La CEDH vient de rendre une décision (4 octobre 2018 n°30958/13) dans une affaire LEOTSAKOS / GRECE.
Le requérant était un avocat grec inscrit au Barreau d’Athènes depuis 1976. En 2010 le Procureur de la République ordonne la perquisition de son local professionnel (enquête portant sur une organisation criminelle). Les infractions reprochées concernaient le blanchiment d’argent, la corruption de magistrats … La perquisition va durer 12 jours. Elle est menée par un officier de police accompagné du Procureur Adjoint. Ils choisissent comme témoin une voisine. Elle ne connait pas la procédure, n’a aucune connaissance juridique. On confisque des centaines de documents et un ordinateur. Puis, l’avocat et d’autres personnes sont poursuivies en mai 2012.
L’avocat demande que la perquisition soit déclarée illégale et que les documents et objets saisis lui soient restitués.
Les juridictions nationales refusent sa requête. Il se pourvoit devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme. La CEDH applique sa jurisprudence.
Elle considère que la perquisition au domicile professionnel s’analyse en une ingérence d’un droit de l’avocat au respect de son domicile et de sa correspondance (article 8 de la Convention). La CEDH a constaté que l’avocat n’était présent à aucun moment de la perquisition alors même que celle-ci a duré 12 jours. On ne sait pas si la police a informé l’avocat de cette perquisition alors même que le Code de Procédure Pénale ferait obligation à celui qui mène la perquisition d’inviter l’occupant des lieux à être présent. La présence d’une voisine n’est nullement considérée comme une garantie suffisante car elle n’avait pas de connaissance juridique et était incapable de repérer les documents qui concernaient les affaires de clients du requérant, couverts par le secret professionnel. Par ailleurs, la Cour note des coïncidences étonnantes. C’est un seul Procureur qui a mené l’enquête préliminaire, émis le mandat de perquisition, a été chargé du dossier concernant la légalité des mesures devant la Chambre d’Accusation, a fait une proposition à la Chambre d’Accusation (entérinée de manière laconique).
La Cour estime que cela peut apparaitre « problématique » au point de vue de l’équité de la procédure engagée et ceci d’autant plus que « le Procureur a fait une proposition à la Chambre d’Accusation et que celle-ci a décidé sans entendre l’intéressé … ».
La Cour estime qu’il y a eu violation de l’article 8 de la Convention. C’est l’application de la jurisprudence classique de la Cour Européenne des Droits de l’Homme. Celle-ci est protectrice du domicile professionnel de l’avocat.
Michel BENICHOU