Le Barreau du Luxembourg vient de prendre une décision fondamentale. Il a réintégré, en son règlement intérieur de l’Ordre des avocats, le droit de rétention qui permet à un avocat de retenir le dossier d’un client en attente du paiement de ses honoraires. En 2013, on avait supprimé ce droit de rétention car le Barreau avait tellement de retard dans l’évaluation des honoraires et leur taxation que cela entrainait des catastrophes judiciaires. Finalement, après avoir réglé cette question et réduit les délais, le Barreau a réinstauré le droit de rétention le 6 décembre 2017.
Le droit porte sur le travail de l’avocat (correspondances, recherches juridiques, procédure). Le droit de rétention a été réinstauré du fait de l’infidélité de la clientèle et surtout du fait que le nouvel avocat choisi par le client ne se sentait pas responsable du paiement des honoraires de son prédécesseur.
Ainsi, le nouvel avocat choisi ne peut recevoir aucune rémunération tant que les frais et honoraires revenant à l’avocat dessaisi n’auront pas fait l’objet d’un règlement ou d’une consignation. Il faudra que l’avocat dessaisi remette, sous 15 jours, son mémoire de frais et honoraires à taxer. Puis, le Barreau taxe et la note d’honoraires taxée s’impose déontologiquement au nouvel avocat. En revanche, la taxation ne s’impose pas au client et celui-ci peut porter l’affaire devant le Tribunal.
En droit français, le droit de rétention n’existe pas. Mais la solidarité entre confrères a disparu. De ce fait, lorsque l’avocat est dessaisi, il n’a plus comme ressource, après avoir envoyé la lettre d’usage à son successeur (qui, souvent, subit un classement vertical) de saisir son Bâtonnier pour taxer puis de poursuivre le client indélicat. Cela peut prendre beaucoup de temps.
Il est évident que la réinstauration, dans notre Règlement Intérieur National, de ce droit de rétention simplifierait beaucoup les choses, allègerait les procédures de taxation devant le Bâtonnier et, de ce fait, les recours devant la Cour d'Appel.
On pourrait également songer, dans les Ordres, en matière d’honoraires, à l’intervention de médiateurs qui réuniraient clients et avocats. Je suis persuadé que cette médiation aboutirait dans de très nombreux cas. Il y a souvent un malentendu entre l’avocat dessaisi et son ex-client.
Michel BENICHOU