Le 12 octobre 2017, les Ministres de la Justice de l’Union Européenne réunis au sein du Conseil Justice et Affaires Intérieures ont adopté le règlement créant le Parquet européen. Tous les membres de l’Union Européenne n’y participent pas. Naturellement, la Grande-Bretagne n’est pas partie prenante. Mais il y a également 7 autres Etats qui ne désigneront pas de procureur.
Néanmoins, c’est un succès pour l’Union Européenne puisque 20 Etats participent à ce collège des procureurs européens. Le Parquet Européen sera composé d’un procureur par Etat membre et de plusieurs procureurs européens délégués au sein de chaque Etat membre qui seront chargés de la conduite des enquêtes.
Il sera compétent pour poursuivre les auteurs de fraude aux intérêts financiers de l’Union Européenne (TVA, douane, …). On peut imaginer que ce n’est qu’un début. Dans les années qui viennent et, compte-tenu du climat actuel, on peut imaginer que ses pouvoirs soient étendus à la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée. Le Président de la République s’est d’ailleurs prononcé en faveur d’une telle extension de compétence lors de son discours sur l’Europe prononcé en septembre 2017.
C’est également un succès pour Madame VERA JUROVA, Commissaire européenne chargée de la Justice, de la Consommation et de l’Egalité des genres. En effet, elle en faisait un élément majeur de son mandat. Les avocats – par l’intermédiaire du Conseil des Barreaux Européens – avaient été sollicités pour faire part de leurs observations. En particulier, à l’origine, il était question d’un procureur européen unique avec une compétence élargie. Les Etats n’en ont pas voulu craignant de voir apparaitre un nouveau pouvoir judiciaire d’enquête.
Le Conseil des Barreaux Européens s’était prononcé pour un véritable équilibre entre le parquet européen et les avocats. En effet, compte-tenu des pouvoirs qui seront concentrés entre les mains de ce collège de procureurs, compte-tenu des échanges qui pourront avoir lieu entre eux, et les parquets nationaux compte-tenu de la centralisation des renseignements, la balance risque d’être déséquilibrée.
Le travail, sur ce point, doit se poursuivre.
Il faudra que les informations divulguées par le procureur européen figurent, en tant que telles, dans les dossiers et que ces informations puissent être contrôlées.
Les avocats sont exclus d’Eurojust. Ils n’ont pas accès aux informations en dépit de leur importance. Il ne conviendrait pas que le parquet européen qui doit, justement, compléter l’action d’Eurojust, mener des enquêtes et des poursuites, développe une opacité telle que les enquêtes et les poursuites en soient faussées.
Michel BENICHOU