Nous allons assister à un véritable renouveau du notariat qui deviendra, pour les avocats, des concurrents de plus en plus importants. En premier lieu, ils sont désormais assurés que l’Union Européenne ne pourra obtenir la disparition de leur monopôle. En effet, l’arrêt rendu en 2017 (C-342-15 LEOPOLDING GERTRAUD PERINGER) par la Cour de Justice de l’Union Européenne pose le principe que la liberté de prestation de services, telle que prévue par les directives européennes, ne s’oppose pas à une règlementation nationale protégeant le monopole d’une profession en considérant la nécessité de garantir la légalité et la sécurité juridique des actes conclus entre particuliers. Le combat mené depuis fort longtemps par la Commission européenne, entravée par certains gouvernements dont le gouvernement français, n’est plus voué à une réussite en considérant cet arrêt.
Mais, par ailleurs, la loi MACRON va permettre un véritable développement de la profession notariale. Depuis de nombreuses années, le numerus clausus bloquait le nombre de création d’études. De surcroit, les sommes importantes sollicitées lors des cessions d’études notariales en totalité ou en partie, bloquaient également le nombre de notaires associés. C’est M. MACRON, alors ministre de l’Economie, qui en 2013 libéralise cette profession. Deux ans après, on en constate les effets multiples.
Dans chaque département, de nouveaux notaires vont s’installer et créer des offices.
On va découvrir, chez les notaires, une notion qui était jusqu’à présent quasiment inconnue : la concurrence et notamment par les prix. En effet, si de nouveaux notaires interviennent. Ils vont devoir soit concurrencer leurs confrères déjà installés, soit essayer de récupérer une nouvelle clientèle. Les tarifs restant néanmoins encadrés, le « gâteau » ne pourra augmenter que si de nouveaux marchés sont conquis.
Pour permettre ces installations, notre République va encore faire appel à la chance. Comme pour les étudiants, ce seront des tirages au sort qui permettront à des notaires de s’installer. Cela a commencé. Des notaires sont informés par la Chancellerie qu’ils ont été tirés au sort et leur rang d’arrivée. Comme les impétrants avaient postulé dans plusieurs communes et pour plusieurs études, des choix vont s’effectuer. Nous n’y verrons clair que dans quelques mois.
Ils vont devoir se créer une clientèle. Ils n’ont toujours pas le droit à la publicité (mais cela ne durera pas et il probable que des recours auront lieu pour faire sauter ce verrou. Ainsi, les vétérinaires viennent d’obtenir un arrêt du Conseil d'Etat – arrêt du 10 juillet 2017 n° 390168 – autorisant la publicité commerciale sur leurs véhicules). Ils vont tenter, soit d’obtenir de nouveaux monopoles (celui de la famille est dans leur colimateur), soit faire jouer leurs compétences spécifiques pour récupérer de nouveaux marchés (entreprises, collectivités territoriales, ….).
Les avocats doivent en urgence se réveiller d’autant que les notaires intègrent rapidement les nouvelles technologies. Le premier forum « Technologies et notariat », organisé par la Chambre interdépartementale des notaires de Paris en juillet 2017, le démontre. Il a eu un vif succès.
Des partenariats ont été conclus avec des légaltechs. Ainsi, « Notaire conseil d’entreprise » a conclu un partenariat avec la plateforme LEGALSTART dédiée à la création de sociétés et l’établissement des formalités en ligne. De nouveaux sites en matière d’échanges dématérialisés avec la clientèle des notaires ont été présentés (My-notary). La Chambre des notaires de PARIS a un projet dénommé « réinventons le notariat du Grand Paris ». Il doit améliorer la performance des études. On met en place des systèmes divers en s’appuyant sur l’intelligence artificielle :
Archivage de courriels,
Transfert de fichiers,
Visioconférence,
Signature électronique des actes,
Dématérialisation des échanges entre le notariat et l’administration.
Le congrès de Septembre 2017 abordera, pour la première fois, tous les sujets numériques.
Au Conseil Supérieur du Notariat, on crée un département « recherche et développement » préside par un ancien Président du CSN. Il conviendrait que la profession d’avocat s’inspire de ce dynamisme et crée, au sein de son institution représentative, un véritable laboratoire de « recherche et développement » au service de toute la profession.
C’est un peu le programme que présente Christiane FERAL-SCHUHL, candidate au C.N.B et à la Présidence de cette institution, dans son interview à Lexbase de Juillet 2017. Elle propose la création au sein du Conseil National des Barreaux d’un « laboratoire de l’innovation » pour tester des nouveaux outils ou encore diffuser des méthodes innovantes provenant de cabinets-pilotes. Elle veut développer une stratégie de l’innovation en s’appuyant notamment l’Observatoire de la profession créée au sein du C.N.B et fonctionnant parfaitement.
Michel BENICHOU