La Conférence des Présidents des Tribunaux de Grande Instance vient de publier un « compte-rendu » d’une réunion qui s’est tenue en mars 2017. La publication est opportune puisqu’elle intervient en pleine campagne électorale. Les objectifs sont clairs :
réduction du nombre de Cours d'Appel pour parvenir à une cohérence des juridictions du second degré avec la nouvelle organisation administrative (région ?) et avec l’architecture budgétaire des Cours d'Appel,
instauration d’un tribunal unique, entité judiciaire à entrée unique, organisé autour de deux grands circuits de procédure : la procédure écrite avec représentation obligatoire par avocat et la procédure orale avec ou sans représentation. Ce tribunal judiciaire regroupera donc toutes les juridictions de l’ordre judiciaire dans une même entité. Ce tribunal sera le pendant du Tribunal Administratif. Toutefois, chaque juridiction conservera son fonctionnement et sa spécificité propre. On pense surtout aux Tribunaux de Commerce et aux Conseils des Prud'hommes. On créerait alors un bureau d’ordre civil centralisé comprenant un guichet unique qui permettra une « orientation préalable sinon impérative du moins suggéré vers la médiation ou un mode alternatif de règlement des litiges ».
On peut donc constater que nous ne sommes pas loin de la médiation obligatoire qui est une chose absolument abominable, contraire à l’esprit de la médiation. De surcroit, ces médiations obligatoires aboutissent rarement mais font trainer le contentieux.
Les présidents de T.G.I. plaident pour un acte de saisine unique, normalisé, modélisé garantissant la « qualité de la justice », l’ « information des justiciables » ainsi que « les droits de la défense » et « supposant des délais de procédure civile unifiés par type de procédure ».
Il faudra s’interroger sur cet acte de saisine « normalisé ». S’agira-t-il d’avoir un carcan quant à l’assignation qui devra, comme dans certains protocoles signés avec des présidents de Tribunaux de Grande Instance ou des Cours d'Appel, suivre un modèle obligatoire. En pareil cas, les droits de la défense ne seraient en aucun cas respectés.
Les magistrats insistent sur une utilisation de l’outil informatique plus facile et une meilleure communication de l’information.
Enfin, concernant les procédures sans représentation obligatoire, ils imaginent une intervention par accompagnement du justiciable assuré par les conseils départementaux de l’accès au droit et les maisons de la justice et du droit. J’espère qu’ils ont également prévu d’améliorer leur fonctionnement.
En bref, ils veulent une rénovation de l’administration et de la gouvernance des juridictions. Il semblerait qu’avec ce tribunal, nous abandonnerions à la cogestion entre magistrats du siège et les parquetiers. Le président de ce tribunal unique serait le patron de la juridiction et ne partagerait pas la gouvernance avec le Procureur de la République.
Enfin, les présidents arguent de la promotion de nouvelles cultures professionnelles, d’échanges transversaux, de présentation des actions et politiques judiciaires ou partenaires extérieurs, de dialogues de gestion rénovés, …
Il faudrait évoquer les relations (généralement détériorées) avec les avocats.
La Conférence regroupe 130 présidents de T.G.I. sur 164 T.G.I.. Elle a été signée par les représentants des conférences régionales et le conseil d’administration de cette conférence nationale des présidents de Tribunaux de Grande Instance soit 18 présidents de T.G.I..
Michel BENICHOU