Le Conseil des Barreaux Européens, en 2016, sous ma présidence, a décidé d’une grande opération dénommée « Avocats européens à LESBOS ». Ce projet, prévu avec le DAV, consistait à répondre au désarroi des émigrés arrivant dans les îles grecques, enregistrés dans les hotspots et dépourvus de toute aide juridique. Cette situation dans les hotspots était compliquée puisqu’il y avait une absence de contrôle judiciaire des procédures administratives et le développement d’une grande précarité.
Même si les avocats grecs interviennent au niveau de l’aide juridique dans la procédure, notamment d’appel, il n’y avait aucune aide d’urgence en matière juridique aux fins d’aider les migrants à préparer leur entretien avec la commission d’asile. Or, cet entretien est vital. C’est lors de cet entretien que va nécessairement se déterminer le futur du migrant. En effet, il est interviewé par un expert du comité d’asile européen (EASO). Celui-ci va donner un avis et cet avis va être examiné par le comité grec d’asile qui prendra la décision. Pendant un certain temps, le service grec d’asile n’était plus en mesure d’assurer l’enregistrement des demandes d’asile ni de rendre des décisions de première instance ou des décisions définitives en appel dans un délai raisonnable compte-tenu du nombre de migrants.
Le Conseil des Barreaux Européens a lancé un appel, d’une part, aux barreaux pour que ceux-ci financent cette opération et, d’autre part, aux avocats volontaires. Concernant le financement, j’ai eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’intervenir auprès de différents barreaux lors de colloques ou par courrier pour obtenir des financements. En deux mois, les barreaux européens se sont mobilisés et ont débloqué une somme de 220.000 euros. C’est un soutien exceptionnel. Certes, beaucoup de barreaux, flamboyants dans leur discours sur les droits de l’homme, n’ont pas participé à cette opération et c’était décevant.
Le Barreau grec s’est largement investi pour soutenir cette opération. La Fédération des Barreaux d'Europe a diffusé à tous les barreaux l’appel à contribution et a décidé elle-même de contribuer. L’Union Internationale des Avocats a également distribué l’appel du C.C.B.E.. Enfin, pour la France, quelques barreaux ont répondu (Lyon, Grenoble, Hauts-de-Seine, Rennes, Paris, Strasbourg, Seine Saint Denis). Aucune conférence régionale n’a participé et que de nombreux grands barreaux (notamment du Sud de la France) n’ont pas répondu à cet appel. Le Conseil National des Barreaux et la Conférence des Bâtonniers sont intervenus pour financer ce projet.
Parallèlement, j’avais adressé une lettre pour susciter l’adhésion d’avocats souhaitant intervenir pro bono aux fins d’aider les migrants. En deux mois, plus de 200 volontaires se sont manifestés de toute l’Europe. Actuellement, le projet – en janvier 2017 – avait prêté assistance à plus de 525 personnes venant de 31 pays différents. Près de 30 bénévoles se sont rendus sur les lieux venant de 10 pays européens différents. Ils ont accepté de passer au moins 3 semaines à LESBOS. Ils avaient comme obligation d’avoir une bonne maitrise de l’anglais et parfois de l’arabe, et d’être des spécialistes en droit d’asile et en droit de protection internationale.
Cette opération a été un succès.
Il fallait se rendre sur place pour en évaluer la portée. Cela a été fait.
Michel BENICHOU