Le Conseil d'Etat vient de rendre un arrêt intéressant concernant la dénomination d’un cabinet d’avocats. Etaient attaquées les dispositions de l’article 10.6.3 du règlement intérieur national de la profession d’avocat : « les dénominations s’entendent du nom commercial, de l’enseigne, de la marque, de la dénomination ou raison sociale ou de tout autre terme par lequel un avocat ou une structure d’exercice sont identifiées ou reconnues. Cette dénomination, quelle qu’en soit la forme, est un mode de communication. L’utilisation de dénominations évoquant de façon générique le titre d’avocat ou un titre pouvant prêter à confusion, un domaine du droit, une spécialisation ou une activité relevant de celle de l’avocat, est interdite. ».
Une société dénommée « ACACCIA – Avocats Associés pour le Conseil et le Contentieux Immobilier et Administratif » demandait au Conseil d'Etat d’annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 14 janvier du C.N.B. portant réforme du RIN et instaurant cet article 10.6.3, et d’annuler pour excès de pouvoir la décision du 4 mai 2016 par laquelle le Conseil National des Barreaux a rejeté la demande de ladite société tendant à la modification de la décision du 14 janvier.
Le Conseil d'Etat commence en rappelant les dispositions de la Directive 2006/123/C.E. du 12 décembre 2006 dite Directive Services. La dénomination par laquelle un avocat ou une structure d’exercice est identifiée ou reconnue ne constitue pas une « communication commerciale » au sens de cette directive. La décision du C.N.B. est donc conforme à la législation européenne.
En second lieu, la dénomination doit être choisie en considérant le respect des principes essentiels qui régissent la profession d’avocat et les exigences déontologiques. Il s’agit d’empêcher que, par sa dénomination, un cabinet ou une société d’exercice ne cherche pas à s’approprier, directement ou indirectement, un domaine du droit ou un domaine d’activité que se partage la profession et n’entraine une certaine confusion dans l’esprit du public.
Dès lors, les éléments édictés par le C.N.B. au titre de sa mission d’harmonisation des usages et des règles de la profession, ne méconnaissent ni la liberté d’exercice de la profession d’avocat, ni les règles essentielles qui la régissent.
Enfin, il était rapproché au .C.N.B. de n’avoir pas prévu d’opérer de période transitoire. Or, le Conseil d'Etat indique que le C.N.B. n’a pas méconnu le principe de sécurité juridique en n’instaurant pas cette période transitoire. Aucune sanction ne pourra être prise contre une société sans qu’il soit tenu compte du temps nécessaire pour que celle-ci puisse procéder au changement de sa dénomination.
A ma connaissance, d’ailleurs, aucune sanction n’a jamais été prise.
Michel BENICHOU