J’avais déjà évoqué, en ce blog, l’inefficacité des conventions passées entre un barreau et une juridiction. En premier lieu, elles n’ont aucun effet sur la législation. En second lieu, sur le strictement plan politique, elles sont le plus souvent utilisées contre les avocats.
Nous en avons une nouvelle illustration avec un arrêt rendu par la Cour de Cassation, 1ère chambre civile, le 1er mars 2018 (n° 16-25462), cassant une décision de la Cour d'Appel de RENNES du 6 septembre 2016.
Le Barreau de LORIENT avait signé, avec le Tribunal de Grande Instance de LORIENT, une convention sur la communication électronique. Cette convention n’incluait pas, dans son périmètre, les saisies-immobilières.
Un avocat du Barreau de Lorient poursuivait une saisie immobilière pour le compte d’une banque. Une audience de vente forcée était fixée. Toutefois, le débiteur avait interjeté appel du jugement du Juge de l’Exécution ordonnant la vente forcée du bien immobilier et fixant la date de la vente. Dès lors, l’avocat de la banque avait sollicité le report de la date d’audience de la vente forcée par communication électronique et utilisation du RPVA.
Le Tribunal de Grande Instance et la Cour d'Appel ont déclaré caduc le commandement valant saisie-immobilière en retenant que l’avocat de la banque avait adressé sa demande de report de l’audience de vente forcée et ses pièces par le RPVA alors que la convention précitée ne le prévoyait pas.
Dès lors, le message reçu par le greffe n’avait pas été transmis au Juge de l’Exécution. Celui-ci en a déduit que la banque n’avait pas déposé de conclusions de report. La Cour d'Appel, ajoutant à cela, avait considéré que l’écrit au greffe par le RPVA ne pouvait valoir conclusions puisque cela n’avait été pas signifié au défendeur qui n’aurait eu « aucun avocat régulièrement constitué ».
Sur le premier point, la Cour de Cassation est formelle. Ce sont les articles R311-6 du Code des procédures civiles d’exécution, 748-6 du Code de procédures civile et l’article 1 de l’arrêté du 7 avril 2009 relatif à la communication par voie électronique devant les T.G.I. qui comptent et non les conventions conclues localement. Celles-ci n’ont strictement aucune valeur (la Cour de Cassation ne le dit pas mais on peut conclure). Or, l’arrêté du 7 avril 2009 n’exclut pas de son champ d’application les procédures de saisies-immobilières.
Concernant la prétendue absence d’avocat pour les défendeurs, l’avocat de la banque avait conclu clairement que c’était par erreur qu’il était mentionné dans le jugement du Juge de l’Exécution que le débiteur n’avait pas constitué d’avocat en première instance. Mais ces conclusions ont-elles été lues ? Parfois, on se pose vraiment la question au vu des jugements ou arrêts qui sont rendus. On interdit de plaider. Nous déposons des conclusions et nous pensons que ces conclusions seront lues. Combien de déceptions avons-nous enregistrées ?!
Michel BENICHOU