Droit des patients soignés sous contrainte - Aménagement de l'information

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Droit des patients soignés sous contrainte - Aménagement de l'information

- Le principe de l’obligation d’information

L’obligation d’information est prévue par l’article L.1111-2 du Code de la santé publique : « toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé ».

Cette information est très large puisqu’elle « porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ». Il résulte de cet article que le patient est devenu un véritable coauteur des décisions concernant son état de santé, grâce à son droit à l’information qui lui permet de comprendre sa pathologie et de connaitre les thérapeutiques possibles. 

Il résulte de l’article 35 du Code de déontologie médicale que l’information doit être donnée de manière « loyale, claire et appropriée ».

Le médecin doit apprécier les facultés de compréhension de son patient et tenir compte de sa personnalité pour lui communiquer une information adaptée. Il devra notamment informer le mineur et le majeur sous tutelle de manière adaptée à leur degré de maturité ou à leurs facultés de discernement. Il en est de même pour le patient soigné sous contrainte qui recevra une information adaptée à ses facultés mentales.

 

Une information spécifique donnée au patient hospitalisé sous contrainte : l'information sur les droits

L’hospitalisation sous contrainte étant une modalité de soins particulière, il convient de donner toutes les informations nécessaires au patient concerné. Il ne s’agit pas des informations relatives à la santé du patient, mais de celles concernant sa situation juridique et ses droits.

La  personne hospitalisée sans son consentement doit être informée, dans le plus bref délai, des raisons de son hospitalisation.

En droit français, l’alinéa 2 de l’article L.3211-3 du Code de la santé publique dispose que la personne atteinte de troubles mentaux hospitalisée sans son consentement « doit être informée dès l’admission et par la suite, à sa demande, de sa situation juridique et de ses droits ».

Elle est notamment informée de la possibilité de former un recours contre la mesure d’hospitalisation dont elle fait l’objet et de formuler ses réclamations à la Direction de l’hôpital.

Ce droit à l’information constitue une garantie minimale qui compense, ou du moins relativise les désagréments de l’hospitalisation sous contrainte, car il permet au patient de connaître sa situation et de s’y opposer. Cela lui laisse la possibilité de s’exprimer et montrer son désaccord malgré ses troubles mentaux constatés médicalement, et constitue la preuve que l’internement n’est jamais une situation définitive et qu’il est possible de ″sortir″ d’un hôpital psychiatrique. 

 

- La nécessité thérapeutique d’adapter l’information

« Dire la vérité, ici comme ailleurs, ce n’est pas transmettre sauvagement une information exacte ou probable dont on serait quitte une fois pour toutes, dire la vérité, c’est aussi évaluer les effets que son dire produit dans une situation donnée pour les sujets nécessairement singuliers. Faute de quoi le praticien se destituerait de sa fonction thérapeutique et de la dimension éthique de son acte » (Roland Gori, Marie-José Delvolgo).

L’article L.1111-2 du Code de la santé publique, relatif à l’obligation d’information médicale, ne prévoit pas le cas particulier du patient hospitalisé sans son consentement.

La question est celle de savoir si le patient psychiatrique peut réellement recevoir toute l’information qui concerne son état de santé.

Lors du colloque de lancement sur le thème « 2011, année des patients et de leurs droits », qui a eu lieu le 4 mars 2011, a été diffusée une vidéo dans laquelle Bernard Kouchner disait que toute vérité n’est pas bonne à entendre, qu’ « on ne peut pas dire à un fou qu’il est fou ». C’est une manière abrupte d’affirmer que le patient soigné en psychiatrie n’est parfois pas apte à recevoir l’information, simplement parce qu’elle ne lui serait pas supportable.

Selon la jurisprudence, l’information médicale doit être « appropriée » (Cass, Civ. 1ère, 14 octobre 1997, n° 95-19609). Il convient parfois de limiter son étendue lorsque le patient n’est pas en mesure de supporter l'information donnée et que celle-ci empêcherait la bonne efficacité des soins. Cette limitation thérapeutique est prévue à l'article 35 alinéa 2 du Code de déontologie médicale, qui dispose que « dans l’intérêt du malade et pour des raisons légitimes que le praticien apprécie en conscience, un malade peut être tenu dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic grave ». L’application de ce texte est d’autant plus justifiée dans le domaine de la psychiatrie, en raison des troubles particuliers dont souffrent les patients.

Ainsi, cette exception a été consacrée, en matière psychiatrique, par un arrêt de la première chambre civile du 23 mai 2000.
Dans cette affaire, un patient maniaco-dépressif reprochait à son psychiatre de ne pas lui avoir fait part de son diagnostic. Il a été débouté, au motif que le médecin est autorisé « à limiter l'information de son patient sur un diagnostic ou un pronostic grave » pour des motifs légitimes et dans l’intérêt du patient. En l’espèce, « la révélation de ce diagnostic devait être faite avec prudence compte tenu de l'alternance des phases mélancoliques et d'excitation maniaque ; qu'ayant ainsi souverainement estimé que l'intérêt du patient justifiait la limitation de son information quant au diagnostic, la cour d'appel a pu décider que le praticien n'avait pas commis de faute ».

Il s’agit d’une limitation thérapeutique de l’information qui est totalement justifiée pendant la période des soins pour assurer l’efficacité de la prise en charge du patient.

 

- L’accès encadré du patient en psychiatrie à son dossier médical

Depuis la loi du 4 mars 2002, le principe, affirmé à l’article L.1111-7 du Code de la santé publique, est l’accès direct du patient à ses documents médicaux.

En revanche, le même article prévoit une exception dans son alinéa 4 : « la consultation des informations recueillies, dans le cadre d’une hospitalisation sur demande d’un tiers ou d’une hospitalisation d’office, peut être subordonnée à la présence d’un médecin désigné par le demandeur en cas de risques d’une gravité particulière ».

Il convient de saluer cette initiative législative d’introduire une exception dans ce domaine puisqu’en psychiatrie, l’accès direct aux informations, sans explications ni interprétations, peut être néfaste. Elle est en effet susceptible de freiner le processus de guérison en générant une incompréhension de la part du patient, déjà vulnérable.

Encore une fois, cette limitation de l’accès aux informations médicales constitue une mesure protectrice du patient, qui n’est concevable que lorsque la personne est réellement malade et qu’il en va de son intérêt de ne pas recevoir l’information.

Des interrogations apparaissent, et notamment celle de l’appréciation du risque. A partir de quel moment l’accès aux informations médicales constitue-t-il un « risque d’une gravité particulière » ? La réponse est donnée par une circulaire du 14 février 2005, qui indique que « la gravité particulière s’apprécie en liant la nature des informations de santé présentes dans le dossier médical à l’état de santé de la personne ».

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