On sait que les ministres de la Justice successifs se sont toujours opposés à l’indépendance du parquet. Dans ce blog, j’ai récemment fait état des réflexions de Madame BELLOUBET, Garde des Sceaux.
Le 28 novembre, ce sera au Conseil Constitutionnel de s’interroger. Il est en effet saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) par l’Union Syndicale des Magistrats (USM). Ce syndicat considère que le lien hiérarchique qui existe entre les magistrats du parquet et le Ministre de la Justice est contraire à la Constitution. L’affaire était venue devant le Conseil d'Etat qui a, jouant son rôle de filtre, a renvoyé cette question devant le Conseil Constitutionnel. L’objectif de l’USM est d’obtenir que les magistrats du parquet soient nommés dans les mêmes conditions que les magistrats du siège par le Conseil Supérieur de la Magistrature. Aujourd’hui, le C.S.M. ne donne qu’un avis et le Ministre décide.
Pour changer ce système, le Conseil Constitutionnel devra s’interroger sur la constitutionnalité de l’article 5 de l’ordonnance de 1958 organisant la magistrature qui prévoit que « les magistrats du parquet sont placés sous la direction et le contrôle de leurs chefs hiérarchiques et sous l’autorité du Garde des Sceaux, Ministre de la Justice. »
La Cour Européenne des Droits de l’Homme avait indiqué que les magistrats du parquet étaient des parties au procès.
Le Conseil Constitutionnel, en 2016 (22 juillet 2016), avait affirmé qu’il découlait « de l’indépendance de l’autorité judiciaire, à laquelle appartiennent les magistrats du parquet, un principe selon lequel le ministère public exerce librement, en recherchant la protection des intérêts de la société, l’action publique devant les juridictions pénales ».
Il avait donc posé le principe de l’indépendance des parquetiers dans l’exercice de leur mission devant les juridictions pénales.
Quelle va être la position du Conseil Constitutionnel ? La réponse est d’autant plus importante que le Procureur Européen se met en place, procureur indépendant du Ministre de la Justice (sujet déjà traité dans ce blog).
La décision pourrait être rendue le 8 décembre 2017.
Nous sommes, peut-être, à la veille d’un bouleversement essentiel dans la magistrature et la Justice.
Michel BENICHOU