Le sort des emprunts à rembourser peut être analysé sous l’angle du mariage et du divorce.
I- Textes applicables
Article 214 du code civil
Si les conventions matrimoniales ne règlent pas la contribution des époux aux charges du mariage, ils y contribuent à proportion de leurs facultés respectives.
Si l'un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être contraint par l'autre dans les formes prévues au code de procédure civile.
Article 220 alinéa du code civil
Chacun des époux a pouvoir pour passer seul les contrats qui ont pour objet l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants. Toute dette ainsi contractée par l'un engage l'autre solidairement. La solidarité ne joue pas pour les dépenses manifestement excessives, eu égard au train de vie du ménage, à l'utilité ou l'inutilité de l'opération à la bonne ou mauvaise foi du tiers contractant. Elle ne s'exerce pas non plus sur les achats à terme s'ils n'ont pas été conclus du consentement des époux, ni sur les emprunts, à moins que ces derniers ne portent sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante.
Article 1414 du code civil
Les gains et salaires d'un époux ne peuvent être saisis par les créanciers de son conjoint que si l'obligation a été contractée pour l'entretien du ménage ou l'éducation des enfants, conformément à l'article 220.
Lorsque les gains et salaires sont versés à un compte courant ou de dépôt, ceux-ci ne peuvent être saisis que dans les conditions définies par décret.
L'article 1415 du code civil "Chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint qui, dans ce cas, n'engage pas ses biens propres."
II- Jurisprudence en matière d'emprunts solidaire
1 ère Civ, 6 décembre 2005- BICC 637 du 1er avr. 2006
au visa de l'article 220, alinéas 1 et 3, du Code civil, a rappelé que si toute dette contractée par l'un des époux pour l'entretien du ménage obligeait l'autre solidairement en revanche, la solidarité n'a pas lieu pour les emprunts qui n'ont pas été conclus du consentement des deux époux.
Il en aurait été autrement si l'emprunt avait porté sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante
A) Quand la solidarité peut-elle s'envisager ?
1°- En cas d’emprunts destinés aux besoins de la vie courante ? OUI
1ère Civ, 20 mai 2009, Pourvoi n° 08-12.922
Attendu que, lorsque le créancier d’un époux marié sous le régime de la séparation des biens fait pratiquer une saisie sur un compte ouvert au nom des deux époux, il lui appartient d’identifier les fonds personnels de l’époux débiteur. La solidarité ne jouant ni pour les achats à crédit, quel qu'en soit le montant, ni pour les emprunts souscrits par un seul conjoint sans l'accord de l'autre, sauf s'ils sont nécessaires aux besoins de la vie courante.
2°- en cas d'emprunt lié à une dette ménagère ou de montant modeste ? OUI
1 ere Civ, 4 mai 2011, pourvoi n° 09-72262
Les époux sont engagés solidairement par un emprunt souscrit par un seul d'entre eux uniquement lorsqu'il porte sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante.
1ère Civ, 4 juin 2007, pourvoi N°05-15.351
B) Que se passera t-il si l’époux qui n’a pas consenti rembourse en partie l’emprunt de l’autre ?
1ère Civ, 29 juin 2011, pourvoi N°10-11-012
La cour de cassation a statué au visa des articles 1415 du code civil précité et Article L 331-6 du code de la consommation qui dispose:
"La commission a pour mission de concilier les parties en vue de l'élaboration d'un plan conventionnel de redressement approuvé par le débiteur et ses principaux créanciers.
Le plan peut comporter des mesures de report ou de rééchelonnement des paiements des dettes, de remise des dettes, de réduction ou de suppression du taux d'intérêt, de consolidation, de création ou de substitution de garantie.
Le plan peut subordonner ces mesures à l'accomplissement par le débiteur d'actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. Il peut également les subordonner à l'abstention par le débiteur d'actes qui aggraveraient son insolvabilité.
Le plan prévoit les modalités de son exécution. Sa durée totale, y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement, ne peut excéder huit années. Les mesures du plan peuvent excéder ces délais lorsqu'elles concernent le remboursement de prêts contractés pour l'achat d'un bien immobilier constituant la résidence principale et dont le plan permet d'éviter la cession par le débiteur.
Les créances figurant dans l'état du passif définitivement arrêté par la commission ou le juge ne peuvent produire d'intérêts ou générer de pénalités de retard jusqu'à la mise en œuvre du plan."
En l’éspèce, l’époux qui n’avait pas consenti à l'emprunt contracté par son conjoint , avait malgré tout participé à son remboursement .
La conjointe qui remboursait, n'avait contesté aucun acte de procédure délivré par la banque en condamnation de son débiteur, ni le quantum de la créance d'emprunt revendiquée contre son mari, dont elle avait commencé à en rembourser une partie,jusqu’à ce qu’elle cesser sa participation du fait de difficultés financières.
Pour la Cour de cassation l’épouse, bien qu’ayant participé au paiement des mensualités du prêt, n’était pas engagée solidairement au remboursement de l’emprunt souscrit par son mari.
De ce fait les circonstances dans lesquelles a été souscrit l’emprunt sont sans importance puisqu'elles ne permettent pas de caractériser la nature du prêt comme ayant pourobjet une dette ménagère ni de démontrer que l’emprunt portait sur des sommes modestes nécessaires aux besoins de la vie courante du ménage.
C) Qu'en est-il des dettes litigieuses ?
1ère Civ, 19 septembre 2007, N° de pourvoi: 05-15940
attendu qu'en vertu de l'article 1409 du code civil, la communauté se compose passivement, à titre définitif ou sauf récompense, des dettes nées pendant la communauté et celles résultant d'un emprunt contracté par un époux sans le consentement exprès de l'autre doivent figurer au passif définitif de la communauté dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a souscrit cet engagement dans son intérêt personnel ; qu'ayant relevé que Mme X... ne démontrait pas que son époux avait contracté les emprunts dans son intérêt personnel, la cour d'appel a décidé, à bon droit, que les dettes litigieuses devaient être inscrites au passif de la communauté ; que le moyen ne peut être accueilli
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au barreau de Paris