Le droit de l’Union prévoit, comme principe fondamental, le respect des droits de la défense. Plusieurs arrêts de la Cour de Justice de l’Union Européenne sont allés en ce sens notamment lorsqu’il est question de privation de liberté ou de mauvais traitement.
La Cour allait-elle respecter les droits des contribuables de la même façon ? En l’espèce, des particuliers roumains avaient engagé une importante opération de promotion immobilière. Ils font l’objet d’une vérification fiscale et sont requalifiés en professionnels. Dès lors, ils doivent payer la TVA. Ils contestent devant le juge roumain et estiment que l’ensemble du dossier, toutes les pièces retenues par l’administration fiscale, devaient leur être communiqués immédiatement et spontanément. Le juge roumain décide de saisir la Cour de Justice de l’Union Européenne pour aborder cette question des droits de la défense.
Ils étaient confortés par plusieurs arrêts déjà rendus par la Cour qui estimaient que le respect des droits de la défense nécessitait que toute personne, susceptible d’être sanctionnée, devait être en mesure de faire connaitre utilement ses éléments de réponse après avoir examiné les éléments retenus par l’Administration pour décider de la sanction. Le domaine de la TVA n’échappait pas à cette jurisprudence constante (C.J.U.E. 26 février 2013 aff. C-617/10). Mais en l’espèce, la Cour n’impose pas à l’administration de fournir spontanément un accès intégral au dossier dont elle dispose, ni de communiquer d’office les éléments et informations servant de fondement à la décision défavorable à l’administré. Pourtant, la Cour avait jugé le droit pour l’administré de faire « utilement valoir son point de vue » (arrêt du 13 février 1979, HOFFMANN LA ROCHE c/ Commission, C-85/76). De surcroit, la Cour a toujours insisté sur le caractère effectif des droits de la défense. Or, ce caractère effectif doit impliquer une possibilité réelle d’accès au dossier. Finalement, on doit retenir de cet arrêt que, si le droit d’accès existe, il n’a pas à être spontanément ouvert par l’administration. Il faut donc que le justiciable demande cet accès et les documents et informations servant de fondement à la décision de l’administration. L’administration ne doit pas ouvrir ses dossiers avant demande.
Paradoxalement, je considère que cela renforce les droits de la défense. Les avocats doivent prendre conscience de cette possibilité d’action. L’arrêt de la Cour de Justice nous apporte un éclairage important sur la notion de « loyauté » dans les rapports avec l’administration.
Michel BENICHOU