Les agents immobiliers sont régis par une loi de 1971 dénommé Loi HOGUET. Celle-ci instaure un certain nombre d’obligations notamment en matière de régularité du mandat confié à l’agent. L’objectif de cette loi, à l’époque, avait été d’introduire une nouvelle rigueur dans les rapports entre agents immobiliers et clients.
Tout élément irrégulier dans le mandat ou toute mention manquante entrainait, inéluctablement, la jurisprudence à procéder à son annulation et, dès lors, à supprimer tout droit à honoraires pour l’agent immobilier entrainant ainsi souvent la restitution des honoraires perçus.
Mais, à l’occasion de la réforme du droit des obligations, entrée en vigueur en 2017, la Cour de Cassation a décidé de faire évoluer sa jurisprudence en deux temps. Dans un premier temps, profitant de la définition légale des nullités absolues et des nullités relatives, la Cour de Cassation estimait que l’irrégularité d’un mandat devait être sanctionnée par une nullité relative puisque la loi HOGUET avait pour objectif la sauvegarde d’un intérêt privé (Cour de Cassation, chambre mixte, 24 février 2017 n° 15-20.401.). Cela correspond à la nouvelle définition des nullités prévue dans l’article 1179 nouveau du Code civil.
Dans un second temps, la Cour de Cassation examine la conséquence de cette nullité relative. En l’espèce, un agent immobilier avait un client habituel qui lui avait confié la gestion locative de ses biens. Le mandat signé par le client était renouvelable par tacite reconduction. Le client décède en l’an 2000. Ses héritiers reçoivent un nouveau mandat. Ils ne le retournent pas signé à l’agent immobilier qui, par négligence, ne le réclame pas et continue à œuvrer par la gestion de leurs biens. 7 ans plus tard, les clients demandent l’annulation de ce mandat irrégulier et la restitution de l’intégralité des honoraires versés. Ils se fondent sur l’absence de signature.
Avant 2017, la solution eut été nette : irrégularité formelle, nullité du mandat, restitution des honoraires.
Mais, en septembre 2017, la Cour de Cassation veut tirer les conséquences de son précédent arrêt de février 2017 et va décider que, conformément à l’article 1182 du Code Civil, l’exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation. Les relations s’étaient poursuivies depuis plus de 7 années. L’agent immobilier avait bien accompli sa tâche et rendu compte à ses mandants de son activité de gestion locative. L’agent immobilier peut donc conserver sa rémunération.
Je pense que la mauvaise foi patente des demandeurs a influencé la Cour de Cassation. Mais, il n’y avait pas que cela. La sanction précédente était trop sévère et la Cour de Cassation en a tiré les conséquences.
On pourrait dès lors réfléchir, sur la base de cet arrêt, à la question de l’absence de la convention d’honoraires d’avocat. Celle-ci est obligatoire depuis la Loi MACRON. Parfois, l’avocat adresse un devis à son client, lui envoie la convention d’honoraires et, compte-tenu de la pression du client, est contraint d’engager la procédure pour ne pas léser les intérêts du client. Le client lui donne des instructions, lui fournit des pièces, parfois même commence à régler des honoraires. Puis, comme cela s’est vu récemment, il conteste les honoraires dus en considérant l’absence de convention d’honoraires signée. On sait qu’un premier Président de Cour d'Appel a considéré que, en l’absence de convention d’honoraires, la sanction devait être implacable : restitution de l’intégralité des honoraires perçus et absence de droit à un quelconque honoraire.
Si on adopte le même raisonnement que la Cour de Cassation en matière de mandat immobilier, on pourrait considérer que l’exécution volontaire, par le client, du contrat conclu avec l’avocat et ce, en connaissance de cause, couvrirait cette nullité relative (absence de signature de la convention d’honoraires et irrégularités formelles) et vaudrait confirmation.
Michel BENICHOU