QUAND LA TRANSACTION ISSUE DE LA RUPTURE CONVENTIONNELLE EST SI ENCADREE QU’ELLE DEVIENT INUTILE

Publié le Modifié le 06/05/2014 Vu 4 478 fois 0
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Une transaction après rupture conventionnelle homologuée reste envisageable sous de strictes conditions. C’est ce que la chambre sociale de la Cour de Cassation a jugé le 26 mars 2014,pourvoi: N°12-21136.

Une transaction après rupture conventionnelle homologuée reste envisageable sous de strictes conditions. C

QUAND LA TRANSACTION  ISSUE DE LA RUPTURE CONVENTIONNELLE EST SI  ENCADREE QU’ELLE DEVIENT INUTILE

Pour Soc, 26 mars 2014  pourvoi: N°12-21136 : cette transaction sera valable si

-elle intervient postérieurement à l’homologation de la rupture ou à l’autorisation s’il s’agit d’un salarié protégé,  de l’administration et

- si elle ne règle pas un différend relatif à la rupture du contrat de travail mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture.

I- Des conditions de délais et d’objet pour valider une transaction suite à l'homologation de la rupture

A) Rappel des délais de procédure d’homologation d’une rupture conventionnelle

La convention de rupture conventionnelle peut intervenir des l’entretien  en respect des délais obligatoires, la rupture peut s’envisager dans le mois hors du cas d’un salarié protégé, si bien que la  procédure de rupture conventionnelle peut se dérouler en un peu plus d'un mois C’est ce que  Cass. soc. 3 juillet 2013, pourvoi N° 12-19268 a jugé

L’article L 1237-12   du code du travail dispose:

Les parties au contrat conviennent du principe d'une rupture conventionnelle lors d'un ou plusieurs entretiens au cours desquels le salarié peut se faire assister :

1° Soit par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise, qu'il s'agisse d'un salarié titulaire d'un mandat syndical ou d'un salarié membre d'une institution représentative du personnel ou tout autre salarié ;

2° Soit, en l'absence d'institution représentative du personnel dans l'entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par l'autorité administrative.

Lors du ou des entretiens, l'employeur a la faculté de se faire assister quand le salarié en fait lui-même usage. Le salarié en informe l'employeur auparavant ; si l'employeur souhaite également se faire assister, il en informe à son tour le salarié.

L'employeur peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise ou, dans les entreprises de moins de cinquante salariés, par une personne appartenant à son organisation syndicale d'employeurs ou par un autre employeur relevant de la même branche.

Ce texte ne fixe aucun délai légal entre l’entretien et la signature de la convention.

B) Les conditions de délais

1°- Un délai de rétractation de 15 jours calendaires minimum entre la signature de la convention et sa transmission à l'autorité administrative pour homologation ou pour autorisation.

NB Les jours calendaires reprennent la totalité des jours de la semaine. Il s'agit du lundi, mardi, mercredi, jeudi, vendredi, samedi et dimanche.

Ce droit de rétractation appartient tant à l'employeur qu'au salarié qui débute à compter de la date de signature de la convention.Il démarre le lendemain de la signature de la convention.

Ces 15 jours de rétractation doivent permettent à chaque partie de revenir sur sa décision sans avoir à motiver ou à se justifier.

Il sera conseillé de se rétracter  par lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l'autre partie pour toute preuve .

article L 1237-13 du code du travail

La convention de rupture définit les conditions de celle-ci, notamment le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle qui ne peut pas être inférieur à celui de l'indemnité prévue à l'article L. 1234-9.

Elle fixe la date de rupture du contrat de travail, qui ne peut intervenir avant le lendemain du jour de l'homologation.

A compter de la date de sa signature par les deux parties, chacune d'entre elles dispose d'un délai de quinze jours calendaires pour exercer son droit de rétractation. Ce droit est exercé sous la forme d'une lettre adressée par tout moyen attestant de sa date de réception par l'autre partie.

À l'issue du délai de rétractation,l'employeur adressera la convention au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi.

2°- La transmission de la convention à la DIRECCTE qui dispose d’un délai pour se prononcer : 15 jours ouvrables au maximum

article L 1237-14 du code du travail

A l'issue du délai de rétractation, la partie la plus diligente adresse une demande d'homologation à l'autorité administrative, avec un exemplaire de la convention de rupture. Un arrêté du ministre chargé du travail fixe le modèle de cette demande.

