En principe le rapport des donations dans la succession est égal à la valeur du bien donné au moment du partage, selon l'état de ce même bien au moment de la donation.
Sera donc prise en compte la moins-value ou la plus-value acquise par le bien donné, mais en vertu de la seule inflation et uniquement en fonction de l'état du bien au moment de la donation.
Si le bien a été vendu avant le décès, c'est la valeur du bien au moment de la vente par rapport à son état au moment de la donation qui sera considérée.
Si un héritier a racheté un autre bien avec le produit de la cession, c'est la valeur de ce bien lors du décès qui sera rapportée à la succession au prorata du montant réinvesti. Pourtant 3 particularités sont à rappeler...
I-L'exception au principe de revalorisation: la donation d'une somme d'argent.
Il s'agira de rapporter la même somme dans le cadre de la succession.sauf modifications légales.
A) Cela peut favoriser ainsi ou défavoriser un héritier au regard des autres.
Rappelons que le donateur peut indiquer dans la donation que le bien donné devra être évalué à un certain montant forfaitaire, ou à une date précise ou selon un critère spécifique.
B) Quid en cas de différence de valeur entre l'évaluation légale et l'évaluation stipulée par le donateur ?
Cela revient à faire une libéralité au donateur si celle-ci lui est favorable ou à ses co-héritiers si elle lui est défavorable.
II- La valeur de la pleine propriété des donations en nu propriété avec réserve d'usufruit sera à rapporter lors du partage successoral
En principe la valeur que devrait rapporter à la succession le donataire,bénéficiaire du démembrement devrait être celle de la nue-propriété, portant sur le don obtenu.
Cependant 1ère Civ,28 septembre 2011,pourvoi N° 10-203.54 en a jugé autrement.ce sera la valeur de la pleine propriété.
Lors du partage successoral, la valeur à prendre en compte pour une donation en nue-propriété, avec réserve d'usufruit au profit du donateur, est celle de la pleine propriété du bien objet de ladite donation.
En l’espèce, un donateur était décédé en laissant pour lui succéder deux enfants, un fils et une fille ayant pris soin de doner la nu propriété de sa maison avec réserve d'usufruit à son fils.
L'évaluation de l'usufruit du père avait été portée à 3/10èmes de la valeur du bien en propriété.
C'est dans ce contexte que la fille a assigné son frère en liquidation successorale.
Pour la cour d'Appel de Douai, par arrêt du 29 mars 2010, le fils doit rapporter à la succession la valeur de la nue-propriété de l’immeuble reçue de son père au jour de l’acte notarié.
Cassation car dans le "cas de donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit au profit du donateur, la valeur à prendre en compte est celle de la pleine propriété du bien ".
III- L'évaluation de la donation-partage
A) Les textes
-L’article 1077-1 du Code civil dispose :
L’héritier réservataire, qui n’a pas concouru à la donation-partage, ou qui a reçu un lot inférieur à sa part de réserve, peut exercer l’action en réduction, s’il n’existe pas à l’ouverture de la succession des biens non compris dans le partage et suffisants pour composer ou compléter sa réserve, compte tenu des libéralités dont il a pu bénéficier.
1ère Civ, 28 oct. 2009 pourvoi n° 08-70.142, rejet a jugé que
Pour apprécier la recevabilité de l’action en réduction de la donation-partage, il n’y a pas lieu à rechercher s’il existe dans la succession des biens suffisants pour compléter la part de réserve des consorts X Cass.
-L’article 1078 du Code civil dispose que :
« Nonobstant les règles applicables aux donations entre vifs, les biens donnés seront, sauf convention contraire, évalués au jour de la donation-partage pour l’imputation et le calcul de la réserve, à condition que tous les héritiers réservataires vivants ou représentés au décès de l’ascendant aient reçu un lot dans le partage anticipé et l’aient expressément accepté, et qu’il n’ait pas été prévu de réserve d’usufruit portant sur une somme d’argent ».
Cette exception suppose la réunion de 3 éléments :
Il faut que tous les héritiers dits réservataires, vivants ou représentés au décès, du donateur aient été allotis dans le partage anticipé ; qu'il aient expressément accepté la donation-partage et qu'aucuneréserve d'usufruit n'ait été envisagée dans l'acte.
B) Quelle valeur retenir en cas d'action en réduction ?
celle indiquée dans l’acte notarié portant la donation-partage ou celle des biens à la date du décès du donateur ?
1ère Civ, 16 juin 2011, N° de pourvoi: 10-17499
a défini les modalités d’évaluation des biens transmis par donation-partage conjonctive ( faite par les deux parents) dans le cadre de l’action en réduction.
« ayant exactement écarté l’application en l’espèce des dispositions de l’article 1078 du code civil dans sa rédaction issue de la même loi après avoir constaté que tous les enfants n’avaient pas reçu un lot dans le partage anticipé, la cour d’appel a décidé, à bon droit, que, s’agissant d’une donation-partage conjonctive, les biens dont les donateurs ont ainsi disposé sont réunis d’après leur état à l’époque de la donation et leur valeur à l’ouverture de la succession du survivant des donateurs ».
De ce fait; il conviendra de bien distinguer la situation.
Si tous les héritiers réservataires ne participent pas à l'acte de donation partage, la valeur des biens sera arrêtée au moment du décès pour apprécier le bien fondé de l’action en réduction de la donation-partage.
Si tous les héritiers ont participé à l'acte de donation-partage en respect des conditions de l’article 1078 du code civil, la valeur des biens transmis sera alors évaluée à la date de la donation (sauf clause contraire stipulée dans l’acte de donation ).
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine