Le viol entre dans la catégorie agression sexuelle grave définie par l’article 222-22 du Code pénal:
«constitue une agression sexuelle toute atteinte commise avec violence, menace, contrainte ou surprise».
Depuis la loi du 23 décembre 1980, le viol est défini comme « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ( article 222-23 du code pénal).
Il constitue un crime susceptible de la cour d’assises, réprimé de 15 ans de réclusion criminelle , peine qui sera majorée à 20 ans en cas de viol entre époux, partenaire pacsé ou concubin aujourd'hui.
Dans un précédent article, j'ai présenté l'évolution jurisprudentielle et legislative.( article disponible en cliquant sur le lien ci-dessous)
LE VIOL ENTRE EPOUX: EVOLUTION LEGISLATIVE ET JURISPRUDENTIELLE
J'aborderai ici, la détermination de la preuve du défaut de consentement.
I- Les éléments constitutifs du viol
A) La preuve de l’élément matériel et moral s’imposera, et sera appréciée scrupuleusement…
Où commence le désir, où fini le consentement ?
L’erreur judiciaire est toujours possible…
Le traumatisme bien réel…
1°- L’élément matériel du viol
A la différence de l'agression sexuelle qui suppose un contact, des attouchements entre la victime et son agresseur, le viol est constitué par:
a) un acte de pénétration sexuelle commise sur la personne d’autrui (vaginale, anale (sodomie), orale (fellation) ou pénétration par la main ou par objets...)
Crim, 6 déc. 1995, Bull. crim no 372, dans lequel le caractère sexuel de l’introduction du bâton dans l’orifice anal de la victime a été déduit de la présence d’un préservatif sur celui-ci.
Crim, 22 août 2001, pourvoi N° 01-84024 " l’élément matériel du crime de viol n’est caractérisé que si l’auteur réalise l’acte de pénétration sexuelle sur la personne de la victime »
une nuance est posée,quant à la fellation et l'introduction d'objet dans la bouche...
Crim 16 décembre 1997, pourvoi no 97-85455
« Tout acte de fellation constitue un viol au sens des articles précités, dès lors qu’il est imposé par violence, contrainte, menace ou surprise, à celui qui le subit ou à celui qui le pratique"
Crim, 21 févr. 2007, pourvoi n° 06-89.543 "Pour être constitutive d’un viol, la fellation implique une pénétration par l’organe sexuel masculin de l’auteur et non par un objet le représentant"
b) un acte commis avec violence, menace, contrainte, ou surprise. (les moyens du viol seront à envisager, objet, arme, etc...)
Cela permet d’établir par définition le défaut de consentement de la victime.
2°- L’élément moral : la conscience du caractère illégitime de l'acte
Le viol implique que l’auteur ait su, qu'il ait réalisé en conscience imposer à sa victime un acte de pénétration sexuelle, auquel elle ne consent pas librement en connsissance de cause.
Souvent, la preuve de l'élément moral découlera des moyens employés par l'auteur du viol pour atteindre son but.
Lorsque le défaut de consentement sera douteux, la notion "fourre tout" d'attouchemlents sexuels " sera un moyen de sanction.
II-Les moyens de preuve
A) La police scientifique : les éléments issus de la scène du crime
Les prélèvements seront importants.
Il conviendra si possible que la victime ne se lave pas à cette fin, lors du dépôt immédiat de plainte, afin que des prélèvements corporels se fassent au sein des UMJ.
Tout morceau de tissu (vêtements, dessous) empreinte ADN dans le cheveu, de sperme, digitale ou autre empreinte de l'auteur, toutes traces de sang , de coups…seront des indices.
Les premières analyses d’urine seront utiles à conserver après le viol…
B) Les auditions et confrontations liées aux faits : l’analyse des faits et des contradictions
cela se fera au regard des déclarations des uns et des autres.Souvent c’est parole contre parole, il faut rechercher les contradictions, incohérences,climat...
Le cas échéant l'éventuelle audition des tiers, ou enfants qui ont pu assister aux faits.
Les contradictions seront relevées par les enquêteurs ,le juge d’instruction, la cour d’assises…l’analyse des faits…
L’aveu, reine des preuves, serait l’idéal…
C) Les enquêtes : voisinage, personnalité de l’agresseur et de la victime
Recherche du caractère pervers, passé du mis en cause, condamnations passées, (casier)
D) La consultation de fichiers
-fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes (FIJAIS) issu de la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004
placé sous la responsabilité du ministère de la Justice (service du casier judiciaire) et le contrôle d'un magistrat.
-fichier national automatisé des empreintes génétiques FNAEG
La loi du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles a créé le FNAEG qui centralise les empreintes génétiques (ADN) des personnes non identifiées, dont les empreintes sont issues de prélèvement sur les lieux d’une infraction, personnes identifiées, qui ont été condamnées ou mises en cause dans une procédure pénale (selon l’article 706-55 du Code de procédure pénale dont les infractions de nature sexuelle...
Le fait de refuser de se soumettre au prélèvement biologique prévu au premier alinéa du I est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende. Lorsque les faits sont commis par une personne condamnée pour crime, la peine est de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende.
E) Les expertises psychiatriques et examens médicaux
Enquête de personnalité, entourage, voisinage, de famille
Tant pour l’agresseur que la victime Les expertises psychiatriques vont également rentrer en ligne de compte ainsi que d’autres éléments qui vont forger la conviction du juge.
F) Les témoignages
En conclusions rappelons deux points essentiels :
- La prescription
La loi fixe une prescription pénale pour les victimes majeures, de 10 ans, à compter de la date des faits, pour porter plainte en cas de viol et de 3 ans s’agissant des agressions sexuelles.
- La possibilité d’invoquer ce comportement, comme grief dans le cadre d’un divorce pour faute, souvent couplé avec des injures et violences…
A contrario, le refus de relations pourrait constituer une faute 2ème Civ, 16 décembre 1963, D 64 p. 227 , dans les devoirs du mariage, au même titre que l'excès TGI Dieppe 25 juin 1970, GP 70 II 243…
La question de la preuve reste entière.
Demeurant à votre disposition pour toutes précisions.
Sabine HADDAD
Avocate au barreau de Paris