Ce que l’on conçoit bien, s’énonce clairement!
Le 22 septembre 2014, dans un avis très attendu, la Cour de cassation vient de rendre un avis favorable à l’adoption par un couple de femmes mariées de leur enfant conçu par PMA à l'étranger.
La Cour suprême indique ainsi que « le recours à l’assistance médicale à la procréation, sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption, par l’épouse de la mère, de l’enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant. »
Cet avis fait suite à la saisine par les Tribunaux de Grande Instance de Poitiers et d’Aix-en-Provence qui refusaient aux mères sociales d’adopter l’enfant de leur compagne né de PMA à l’étranger. Ces Tribunaux estimaient que ces recours constituaient une « fraude à la loi » et revenaient à contourner le droit français.
Il est nécessaire de rappeler qu'il s'agit de décisions isolées puisque dans la majorité des cas (281 sur 295 dossiers déposés selon le ministère de la Justice : source Le Monde), les demandes d’adoption par des couples homosexuels ont abouti avec succès dans le reste de la France.
Cet avis permet donc d’apporter une clarification juridique et globale à la suite de la réforme du Droit du mariage français au printemps 2014.
Dominique Bertinoti, ancienne ministre de la famille salue cette décision en précisant que cela permettra de « sécuriser les nombreux enfants nés de PMA à l’étranger chaque année » (Source tweeter).
L’association SOS HOMOPHOBIE mais aussi l’Association de défense des familles homoparentales (ADFH) se réjouissent de cet avis «qui ne vise que l'intérêt supérieur de l'enfant à être protégé et reconnu par ses parents, quel que soit son mode de conception. Bien que cet avis ne soit pas contraignant, l'ADFH enjoint tous les magistrats à le suivre, y compris ceux qui par convictions personnelles ou par interprétations aléatoires de la loi ouvrant l'adoption aux couples homosexuels, avaient jusqu'à présent refusé de prononcer ces adoptions». (Source le Parisien)
L’hypocrisie de cette histoire tient dans le fait que le droit français interdit toujours le recours à la PMA aux couples de femmes mais autorise néanmoins la création juridique d'un lien de filiation entre un parent social et son enfant né d’une PMA.
Autre difficulté : Cette possibilité d’adoption n’est donnée qu’à la mère sociale mariée à la mère biologique de l’enfant né de PMA. Cette exigence ne se retrouve pas lorsque deux personnes hétérosexuelles non mariées souhaitent adopter l’enfant de l’autre.
Cette différence de traitement entre les couples (mariés/pacsés/concubins/hétérosexuels/homosexuels) risque très certainement d’être combattue très rapidement au nom du grand principe européen mais aussi français de non-discrimination.
Clémentine LETELLIER, avocat