L’avocat, s’il veut obtenir un honoraire de résultat, doit le prévoir dans la convention d’honoraires obligatoire. Toutefois, se posait la question de l’honoraire de résultat lorsque l’avocat, avant la fin de l’instance, avait été dessaisi.
La Cour de Cassation (2ème chambre civile 26 octobre 2017, n° 16-19.083) vient de trancher dans un nouveau cas d’espèce qui complète un arrêt qui a été rendu précédemment et qui avait été commenté en ce blog (juillet 2017).
Dans un contentieux fiscal, l’avocat avait prévu un honoraire de résultat dans la convention d’honoraires. Cet honoraire de résultat était déterminé en fonction des montants dégrevés. Une clause avait prévu le cas du dessaisissement : « dans l’hypothèse où la cliente souhaiterait dessaisir l’avocat de son dossier et transférer son dossier à un autre avocat, elle s’engage à régler sans délai l’honoraire forfaitaire ainsi que les frais, débours et dépens dus à l’avocat pour les diligences effectuées antérieurement au dessaisissement et l’honoraire complémentaire restera dû ».
La cliente dessaisit l’avocat. Celui-ci saisit son Bâtonnier de la taxation de ses honoraires.
Après le dessaisissement, la cliente avait conclu une transaction avec le fisc. L’avocat demandait donc un honoraire complémentaire calculé sur la base de cette transaction. Après taxation du Bâtonnier, c’est le Premier Président de la Cour d'Appel de PARIS qui est saisi. Celui-ci fixe les honoraires dus à l’avocat en considérant les critères traditionnels (heures de travail facturées, notoriété du cabinet d’avocat, complexité du dossier, développement de moyens de droit novateurs) et considère que ce sont ces éléments qui ont permis à la cliente de négocier avec l’administration fiscale.
Mais, il écarte l’application de l’honoraire complémentaire en considérant qu’il était impossible de prévoir que l’honoraire de résultat serait dû si l’avocat était déchargé du dossier avant l’issue du litige.
La 2ème chambre civile de la Cour de Cassation, sur le fondement de l’article 1134 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, casse la décision.
Elle reprend son argumentation de juillet 2017 en considérant que la clause d’une convention d’honoraires prévoyant le paiement d’un honoraire de résultat en totalité, malgré le dessaisissement, n’était pas en elle-même licite.
Il peut donc y avoir un honoraire de résultat même en cas de dessaisissement. Néanmoins, le juge conserve son pouvoir de réduction.
Ce sont des décisions importantes pour la profession d’avocat surtout que celle-ci réfléchit actuellement à la levée de l’interdiction du pacte de quota litis. Or, le principal obstacle à cette levée concerne la fiabilité de nos conventions d’honoraires par rapport à la procédure de taxation. Qui garantira à l’avocat, qui a travaillé pendant des années gratuitement, l’obtention d’un honoraire de résultat conséquent (tenant compte justement du fait qu’il a travaillé gratuitement et a supporté les frais) si le juge peut, à tout moment, supprimer l’honoraire de résultat ou l’amoindrir dans des proportions considérables en vertu de son pouvoir souverain et sans respect pour la convention signée ?
Michel BENICHOU