L’article L 300-4 du Code de l’urbanisme prévoit que l’attribution des concessions d'aménagement est soumise par le concédant à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes.
En l’espèce, la Commune de SAINT-TROPEZ avait lancé une procédure de mise en concurrence d’une concession d’aménagement de plusieurs secteurs du centre-ville. L’offre de la société KAUFMAN & BROAD PROVENCE avait été sélectionnée, et le contrat signé. La société SAGEM évincée a alors diligenté un recours en contestation de validité de la concession d‘aménagement.
Le Tribunal administratif de TOULON, puis la Cour administrative d’appel de MARSEILLE, avaient débouté la requérante. Le Conseil d’Etat annule l’arrêt de la Cour et renvoie l’affaire au fond, en accueillant trois moyens.
En premier lieu, le Conseil d’État rappelle « le concédant doit tenir compte des capacités techniques et financières des candidats à l'opération d'aménagement ; que s'il a la faculté de demander à un candidat, dans le respect du principe d'égalité, de compléter son dossier afin qu'il puisse justifier de ses aptitudes […], il ne peut légalement sélectionner l'offre d'un candidat n'ayant pas justifié de ses capacités »
Il considère donc qu’« en jugeant que le concédant pouvait sélectionner un candidat qui n'a pas justifié de ses capacités techniques et financières, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ».
En second lieu, le Conseil d’Etat relève qu’initialement, « l'objet de l'opération d'aménagement était la réalisation de 240 logements ; que les dossiers de demande de permis de construire nécessaires à l'opération sur le secteur du couvent, et sur la base desquels les offres devaient être élaborées, ont été établis par le cabinet d'architecture Vieillecroze, maître d'œuvre de la commune de Saint-Tropez ; qu'il ressort également des pièces du dossier soumis aux juges du fond que ce même maître d'œuvre a été le conseil de la société attributaire, y compris pendant la phase de négociation des offres au cours de laquelle des permis de construire étaient encore en instruction ».
Le candidat retenu avait ainsi été conseillé, y compris pendant la phase de négociation, par le même cabinet de maîtrise d’œuvre que celui qui avait réalisé les dossiers de demande de permis de construire nécessaires à l'opération, et sur la base desquels les offres devaient être élaborées…
Le Conseil d Etat en déduit qu'en « en écartant la méconnaissance du principe d'égalité entre les candidats au motif que tous les candidats avaient reçu communication des permis de construire, la cour administrative d'appel de Marseille a commis une erreur de droit ».
En troisième lieu, il était prévu dans le contrat de concession la construction de logements sociaux de types " PLAI " et " PLUS ", représentant plus de la moitié des logements locatifs, pourtant non envisagés dans les documents de la consultation.
Le juge administratif relève que « pour de tels logements sociaux non prévus lors de la mise en concurrence, les constructeurs bénéficient d'importantes subventions publiques et de taux d'emprunt privilégiés ».
En outre, l'offre de l’attributaire prévoyait une densité supplémentaire de 2 000 mètres carrés environ sur le site de l'ancien hôpital par rapport au projet présenté dans le document programme, soit une hausse à ce titre de 10 % de la surface, ainsi que 90 places supplémentaires de parking pour un nombre initialement prévu dans les documents de la consultation.
Le Conseil d’Etat considère qu’ « en estimant que ces modifications intervenues au stade de la signature de la convention n'avaient pas modifié substantiellement l'économie du projet mis à la concurrence et n'avait pas, ainsi, porté atteinte aux règles de publicité et de mise en concurrence, la cour, sans se prononcer explicitement sur l'argument portant sur la modification, en cours de passation, de l'objet du contrat en raison de l'augmentation de la surface hors oeuvre nette de la concession et de l'addition d'un nouveau niveau de parking, a inexactement qualifié les faits qui lui était soumis ».
Le Conseil d’État souligne ainsi que l’offre retenue par le pouvoir adjudicateur était très différente des documents de la consultation, et applique une solution classique, à savoir que lors de la négociation, les conditions initiales de la mise en concurrence ne peuvent être substantiellement modifiées.
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Hélène LELEU, Avocat au Barreau de LYON
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