Officiellement pour soutenir la croissance économique, l’objectif est de coordonner les politiques fiscales.
Il s'agit plus particulièrement d'accélérer le processus d'adoption de la proposition de directive relative à l’assiette commune consolidée d’IS (ACCIS).
La Chancelière et le Président l’ont affirmé dans leur lettre commune au Président du Conseil européen du 17 août 2011. Les ministres concernés ont été priés de présenter des propositions concrètes en vue de la convergence de l’assiette et des taux de l’IS en Allemagne et en France. Plusieurs domaines potentiels de convergence ont été retenus.
Ces propositions doivent être mises en œuvre à compter de 2013. Les objectifs et le calendrier sont ambitieux pour ne pas dire intenables.
N'oublions pas que cette convergence n'apparait pas être du goût de François Hollande et que la situation électorale de la Chancelière s’annonce délicate en 2013. Le succès de l’un et/ou l’échec de l’autre pourrait remettre en cause tout ce processus de convergence.
I - Les convergences
Ces convergences ont été relevées par un rapport de la Cour des comptes de mars 2011. Ce rapport témoigne de deux systèmes fiscaux très différents.
Outre qu’il n’y a aucune concurrence fiscale significative entre les deux pays, une grande proximité en matière de prélèvements existe déjà.
Tout d’abord, on relève un point commun : un niveau de protection sociale élevé dont le financement repose largement sur des cotisations salariales.
Cette caractéristique commune s’est traduite par une préoccupation particulière en matière de coût du travail qui a eu pour conséquence la mise en œuvre de politiques, d’ampleur et de modalités très différentes. Elle a eu pour objet de réduire le niveau des cotisations pesant sur les salaires les plus faibles.
Cela s'est également traduit par une augmentation de la part des ressources fiscales dans le financement de la protection sociale. Cette augmentation s'est traduite sous forme de recettes fiscales affectées en France, sous forme de subventions venant du budget général en Allemagne.
La France et l’Allemagne ont des impôts souvent proches. Les taux normaux de TVA sont quasiment identiques (19,6 % en France contre 19 % en Allemagne). Ce qui n'est pas la situation commune en Europe, loin de là.
L’imposition des revenus légèrement différente puisque le taux marginal maximum est de 45 % en Allemagne contre 41 % en France.
Le taux d’imposition des bénéfices des sociétés apparait éloigné au premier abord (15 % en Allemagne ; 33,3333 % en France, plus pour les grandes entreprises). Toutefois, la réalité est différente. que ce que suggère la comparaison des seuls taux d’IS : une fois pris en compte l’impôt local sur les bénéfices allemand, les deux pays affichent des taux de prélèvement sur les bénéfices compris entre 30 % et 35 % (hors surtaxe de solidarité en Allemagne).
La similarité entre les deux pays est donc bien réelle.
II - Quatre différences
1 - Prélèvements d’État, fiscalité locale et prélèvements sociaux s’agencent différemment. Les Länder et les collectivités locales tirent la majeure partie de leurs ressources d’impôts partagés avec le Bund. Les impositions locales propres (impôts fonciers, taxe professionnelle) ne représentent que 30 % de ces ressources.
Il en va de même en social. L’Allemagne n’a pas de fiscalité affectée à la protection sociale mais assure l’équilibre des régimes par voie de subventions budgétaires alimentées par la fiscalité générale.
2 - En matière de taxation du patrimoine, la France se situe à un niveau deux fois plus élevé que la moyenne des pays de l’UE. L’Allemagne est à un niveau deux fois moindre. L’explication est dans la différence de poids de l’imposition foncière. Ceci est probablement lié à de vielles frustrations issue de la révolution française, une certaine haine envers les propriétaires fonciers.
3 - Un nombre, frissant le délire, d’impôts et taxes pèse lourdement en France sur les coûts de production.
Ces impôts n'ont pas d'équivalent en Allemagne. Ils représentent entre 25 et 58 Md€. La fourchette varie selon qu'elle est basée uniquement sur les cotisations sociales salariales ou que la totalité est prise en compte. Le vrai problème de compétitivité se situe donc au niveau des charges pesant sur la production et non au niveau de l’IS.
4 - Le poids respectif des cotisations sociales est sensiblement différent.
Cet écart renvoie pour une large part au choix historique de la France de faire reposer sur les salaires une proportion significative (~33 Md€) du financement des prestations familiales alors qu’en Allemagne ces dernières sont financées par le budget de l’État et leur attribution articulée avec l’IR. Les choses devraient en partie changer en France avec la mise en place de la TVA sociale à compter du 1er octobre prochain.
III - Trois divergences
1. La France ne se préoccupe plus vraiment de la maîtrise des déficits publics. L’écart de déficits publics entre les pays se creuse un peu plus chaque jour.
2. La fiscalité dérogatoire est plus répandue en France. Le poids relatif des niches fiscales et sociales n’a cessé de croître depuis 2000 au point de devenir, comme la Cour des Comptes l’a souligné, un enjeu budgétaire majeur. Il s'agit de plus de 70 Md€ pour les seules dépenses fiscales. Du côté allemand, le souci de préserver la recette budgétaire par une assiette plus large est resté intact.
3. La politique fiscale menée est menée de façon continue depuis une dizaine d’années en Allemagne. L’Allemagne a donné la priorité à la compétitivité de l’économie. Cela s'est tréduit par un allégement des cotisations sociales, un alourdissement de la TVA et de la fiscalité environnementale. Durant la même période, les priorités de la politique fiscale française ont été moins nettes et plus variables.
Au final, la convergence paraît bien être le plan B rendu inévitable par l’échec annoncé de la directive ACCIS dont l’adoption ne pourrait se faire qu’à l’unanimité des 27. Si on rajoute à cela les incertitudes des élections... le projet n'entrera probablement jamais en vigueur.