La publicité envahit tout. Les experts-comptables avaient libéralisé leur pratique publicitaire à la suite de l’arrêt FIDUCIAL rendu par la CJUE. Les avocats en ont fait de même. Seule la sollicitation personnelle est aujourd’hui interdite. D’autres professions continuent d’interdire toute publicité (notaires, …). La question s’est posée concernant les médecins.
Un dentiste belge était poursuivi pénalement pour avoir fait de la publicité au moyen d’un panneau installé à l’entrée de son cabinet, un site internet et des annonces insérées dans des journaux locaux. Devant la juridiction belge, il a invoqué le droit de l’Union. La Cour de Justice a rendu un arrêt le 4 mai 2017 (C-339/15). Elle considère que l’interdiction de toute publicité n’est pas une mesure interdite par la Directive 2005/29/C.E. du 11 mai 2005 relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur.
En revanche, elle juge que cette interdiction, en ce qu’elle vise le site internet de ce médecin, viole la Directive 2000/31/C.E. du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société d’information et notamment du commerce électronique dans le marché intérieur. La Cour estime que la publicité faite par un dentiste au moyen d’un site internet relève du champ d’application de cette directive et de l’article 8 qui a pour objet de permettre aux membres d’une profession règlementée d’utiliser des services de la société de l’information pour promouvoir ses activités. Les règles déontologiques d’une profession ne justifient pas une interdiction générale et absolue telle que celle applicable en Belgique.
La Cour admet néanmoins la possibilité d’encadrer le contenu et la forme de cette publicité.
Par ailleurs, concernant les autres formes de publicité, la Cour, rappelant qu’une partie de la clientèle du dentiste concerné venait d’autres Etats membres, a estimé que cela était suffisant pour justifier l’application de cette liberté et donc considéré qu’une interdiction générale, dès lors qu’elle restreint la possibilité des professionnels concernés de se faire connaitre auprès de leur clientèle potentielle et de promouvoir leurs services, constitue une restriction à cette liberté.
La Cour a écarté l’objectif de protection de la santé. Elle a admis l’idée de protection de la dignité de la profession de dentiste.
Ainsi, ce que la Cour de Justice refuse c’est une interdiction générale et absolue de la publicité. C’est exactement la même solution que pour les experts-comptables (affaire FIDUCIAL déjà mentionnée).
La Cour a donc estimé que les objectifs poursuivis (éthique professionnelle, …) pourraient être atteints au moyen de mesures moins restrictives et en encadrant notamment les formes et les modalités des outils de communication.
La règlementation belge des dentistes en matière de publicité ne réussit pas le test de proportionnalité.
On peut penser que cet arrêt aura une répercussion dans le cadre des services médicaux en France.
L’interdiction générale existe également et ne parait donc pas conforme aux dispositions de l’Union.
Michel BENICHOU