L’encadrement des loyers : Impact pratique
I. Le principe et le champs d'application de la loi:
a. Champs d'application
L'encadrement des loyers mis en place par le gouvernement est entré en vigueur le 1er août. Il s'applique lors d'un changement de locataire mais aussi pour les locataires déjà en place. Il concerne 38 agglomérations où les loyers pratiqués sont jugés excessifs.
En cas de renouvellement du bail, de changement de locataire ou de remise sur le marché d'un logement vacant entre le 1er août 2012 et le 31 juillet 2013, les bailleurs peuvent augmenter les loyers mais la hausse est limitée.
Autrement dit le propriétaire ne peut pratiquer entre deux locations une hausse du loyer supérieure à celle de l’indice de référence des loyers (IRL).
Ce dispositif qui s’applique aux nouvelles locations et aux renouvellements de baux concerne des agglomérations où des tensions anormales du marché locatif sont constatées :
en métropole (Amiens, Annecy, Annemasse, Arles, Beauvais, Bordeaux, Caen, Creil, Douai-Lens, Forbach, Fréjus, Grenoble, la Rochelle, le Havre, Lille, Lyon, Marseille-Aix, Meaux, Menton, Montpellier, Nantes, Nice, Paris, Rennes, Strasbourg, Toulon et Toulouse),en outre-mer (Basse-Terre, Cayenne, Fort-de-France, le Robert, Mamoudzou, Pointe-à-Pitre-Les Abymes, Saint-André, Saint-Denis, Saint-Louis, Saint-Paul et Saint-Pierre).
Le décret va au-delà de ce que la ministre avait promis avant les élections législatives. Il limitera bien les augmentations de loyers à la relocation, c'est-à-dire entre deux locataires. Mais il s'appliquera également lors de la révision du bail, tous les trois ans, pour les locataires déjà installés dans leur logement.
Dans les deux cas, le loyer ne pourra pas augmenter plus que l'indice de référence des loyers (IRL). À titre d'exemple, celui-ci a été porté à 2,24 % au 1er avril 2012.
Enfin, ce dispositif ne concerne que les locations nues proposées aux titres de résidence principale du locataire. La location en meublé échappe donc à ce plafonnement.
b. Exceptions:
Des dérogations sont prévues en cas de travaux importants pour un logement vacant ou s’il y a une sous évaluation manifeste par rapport aux loyers pratiqués dans le voisinage pour des logements comparables.
Dans ce dernier cas, la hausse est une nouvelle fois limitée selon deux options (au choix) :
L'augmentation peut rattraper la moitié de la différence avec les loyers du voisinage. Par exemple, si vous louez un appartement à 1.000 euros et que les prix constatés aux alentours sont plutôt de l'ordre de 1.200 euros, vous aurez le droit de réévaluer le loyer à 1.100 euros.La hausse peut également correspondre sur un an à 15% des coûts TTC de travaux d'amélioration du bien immobilier (parties privatives ou parties communes). Il faut cependant que ces travaux représentent au moins le loyer annuel perçu l'année précédente dans le cas d'un renouvellement du bail et la moitié du dernier loyer annuel dans le cas d'un logement vacant. Concrètement, en cas de renouvellement du bail, si vous avez réalisé 5.000 euros de travaux et que les loyers versés sur un an vous rapporte au maximum 5.000 euros par an, vous pourrez augmenter votre loyer de 750 euros pour l'année, soit 62,50 euros par mois.
II. Une mesure dont l'efficacité reste discutable
a. Une sanction relativement peu dissuasive
L’application de cette loi se heurte à la difficulté pour les nouveaux locataires de connaître le loyer de leurs prédécesseurs. En effet, aucun texte n’impose aux propriétaires de fournir cette information. Cette absence de contrôle des bailleurs est une des principales limites du décret.
En effet, dans le cas d'un renouvellement de bail, les locataires pourront vérifier sans problème que leur propriétaire respecte la loi. Mais s'il s'agit d'un nouveau contrat, cela risque de devenir beaucoup plus compliqué. Le propriétaire n'est en effet pas tenu d'indiquer à son nouveau locataire l'ancien loyer qu'il appliquait jusqu'ici.
SI l'augmentation dépasse le montant autorisé, le locataire pourra mettre en demeure le propriétaire de réviser le montant du loyer. Si le litige persiste, Il pourra aussi recourir à une commission de conciliation ou encore porter l'affaire en justice.
La procédure longue et laborieuse pourra en décourager plus d'un...
b . Une mesure d'encadrement qui paraît arriver à contretemps
L’indice des loyers sur la France entière, établi à partir des loyers des nouvelles locations et des relocations ralentit encore et n’est en hausse que de 1,2% contre 1,6% en 2011.
Dans un paysage de la location devenu atone étant donné la cherté des prix, la mesure d'encadrement paraît arriver à contretemps.
En fait, cette mesure arrive trop tard. Les loyers sont déjà élevés, dans le 14ème arrondissement de Paris par exemple, un quartier populaire de la capital, un deux pièces de 40m2 se loue autour de 1 400 euros par mois et un trois pièces autour de 1 800 euros par mois. Le dispositif d’encadrement de loyer bloque les prix mais n’entraîne aucune baisse.
De plus, très peu de locataires semblent s’emparer de ce dispositif. Tout se passe comme si les locataires ne se faisaient aucune illusion. A l'Agence nationale pour l'information sur le logement (Anil), chargée par le ministère du logement de répondre aux questions des locataires ou des propriétaires, via un numéro vert (0 805 160 111), les appels n'ont pas explosé, loin s'en faut.
Ce décret du 1er août même relativement lacunaire semble pourtant marquer une première étape avant une nouvelle loi de plus grande envergure sur le logement prévue en 2013.
Une loi que la ministre souhaite suffisamment ambitieuse pour bouleverser les rapports locatifs.