Le rapport du Défenseur des droits est toujours très attendu. Il a été publié le 11 avril 2018.
Il indique avoir eu un nombre plus important de saisines du fait de la dématérialisation des services publics. Il décrit une relation dégradée entre l’administration et ses usagers puisque l’accueil dans les services publics a reculé à l’ère de cette dématérialisation. Les personnes vulnérables (personnes âgées, personnes en situation de précarité, en situation de handicap ou étrangères) ont d’énormes difficultés dans leurs rapports avec l’administration.
On veut une dématérialisation générale et accélérée en dépit des pannes informatiques, des délais excessifs que cela entraine, des difficultés à joindre les services de l’Etat ou à rectifier les erreurs commises. Celui qui a tenté d’obtenir une carte grise pour un « vieux véhicule » sait de quoi je parle. C’est un parcours du combattant qui ressemble grandement aux descriptions d’UBU-ROI.
Mais ce n’est qu’un début. L’objectif de la réforme BELLOUBET-MACRON est une dématérialisation des petits litiges sans recours au juge ou à l’avocat. On veut favoriser les plateformes payantes au nom d’un « libéralisme » judiciaire.
L’économiste Philippe ASKENAZY explique que le recours à la médiation privée, par l’intermédiaire des plateformes numériques, va se généraliser. Le juge, les avocats deviendront alors superflus. Les legaltechs vont assurer directement la « justice » et « trouver des solutions ». Naturellement, cela sera payant. Les enjeux portent donc sur des centaines de millions d’euros. Qui va être pénalisé ? Naturellement, ce seront les populations les plus fragiles, c’est-à-dire celles qui ont le plus besoin de justice. Ces plateformes vont bénéficier de l’accès libre aux décisions des juridictions françaises. C’est la loi « République Numérique » de 2016 dont il faut se souvenir qu’elle a été déposée – en décembre 2015 – par le Ministre de l’Economie de l’époque, Monsieur Emmanuel MACRON. Pour les legaltechs ce sera un accès total et gratuit à toutes les décisions publiées et revente sous toutes formes de ces acquis gratuits.
Le marché du droit est largement ouvert aux legaltechs. Le droit n’est plus qu’une marchandise.
Michel BENICHOU