Décidemment, il est certains débats qui ont la vie dure.
Ainsi, le Conseil de l’Ordre de PARIS, unilatéralement, vient de relancer le débat sur l’avocat salarié en entreprise.
Personne n’avait rien demandé au Conseil de l’Ordre de PARIS.
Je n’ai pas vu passer de pétition des avocats parisiens sollicitant la mise en place d’un contrat de l’avocat salarié en entreprise.
Je n’ai pas aperçu, en Province, de demande spécifique concernant cet avocat salarié en entreprise.
Le Gouvernement n’en parle plus.
Quant au Conseil National des Barreaux, à deux reprises, sur deux mandatures différentes, les votes ont été semblables pour un rejet de cette forme d’exercice.
Il faut ajouter que le Conseil d’Etat – lorsque la décision du Conseil National des Barreaux concernant la domiciliation d’un avocat en entreprise lui a été soumise – a statué de façon claire en annulant cette délibération mais également en rappelant que l’avocat doit être indépendant et que le statut de salarié d’une entreprise est incompatible avec cette indépendance.
Il n’a fait, sur ce point, que suivre la jurisprudence européenne.
Celle-ci exige une indépendance de l’avocat et à défaut ne reconnait pas cet « avocat en entreprise » comme un véritable avocat.
Le Conseil de l’Ordre de PARIS a cité les arrêts AZKO NOBEL du 14 septembre 2010.
Il devrait se préoccuper des autres arrêts, nombreux, qui ont été rendus considérant que les requêtes déposées par un avocat salarié d’une entreprise auprès du Tribunal de Première Instance de l’Union Européenne ou auprès de la Cour de Justice de l’Union Européenne étaient irrecevables.
Cette irrecevabilité est causée par une seule raison : cet avocat n’est pas indépendant. Il n’est donc pas avocat.
Le Conseil de l’Ordre de PARIS a donc imaginé, par la création d’un modèle de contrat, qu’il allait rendre cet avocat indépendant.
On le soumet aux obligations de formation continue, d’aide juridictionnelle, de commissions d’office et les autres obligations ordinales.
Ce salarié devra donc avoir une double comptabilité : l’une comprenant son salaire et l’autre les honoraires perçus lors des commissions d’office.
On voit effectivement assez bien les Directeurs Juridiques de grands groupes venir lors des comparutions immédiates assurant la défense de petits délinquants.
L’employeur devra naturellement donner à cet avocat salarié les moyens de satisfaire aux missions d’aide juridictionnelle et de commissions d’office et aux obligations déontologiques imposées.
Il devra avoir un bureau séparé, un disque dur local dédié.
Naturellement, le RGPD lui sera applicable. Il devra donc avoir un fichier distinct de celui de l’entreprise.
Concernant le secret professionnel et la confidentialité, le Conseil de l’Ordre de PARIS passe outre la jurisprudence européenne et les attribue généreusement aux futurs salariés.
Tout cela n’est pas sérieux.
Les avocats de Province, par l’intermédiaire de la Conférence des Bâtonniers, se sont prononcés à plus de 90% de cette forme d’exercice.
La dernière tentative a été celle du Conseil National des Barreaux qui a tenté de créer une domiciliation de l’avocat en entreprise. On connait les résultats.
La délibération a été annulée par le Conseil d’Etat entrainant une grave récession des pouvoirs du Conseil National des Barreaux.
Il est donc de mauvais débats.
Je suis persuadé que ni les avocats, ni les employeurs ne voudront de ce « modèle de contrat », d’ailleurs illégal.
Michel BENICHOU