L'autorité administrative dispose d'un délai d'instruction de quinze jours ouvrables, à compter de la réception de la demande, pour s'assurer du respect des conditions prévues à la présente section et de la liberté de consentement des parties.A défaut de notification dans ce délai, l'homologation est réputée acquise et l'autorité administrative est dessaisie.

La validité de la convention est subordonnée à son homologation.

L'homologation ne peut faire l'objet d'un litige distinct de celui relatif à la convention. Tout litige concernant la convention, l'homologation ou le refus d'homologation relève de la compétence du conseil des prud'hommes, à l'exclusion de tout autre recours contentieux ou administratif. Le recours juridictionnel doit être formé, à peine d'irrecevabilité, avant l'expiration d'un délai de douze mois à compter de la date d'homologation de la convention.

3°- L'homologation expresse ou tacite par l'autorité administrative pour vérifier la liberté du consentement et le respect des règles légales dans les 15 jours ouvrables à compter de la réception de la demande .

NB les jours ouvrables excluent les dimanches et jours fériés.

Le lendemain de l'expiration de ce délai, l'employeur (ou le salarié) envoie, par lettre recommandée avec avis de réception, le formulaire de demande d'homologation à la Direccte du lieu de l'établissement du salarié qui dispose d'un délai d'instruction de 15  jours ouvrables  pour accepter ou refuser l'homologation.  

Le silence gardé par l'administration pendant plus de 15 jours ouvrables vaut acceptation de l'homologation.

exemple, si l'employeur et le salarié signent une convention de rupture le lundi 28 avril 2014, le délai de rétraction commence à courir le mardi 29 avril 2014 pour venir à expiration le mardi 13 mai à minuit.

La demande d'homologation peut être envoyée le mercredi 14 mai .

Arrivée à la  Direccte le jeudi 15 mai  le délai d'instruction commence à courir le vendredi 16 mai  et se termine le mercredi 30 mai à minuit.

A défaut de réponse de l'administration dans ce délai, la rupture est homologuée et les parties peuvent conclure une transaction postérieurement à cette date. 

A défaut de notification dans ce délai, l'homologation est réputée acquise et l'autorité administrative est dessaisie. Le salarié quitte son entreprise à la date prévue par la convention.

Si l'homologation est refusée par l'autorité administrative dans le délai de 15 jours ouvrables, la convention n'a donc aucune validité : le contrat de travail doit être exécuté dans les conditions habituelles. L'une ou l'autre des parties (ou les deux) peut alors former un recours contre ce refus. Durant la période de ce recours, le contrat de travail doit être honoré par le salarié et l'entreprise.

C) Les trois  éléments à retenir pour  Soc,26 mars 2014, dans le cadre de la transaction postérieure à l'homologation

1°- L'exigence du délais qui empêche de signer la transaction le même jour que la rupture 

a) la  transaction doit être conclue après l'homologation de la rupture conventionnelle par l'administration,

b)  pour les salariés protégés, après la notification de l’autorisation donnée par l'inspecteur du travail.

2°- L'objet de la transaction  limité aux seuls conflits liés à l'exécution du contrat de travail

Elle ne doit pas avoir pour objet de régler un litige lié  à la rupture du contrat de travail,mais ne devra porter que sur un litige en lien avec l'exécution du contrat (exemple, règlement d’heures supplémentaires, de primes, etc  )  et que ces éléments n’aient pas déjà été visés dans la convention de rupture.

Les motifs de signature d’une transaction sont donc très restreints

Cette jurisprudence fait que désormais la sécurité liée aux transactions  post  ruptures conventionnelles qui avait pour but  d’empêcher  un salarié d’agir  en justice  sur la rupture du contrat, est mise à néant

Autrement dit le  salarié pourra contester devant les Prud’Hommes  ultérieurement la validité de sa rupture conventionnelle ex un vice du consentement.

Soc 26 juin 2013, N° de pourvoi: 12-15208 avait jugé que les parties à la convention ne peuvent pas renoncer, par avance, à leur droit de contester la rupture.

3°- Le  juge administratif ( et non le juge judiciaire) est seul compétent lorsque la rupture conventionnelle a été conclue avec un salarié protégé après autorisation de l’inspection du travail

Cela vaut même si  la contestation porte sur le consentement du salarié.

