L’INDEPENDANCE DE L’AVOCAT ET UNION EUROPEENNE (LES TEXTES) (3)

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Les textes publiés par la Communauté Economique Européenne puis l’Union Européenne font référence à la profession d’avocat et à son exercice indépendant.

Les textes publiés par la Communauté Economique Européenne puis l’Union Européenne font référence à l

L’INDEPENDANCE DE L’AVOCAT ET UNION EUROPEENNE (LES TEXTES) (3)

Les textes publiés par la Communauté Economique Européenne puis l’Union Européenne font référence à la profession d’avocat et à son exercice indépendant. Ainsi, le Parlement européen a adopté une résolution sur les professions juridiques (23 mars 2006). Il rappelle que la Cour de Justice des Communautés Européennes a reconnu certaines valeurs fondamentales de la profession juridique (indépendance, absence de conflit d’intérêt, secret professionnel, confidentialité) et a indiqué que les règlementations visant à protéger ces valeurs fondamentales sont nécessaires pour la bonne pratique de la profession juridique malgré les restrictions dans la concurrence intrinsèque qui pourraient en résulter.

 

De la même lignée, la Directive (Directive 2006/123/C.E. du Parlement Européen et du Conseil du 12 Décembre 2016 relative aux services dans le marché intérieur (JOUE 27 décembre 2006, article 24.2) du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur a consacré la nécessité d’assurer « l’indépendance et l’intégrité des professions règlementées ».

 

Des textes plus précis émanent de la profession d’avocat et notamment du Conseil des Barreaux Européens (C.C.B.E.). Celui-ci a publié le 28 octobre 1988, le Code de déontologie des avocats européens. Il a été modifié à trois reprises et la dernière fois le 19 mai 2006. Tous les avocats membres des barreaux adhérents au C.C.B.E. sont tenus au respect du Code dans leurs activités transfrontalières. Le C.C.B.E. représente actuellement 45 barreaux nationaux dont ceux des 27 Etats membres de l’UE, des 3 Etats membres de l’Espace Economique Européen et de la Suisse (membres effectifs), mais également ceux des pays associés (Turquie, Serbie, …) ou observateurs (autres pays du Conseil de l’Europe). Certains barreaux nationaux ont intégré le Code de déontologie dans leur règlementation interne (Barreau français). Le premier principe général évoqué en ce code, avant la confiance, l’intégrité et le secret professionnel, est l’indépendance. L’article 2.1 prévoit que « la multiplicité des devoirs incombant à l’avocat lui impose une indépendance absolue, exempte de toute pression, notamment de celle résultant de ses propres intérêts ou d’influence extérieure. Cette indépendance est aussi nécessaire pour la confiance en la Justice que l’impartialité du juge. L’avocat doit donc éviter toute atteinte à son indépendance et veiller à ne pas négliger le respect de la déontologie pour plaire à son client, au juge ou à des tiers. Cette indépendance est nécessaire pour l’activité juridique comme judiciaire. Le conseil donné au client par l’avocat n’a aucun valeur, s’il n’a été donné que par complaisance, par intérêt personnel ou sous l’effet d’une pression extérieure ». On le constate, l’indépendance est surtout rappelée au vu des intérêts de l’avocat, de ceux de son client et du juge. On n’évoque ni la pression des Etats, ni celle du Marché. Ce texte, qui reste d’actualité, ne traite pas des garanties de l’indépendance des avocats face à l’évolution technologique, à la carence des Etats face à l’utilisation des données personnelles ou au développement de l’intelligence artificielle. Il n’aborde pas les atteintes continues du pouvoir politique introduisant, en les textes européens ou nationaux, les obligations pour l’avocat de dénoncer leurs clients au regard de la lutte contre le blanchiment d’argent sale ou de l’optimisation fiscale, pourtant fondée sur des règles légales édictées par les Etats. Ce texte ignore aussi les multiples violations de l’indépendance de l’avocat liées aux perquisitions dans les cabinets d’avocats qui se multiplient en France avec la bénédiction du pouvoir comme de la jurisprudence, des écoutes clandestines des communications entre l’avocat et son client. Le texte du Code a été complété par la « Charte des principes essentiels de l’avocat européen », adoptée par le C.C.B.E. en 2006. Elle contient une liste de dix principes identifiés comme communs à la profession en Europe et pouvant être appliqués par les barreaux dans l’exercice transfrontalier ou national. On retrouve en premier « l’indépendance et la liberté d’assurer la défense de son client ». Ce texte est axé sur les droits de la défense, sur le judiciaire alors même que l’indépendance doit s’exercer dans toutes les activités de l’avocat et par opposition à toutes forces qui font pression sur lui.

 

Malheureusement, chez les avocats comme dans les sociétés, le nationalisme a refait surface depuis quelques années. Il ne s’agit pas de défendre la patrie mais de faire primer, en toutes circonstances, sa nation sur toutes les autres. Les barreaux nationaux ont donc considéré que le Code de déontologie des avocats européens n’était plus d’actualité et venait en contradiction avec leurs règles internes. Certains ont décidé de ne plus l’appliquer. Le C.C.B.E. a donc entrepris un nouveau travail en rédigeant des « articles modèle ». Certains thèmes principaux ont été définis et l’assemblée vote pour adopter un article qui ne s’impose aux barreaux ni dans leur exercice transfrontalier, ni dans leur exercice interne. Toutefois, ils peuvent l’adopter aux fins, à terme, d’harmoniser les règles de déontologie.

 

L’article modèle sur l’indépendance a été adopté le 19 mai 2017 après de très longues années de travail confrontant les cultures des barreaux anglo-saxons avec celles des autres barreaux.

 

Il est ainsi rédigé : « Dans l’exercice de sa profession, l’avocat demeure indépendant, libre de toute influence, y compris celle qui proviendrait de ses intérêts personnels ou de pressions externes. L’avocat doit, par conséquent, éviter toute atteinte à son indépendance et veiller à ne pas négliger le respect de la déontologie lors de ses échanges avec ses clients, les tribunaux, des tiers et les autorités publiques. Dans le cas contraire, il ne pourra accepter le mandat ou devra mettre un terme au mandat qui lui a été confié ». Il n’y a toujours pas de définition. On vise clairement les autorités publiques. Ce texte est accompagné d’explications soit aux fins de rappeler les textes antérieurs, déjà cités, soit pour expliquer ce que signifie être indépendant. L’indépendance implique que les avocats :

 

sont en mesure de mener à bien l’ensemble de leurs activités professionnelles sans intimidation, entrave ou harcèlement ou interférence indues, sont en mesure de voyager et de consulter leurs clients librement aussi bien dans leur propre pays qu’à l’étranger, ne seront menacés d’aucune poursuite ni sanction administrative, économique ou d’un autre ordre, pour toutes actions qu’ils entreprendraient conformément à leurs activités professionnelles et leur code de déontologie, sont libres de toute pression externe, feront face à toute influence issue de leurs intérêts personnels, veilleront à ne pas négliger le respect de la déontologie pour plaire à leurs clients, au tribunal, à des tiers ou aux autorités publiques.

 

Nous sommes toujours, non dans la définition, mais dans la portée et les garanties.

 

Michel BENICHOU

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A propos de l'auteur
Blog de Maître Michel BENICHOU

Avocat depuis 1978 :

 

- Ancien Président du conseil des Barreaux d'Europe

- Ancien Bâtonnier du Barreau de Grenoble

- Président fondateur de la Fédération Nationale des Centres de Médiation

- Ancien membre du conseil de l'Ordre des Avocats de Grenoble

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