause.
Ils sont de connivence, ne s'aiment pas et le savent.
c'est un mariage pour les besoins de la cause fait entre deux complices.
La volonté pour l'un est claire : frauder et tromper l'administration française et pour l'autre se procurer un revenu au noir sous la ceinture.
B) Définition du mariage gris
Dans le "mariage gris", l'époux de nationalité étrangère, trompe l'autre sur ses sentiments amoureux réels.
Il s'agit d'une dissimulation de sentiment, un faux jeu de sentiments, un abus de l'autre c'est l'escroquerie sentimentale...
Il se prétend amoureux, sincère pour arriver à son but ultime : le mariage qui lui permettra soit d'éviter une reconduite frontière ,soit de devenir français ,soit d'obtenir un titre de séjour "vie privée et familiale" en tant que conjoint de français.
Une fois son but atteint, il n'est pas rare qu'il disparaisse et/ou demande le divorce.
Engagée dans une "union grise", la personne abusée subit une déception sentimentale mais se sent également flouée par l'autre, ce qui, dans certains cas extrêmes, peut pousser au suicide.
Pour enrayer ce fléau, qui constitue désormais l'un des cas d'unions frauduleuses les plus répandues en France, le gouvernement a mis en place un arsenal de sanctions.
II- Rappel des sanctions pénales et administratives
Il s'agit d'un délit du ressort du tribunal correctionnel.
A) Les sanctions pénales principales et complémentaires
Jusqu'à la loi n°2011-672 du 16 juin 2011 dite "besson" les mariages gris n'étaient pas sanctionnés pénalement.
1°- principales
L’article L 623-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile modifié par cette LOI n°2011-672 du 16 juin 2011 - art. 33 dispose :
"Le fait de contracter un mariage ou de reconnaître un enfant aux seules fins d'obtenir, ou de faire obtenir, un titre de séjour ou le bénéfice d'une protection contre l'éloignement, ou aux seules fins d'acquérir, ou de faire acquérir, la nationalité française est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 Euros d'amende. Ces peines sont également encourues lorsque l'étranger qui a contracté mariage a dissimulé ses intentions à son conjoint.
Ces mêmes peines sont applicables en cas d'organisation ou de tentative d'organisation d'un mariage ou d'une reconnaissance d'enfant aux mêmes fins.
Elles sont portées à dix ans d'emprisonnement et à 750 000 Euros d'amende lorsque l'infraction est commise en bande organisée."
2°- complémentaires
En outre des peines complémentaires sont envisagées par l’article L 623-2 du CESEDA
"Les personnes physiques coupables de l'une ou l'autre des infractions visées à l'article L. 623-1 encourent également les peines complémentaires suivantes :
1° L'interdiction de séjour pour une durée de cinq ans au plus ;
2° L'interdiction du territoire français, dans les conditions prévues par les articles 131-30 à 131-30-2 du code pénal, pour une durée de dix ans au plus ou à titre définitif
3° L'interdiction, pour une durée de cinq ans au plus, d'exercer l'activité professionnelle ou sociale à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise, sous les réserves mentionnées à l'article 131-27 du code pénal.
Les personnes physiques condamnées au titre de l'infraction visée au troisième alinéa de l'article L. 623-1 encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie de leurs biens, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis."
B) La sanction administrative
L’étranger dont la fraude avérée à l’obtention du titre serait démontrée ( exemple mariage blanc annulé, production de faux documents…sera sanctionné a priori par la prise d’un arrêté préfectorale de reconduite à la frontière APRF, voir plus avant par la perte de son titre de séjour et prise d'une OQTF.
Le titre de séjour vie privée et familiale, la carte de résident... sont susceptibles d’être retirés aux étrangers qui ne se conforment pas au respect de l’Ordre public Français ou aux principes d’octroi et de maintien de leur catégorie de titre portées dans le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers ou CESEDA.
C) Présentation de la Réponse Ministérielle n° 116004 du 22/05/2012 : mariage gris, escroquerie au mariage, étrangers sur la lutte contre la fraude
La lutte contre la fraude par laquelle un étranger instrumentalise l'institution du mariage en trompant son conjoint français sur ses intentions matrimoniales à seules fins d'obtenir un titre de séjour (et par là-même de bénéficier de la protection sociale accordée aux personnes résidant légalement en France) a conduit le Gouvernement à étendre aux auteurs de cette fraude les dispositions légales applicables aux auteurs des mariages de complaisance.
Ainsi, la loi n°2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité élargit à ce type de fraude la portée de l'article L.623-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), et sanctionne un tel délit d'une peine de cinq ans d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende.
Des peines complémentaires d'interdiction de séjour ou de territoire sont, en outre, prévues à l'article L.623-2 du CESEDA. Par ailleurs, cette loi a prévu que les années de résidence sous couvert d'une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » retirée par l'autorité administrative sur le fondement d'un mariage ayant eu pour seules fins d'obtenir un titre de séjour ne peuvent être prises en compte dans le critère de durée de résidence permettant d'obtenir la carte de résident.
L'arsenal juridique permettant de sanctionner les auteurs de ce type de fraude est donc désormais établi et les débats parlementaires ont permis de donner une publicité particulière à ce dispositif.
Lorsque le mariage a été célébré, si le défaut d'intention matrimoniale paraît avéré et qu'il est établi que les époux ou l'un d'entre eux seulement se sont mariés dans le but d'atteindre un effet étranger ou secondaire au mariage, le mariage peut être annulé, sur le fondement des articles 180 et 184 du code civil, à la demande du procureur de la République ou d'un époux lui-même.
Ainsi, il existe actuellement un dispositif juridique complet permettant d'éviter, ou d'annuler les unions célébrées en contradiction avec la finalité de l'institution du mariage.
Bien entendu la preuve en la matière reste essentielle, qu'il faudra savoir amener.
Je me tiens à votre disposition pour toute analyse de situation et mise en avant des éléments de preuve en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm
Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris