Une avocate s’est constituée partie civile auprès du juge d’instruction pour violation du secret professionnel et atteinte au principe de la libre défense et à la confidentialité des correspondances. En effet, de nombreuses conversations téléphoniques échangées avec son client avaient fait l’objet d’écoutes et le contenu était versé au dossier de l’enquête préliminaire avec des mentions diverses évoquant les conversations avec un « cabinet d’avocats », les jours d’appel, les heures d’appel et le résumé de la conversation (assez succinct).
L’avocate déposait une requête en nullité et a ordonné le retrait du dossier des pièces faisant état des conversations téléphoniques.
Le Juge d’Instruction a rendu une ordonnance de non-lieu dont il était fait appel. La chambre de l’instruction a considéré qu’il importait de vérifier si l’officier de police judiciaire, à l’origine des mentions, avait intentionnellement porté atteinte au secret des correspondances. Naturellement, les juges estiment que rien n’est susceptible d’établir (11 ans après ces retranscriptions) que le fonctionnaire ait agi de mauvaise foi.
La Cour de Cassation est saisie. Elle considère que la chambre d’instruction a eu raison. Il n’existe pas de charge contre l’officier de police judiciaire ayant procédé aux mentions litigieuses ou toutes personnes dépositaires de l’autorité publique d’avoir, par les retranscriptions litigieuses, eu l’intention de porter atteinte au contenu des correspondances protégées entre l’avocate et son client (Cassation criminelle 27 février 2018).
En bref, on reproche à l’avocate la durée de la procédure (11 années) alors même qu’elle n’est absolument pas responsable. C’est la justice qui est lente et cette lenteur se retourne contre les plaignants. En second lieu, il faudra désormais démontrer la mauvaise foi, l’élément intentionnel de l’officier de police judiciaire qui aura écouté les conversations entre l’avocat et son client et les aura transcrites. Autant dire que la preuve est quasiment impossible. C’est un blanc-seing qui est laissé aux écouteurs des conversations entre avocats et clients.
Pour défendre le secret professionnel en France, il n’existe qu’un seul recours : les juridictions européennes, qu’il s’agisse de la Cour Européenne des Droits de l’Homme à Strasbourg ou la Cour de Justice de l’Union Européenne à Luxembourg.
Michel BENICHOU