L'eSport ne cesse de se développer : de nombreuses compétitions, tant nationales qu'internationales, sont régulièrement créées.
On assiste ainsi à l'immixtion de nombreux investisseurs souhaitant capitaliser sur ce nouveau phénomène.
Toutefois, en dépit de ce développement, le statut de l'eSport demeure flou : l'eSport est-il considéré, juridiquement, comme un sport ?
Afin de répondre à cette question, il convient de s'intéresser à :
- la définition juridique du sport (1.) ;
- la reconnaissance progressive de l'eSport en tant que sport (2.).
1. La définition juridique du sport
Le code du sport ne donne pas de définition du sport.
Il ne liste pas, non plus, les activités sportives soumises au code du sport.
La seule référence aux activités physiques et sportives se trouve à l'article L. 100-1 de ce code, selon lequel : "les activités physiques et sportives constituent un élément important de l'éducation, de la culture, de l'intégration et de la vie sociale.
Elles contribuent notamment à la lutte contre l'échec scolaire et à la réduction des inégalités sociales et culturelles, ainsi qu'à la santé etc."
D'un point de vue communautaire, l'article 2 de la charte européenne du sport définit le sport comme : " toute forme d'activité physique qui à partir d'une participation occasionnelle ou organisée vise à développer la santé physique et le bien-être mental, à établir des relations sociales ou obtenir des résultats dans des compétitions de différents niveaux".
Le Conseil d'Etat a ensuite précisé la notion en se fondant sur plusieurs indices :
- la recherche de la performance physique, le caractère physique étant défini par la Cour de cassation comme la mobilisation de "ressources corporelles, psychologiques, affectives et émotionnelles" (Cass. Crim. 20 mars 2001, n°00-83286)
- l'existence d'une règlementation sportive permettant l'organisation régulière de compétitions.
C'est, ainsi, en se fondant sur ces critères que des disciplines, telles que le paintball ou encore le bridge, se sont vues refusées l'agrément par le ministère des Sports, et que ce refus a été confirmé par le Conseil d'État aux motifs que ces activités étaient pratiquées principalement comme loisirs.
Le Conseil a, en effet, retenu que le paintball ne s'adressait pas « nécessairement à des sportifs qui recherchent la performance physique au cours de compétitions organisées de manière régulière sur la base de règles bien définies » (CE 13 avr. 2005, n° 258190) et que le bridge ne tendait pas « à la recherche de la performance physique » (CE 26 juill. 2006, n° 285529).
2. La reconnaissance progressive de l'eSport en tant que sport
A ce jour, l'eSport n'est pas encore véritablement reconnu comme étant un sport, au sens juridique du terme.
Toutefois, la tendance est à une reconnaissance qui apparaît légitime dans la mesure où :
- d'une part, l'eSport semble remplir les critères fixés par le Conseil d'Etat ; et,
- d'autre part, un encadrement est nécessaire eu égard à ses nombreux enjeux.
S'agissant des critères, celui inhérent à l'organisation de compétitions régulières est indubitablement rempli (E-Football League, Electronic Sports World Convention, Red Bull Kumite, Dreamhack Tours etc.)
Quant au critère de recherche d'une performance sportive, au regard de la durée des compétitions, de la concurrence et des ressources physiques nécessaires à l'obtention d'un titre (endurance, concentration, vitesse d'exécution etc.), l'on peut vraisemblablement considérer qu'il est rempli.
Un encadrement de l'eSport est, par ailleurs, nécessaire eu égard notamment aux enjeux suivants :
- La sécurisation des manifestation sportives par l'application des dispositions protectrices du code du sport (Cf. notamment article L. 332-1 du code du sport) ;
- Les enjeux économiques qui sont en constantes progression dans la mesure où le développement de la médiatisation emporte un développement de la financiarisation : les compétitions font l'objet de retransmissions audiovisuelles qui posent la question des droits d'exploitation (articles L. 331-1 et suivants du code du sport) ;
- Le risque de publicité dissimulée ;
- L'offre de paris en ligne ; ou encore,
- L'application des dispositions protectrices du code du sport en matière de transfert des joueurs (Cf. articles L. 222-7 et suivants du code du sport).
En conséquence, bien qu'une reconnaissance législative voire règlementaire soit nécessaire, il semble que l'eSport soit, dès à présent, en mesure d'être juridiquement considéré comme un sport. Il s'agit, en tout état de cause, d'une nécessité au regard des nombreux enjeux précités.
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Laurent FELLOUS
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