Pierre MOSCOVICI, commissaire européen, était l’invité de la rentrée du Barreau de PARIS le 1er décembre 2017. Le Bâtonnier de l’Ordre de PARIS en 2017, Frédéric SICARD, a rappelé son attachement et celui de tous les avocats, au secret professionnel et à l’accès à un avocat. Pierre MOSCOVICI a indiqué devoir défendre la politique de lutte contre l’évasion fiscale. Cette politique contraindra, dès le 1er janvier 2019, tous les intermédiaires en matière fiscale, et donc les avocats, à déclarer les processus de planification ou optimisation fiscale mis en place auprès de leurs clients.
Le secret professionnel est écarté. Le Conseil des Barreaux Européens qui s’était battu, avec vigueur, pour que le secret professionnel des avocats soit préservé, n’a donc pas été entendu. Le combat contre l’optimisation fiscale se veut être une priorité de l’Union Européenne. Il y a néanmoins un paradoxe. Chaque jour, une nouvelle affaire est dévoilée concernant une optimisation fiscale d’un grand groupe américain en coordination avec un gouvernement européen. Hier, il s’agissait des accords passés par le Luxembourg avec les multinationales américaines. Puis, on a révélé l’accord passé entre le gouvernement irlandais et APPLE qui avait fait économiser à cette société 12 milliards d’euros. Cela devenait burlesque lorsque le gouvernement irlandais, sommé par la Commission Européenne, de récupérer cette somme a refusé et a été entrainé, avec APPLE, devant la Cour de Justice de l’Union Européenne. Enfin, récemment, les accords entre IKEA et le gouvernement néerlandais ont été dévoilés permettant à cette société de ne régler quasiment aucun impôt dans toute l’Union Européenne par un transfert des bénéfices (non imposables) aux Pays-Bas.
Il existe donc une véritable hypocrisie de la Commission Européenne. D’un côté, on demande la dénonciation par les avocats et autres intermédiaires fiscaux de leurs clients qui planifient, selon les voies légales, une optimisation fiscale et, d’un autre côté, on laisse les gouvernements européens négocier avec les multinationales pour les attirer dans leur pays en leur consentant des quasi-exonérations d’impôts. Comble de l’hypocrisie, on dresse une liste des paradis fiscaux sans mentionner aucun pays européen.
Décidemment, l’Europe des nations est incompatible avec la notion de cohérence.
Michel BENICHOU