II Présentation de Soc, 26 mars 2014 , N° de pourvoi: 12-21136
 

Attendu, selon l'arrêt attaqué et les pièces de la procédure, que M. Z... a été engagé le 1er septembre 1991 par l'association Institut supérieur de l'agriculture de Beauvais, devenu l'association Institut polytechnique Lasalle Beauvais, en qualité de responsable de résidence statut cadre ; qu'il est, depuis le 3 mai 2002, délégué syndical, et depuis le 3 décembre 2008 conseiller prud'hommes ; que les parties ont signé, le 9 juin 2009, une convention de rupture autorisée par l'inspecteur du travail le 1er septembre 2009, l'autorisation leur ayant été notifiée le 3 septembre 2009 ; qu'elles ont, le 4 septembre 2009, conclu une transaction aux termes de laquelle, notamment, M. Z... renonçait à l'ensemble de ses droits, actions et prétentions dont il pourrait disposer au titre de la rupture de son contrat de travail en contrepartie du versement d'une indemnité ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu les articles L. 1237-11, L. 1237-13, L. 1237-14, L. 1237-15 du code du travail et 2044 du code civil ;

Attendu qu'il résulte de l'application combinée de ces textes qu'un salarié et un employeur ayant signé une convention de rupture ne peuvent valablement conclure une transaction, d'une part, que si celle-ci intervient postérieurement à l'homologation de la rupture conventionnelle par l'autorité administrative ou, s'agissant d'un salarié bénéficiant d'une protection mentionnée aux articles L. 2411-1 et L. 2411-2 du code du travail, postérieurement à la notification aux parties de l'autorisation, par l'inspecteur du travail, de la rupture conventionnelle, d'autre part, que si elle a pour objet de régler un différend relatif non pas à la rupture du contrat de travail mais à son exécution sur des éléments non compris dans la convention de rupture ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en nullité de la transaction, l'arrêt, après avoir relevé qu'aux termes de celle-ci l'intéressé renonçait à engager une action judiciaire en rapport avec la rupture des relations de travail en contrepartie du versement d'une indemnité, retient qu'aucun élément ne permet de considérer que l'acte transactionnel signé le 4 septembre 2009 aurait été antidaté et que la transaction serait en réalité intervenue avant même la délivrance par l'autorité administrative de l'autorisation de recourir à une rupture conventionnelle ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la transaction conclue entre le salarié et l'employeur avait pour objet de régler un différend relatif non pas à l'exécution du contrat de travail mais à sa rupture, ce dont elle aurait dû en déduire la nullité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :

Vu l'article L. 1237-15 du code du travail et la loi des 16-24 août 1790 ;

Attendu que le juge judiciaire ne peut, en l'état de l'autorisation administrative accordée à l'employeur et au salarié bénéficiant d'une protection mentionné aux articles L. 2411-1 et L. 2411-2 du code du travail pour procéder à la rupture conventionnelle du contrat de travail qui les lie et sans violer le principe de la séparation des pouvoirs, apprécier la validité de ladite rupture, y compris lorsque la contestation porte sur la validité du consentement du salarié ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en annulation de la rupture conventionnelle, l'arrêt, après avoir constaté que celui-ci avait la qualité de délégué syndical et de conseiller prud'hommes et que la rupture avait été autorisée par l'inspecteur du travail le 1er septembre 2009, retient, par motifs propres et adoptés, qu'à supposer que le juge judiciaire puisse se faire juge de la légalité de l'autorisation administrative, notamment quant à l'absence de vice de consentement, d'une part, qu'il n'est justifié d'aucun vice susceptible d'avoir altéré le consentement de l'intéressé, d'autre part, que les relations contractuelles ont cessé le 3 septembre 2009, soit postérieurement au délai d'un jour suivant l'autorisation de l'inspecteur du travail prévu par l'article L. 1237-15 du code du travail ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle aurait dû se déclarer incompétente pour connaître de la validité de la rupture conventionnelle autorisée par l'inspecteur du travail et renvoyer les parties à mieux se pourvoir, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi du chef de la transaction ;

DIT que la transaction conclue le 4 septembre 2009 est nulle ;

Renvoie, pour le surplus, les parties à mieux se pourvoir ;

Condamne l'association Institut polytechnique Lasalle Beauvais aux dépens de cassation et à ceux afférents aux instances suivies devant les juges du fond ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Institut polytechnique Lasalle Beauvais à payer à M. Z... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt

Demeurant à votre entière disposition pour toutes précisions en cliquant sur http://www.conseil-juridique.net/sabine-haddad/avocat-1372.htm

Sabine HADDAD

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