On connait la politique du gouvernement turc. Lorsqu’un avocat intervient pour assurer la défense d’un prévenu kurde, l’avocat est considéré comme un terroriste. Une nouvelle fois, un avocat a été suspecté d’être impliqué dans une organisation criminelle. L’avocat a été arrêté dans son bureau qui a été perquisitionné.
Par la suite, la Cour d’Assise a procédé à son acquittement partiel et il a formulé une demande d’indemnisation auprès du Ministère de la Justice. Elle a été naturellement rejetée.
Au terme des saisines des juridictions nationales, il dépose une requête auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme sur le fondement de l’article 8 en considérant le caractère illégal et irrégulier des mesures de perquisition subies dans son bureau d’avocat.
En premier lieu, la C.E.D.H. rappelle que la notion de domicile englobe le bureau ou le cabinet d’un membre d’une profession libérale. Par ailleurs, la Cour relève que sa correspondance et les éléments contenus dans son ordinateur ont été saisis.
En second lieu, la Cour examine le mandat initial qui avait été délivré par le juge. Ce mandat ne visait ni l’avocat turc, ni ses locaux. Le Parquet a ajouté d’office le nom de cet avocat. Puis la police a rajouté d’office la perquisition et la saisie des documents. Par ailleurs, il existe des mesures de garantie profitant aux avocats dans la législation turque et notamment la nécessité d’une autorisation préalable du Ministère de la Justice.
Aucune trace de cette autorisation préalable ne figure dans le dossier.
Le bureau a par ailleurs été perquisitionné sans décision du tribunal mais aussi en l’absence d’un procureur et d’un représentant du barreau.
Enfin, le requérant avait interjeté un recours contre la décision du juge. Au terme de la procédure, on ignore si ce recours a été réellement examiné et si il a été vraiment rejeté après examen. En effet, aucune décision, sur ce recours, n’a été produite.
La Cour a conclu, naturellement, à la violation de l’article 8 de la Convention (C.E.D.H. 2ème section, 27 mars 2018, n° 5839/09, Özgün Öztunç contre Turquie).
Une nouvelle fois, il est démontré que la liberté des avocats dépend, grandement, des décisions de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.
Michel BENICHOU