Le taux de l'intérêt légal est, en toute matière, fixé par décret pour la durée de l'année civile.
Il est égal, pour l'année considérée, à la moyenne arithmétique des douze dernières moyennes mensuelles des taux de rendement actuariel des adjudications de bons du Trésor à taux fixe à treize semaines.
Le Décret n° 2014-98 du 4 février 2014 fixant le taux de l'intérêt légal pour l'année 2014 ( publié au JO du 6 février 2014) a arrêté le taux à 0,04 % pour toute l’année 2014, comme pour l'année 2013.
Ce taux inchangé,n'a jamais été aussi dissuasif pour inciter un débiteur à s'executer !
I- La notion de taux d'intérêt légal
A) Pourquoi ce taux ?
Il doit permettre en principe de fixer et de calculer les pénalités de retard dans le paiement d’une somme d’argent que ce soit dans le domaine bancaire, fiscal ...
La mise en demeure fait en principe le taux de l'intérêt légal dans les décisions de justice
Avant toutes poursuites, un créancier doit mettre en demeure de payer son débiteur ou lui faire délivrer un commandement par voie d’huissier (parfois indispensable )
Ces actes feront courir les intérêts légaux que la loi et la Jurisprudence attachent aux mises en demeure et constitueront le débiteur en retard.
Ce taux s’appliquera lors de l’exécution d’une décision, au « prorata temporis », c'est-à-dire en fonction de la date du paiement.Si un débiteur paye le premier mars, il devra payer un intérêt sur 9 mois, sans compter les majorations de ce taux, le cas échéant que nous envisagerons ci-dessous.
B) Evolution du taux depuis 20072013 et 2014: 0,04%
2012 :0,71 %,
2011 :0,38 %,
2010 :0,65 %,
2009 :3,79 %,
2008 :3,99 %,
2007 :2,95 %.
II- Point de départ et majoration
A) Point de départ
Le point de départ des intérêts à compter du jour de la mise en demeure ou de la sommation retenue comme date dans la décision exécutoire.
Ainsi l'article 1153 du code civil prévoit que:
Dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement.
Ces dommages et intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte.
Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer, ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
Le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.
L’article 1153-1 du code civil dispose :
La condamnation à une indemnité emporte intérêt au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement.
B) Le point de départ s’apprécie lorsque la décision est devenue exécutoire
Article 504 du CPC
La preuve du caractère exécutoire ressort du jugement lorsque celui-ci n'est susceptible d'aucun recours suspensif ou qu'il bénéficie de l'exécution provisoire.
Dans les autres cas, cette preuve résulte :
- soit de l'acquiescement de la partie condamnée ;
- soit de la notification de la décision et d'un certificat permettant d'établir, par rapprochement avec cette notification, l'absence, dans le délai, d'une opposition, d'un appel, ou d'un pourvoi en cassation lorsque le pourvoi est suspensif.
1°- l’exécution de plein droit
- Les ordonnances de référé (rendues par le président du tribunal compétent statuant dans l’urgence pour prendre des mesures conservatoires ou lorsque la demande ne supporte aucune contestation sérieuse.)
- Les créances d’aliments ; (pensions alimentaires)
- Les mesures provisoires pour le cours de l'instance ;( ex en matière de divorce lors de la tentative de conciliation)
- Les ordonnances du juge de la mise en état accordant au créancier une provision ;
-" Les jugements et ordonnances rendus en matière de sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires sont exécutoires de plein droit à titre provisoire" article R 661-1 du code de commerce
2°) L’exécution de plein droit dès le prononcé de la décision sur mention expresse de l’exécution provisoire dans le jugement.
Lorsque l’exécution n’est pas incompatible avec la nature de l’affaire, le Tribunal dans le dispositif de sa décision portera la formule suivante:
« Ordonnons l’exécution provisoire de la décision ».
Parfois est ajoutée la mention "...qui est compatible avec la nature de l’affaire »
La conséquence immédiate fera que :
- les voies d’exécution forcées par voie d’huissier peuvent être mises en place ( saisies...).
Ces frais s'ajoutent à la note du débiteur déjà redevable du capital, et des intérêts en cas d'exécution non spontanée !
3°-) hors les cas 1°) et 2°),il faudra attendre le caractère définitif du jugement pour poursuivre l’exécution.
Le jugement deviendra définitif quand il sera passé en force de chose jugée
Cela signifie qu’il n’est susceptible d'aucun recours suspensif d'exécution. (art.500 CPC) ex Il est rendu en premier et dernier ressort, délai d’appel expiré, ou quand la juridiction du second degré a statué.
Rappel : L’appel ou l’opposition sont des voies de recours ordinaires suspensives d'exécution.
Article 505 CPC Toute partie peut se faire délivrer par le secrétaire de la juridiction devant laquelle le recours pouvait être formé un certificat attestant l'absence d'opposition, d'appel ou de pourvoi en cassation ou indiquant la date du recours s'il en a été formé un.
Le pourvoi en cassation n’étant pas suspensif, les jugements assortis de l'exécution provisoire rendus en première instance ou ceux dont le délai d'appel ou d'opposition est expiré seront concernés.
Des voies d’exécution pourront être mises en œuvre par un huissier chargé de recouvrer les sommes accordées à la partie victorieuse avec les intérêts, et frais en sus !
Il y aura nécessité de notifier la décision revêtue de la formule exécutoire (grosse) pour exécuter et majorer les intérêts .
L’importance de la signification est triple pour:
- l'Information de l’adversaire
- calculer le décompte des délais de recours
- fixer le point de départ des intérêts majorés lorsque la décision est exécutoire et permettre de majorer les intérêts
L'article L 313-2 du code monétaire et financier, qui a repris l'article 1er modifié de la loi n° 75-619 du 11 juillet 1975 fixe le taux de l’intérêt annuel classique.
Selon l'article 3 de la loi du 11 juillet 1975 :
" En cas de condamnation, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fusse par provision.
Ce texte a été repris dans l’article L 313-3 du code monétaire et financier:
"en cas de condamnation, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision".
Le risque concret :
Imaginons une décision exécutoire, signifiée, dont appel est interjeté
En cas d'arrêt de réformation , les intérêts majorés courent à compter du jour de l'arrêt, mais en cas de confirmation partielle ou totale, la majoration s'applique à la condamnation prononcée par le premier juge dans la mesure où elle est confirmée par la Cour.
Ex le demandeur avait gagné 10.000 euros en première instance, et obtient le double devant la cour.
La majoration de cinq points courra deux mois après la décision confirmée pour les premiers 10.000 euros s'ils n'ont pas été réglés, et deux mois après l'arrêt pour les autres 10.000 euros (Cass.com. 18 décembre 1990).
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Maître HADDAD Sabine
Avocate au Barreau de Paris