Le Professeur Dominique ROUSSEAU, constitutionnaliste émérite, est un provocateur habituel. Dans une tribune parue à la Gazette du Palais du 12 septembre 2017, il ne propose pas moins que :
Supprimer le Ministère de la Justice,
Supprimer le Conseil d’Etat,
Refonder le Conseil Constitutionnel.
Pour le Ministère de la Justice, sa thèse est simple. La justice ne doit pas relever de la sphère étatique. Elle est un pouvoir de la société et, dès lors, elle doit être à l’abri des passions. On supprimerait donc le Ministère de la justice pour créer un « Ministère de la Loi » qui serait chargé du contrôle de la qualité rédactionnelle et juridique des projets soumis à la discussion parlementaire et notamment de leur compatibilité avec la Constitution, la législation européenne et les traités internationaux. On créerait donc un Conseil Supérieur de la Justice, autorité constitutionnelle indépendante.
Le Conseil d’Etat ne serait que la conséquence de la « conception française de la séparation des pouvoirs ». Le dualisme juridictionnel ne serait qu’un produit de circonstances historique et politique, qui ont disparu aujourd’hui et qui enlèvent donc à la juridiction administrative sa justification. Le contentieux administratif serait donc transféré à l’ordre judiciaire. On créerait au sein de la Cour de Cassation une chambre administrative. Il est certain que cela simplifierait les procédures et éliminerait les difficultés que l’on rencontre habituellement quant au choix, dans certains contentieux, des juridictions administratives ou civiles. Cela conduirait également à la fin de ces distorsions de jurisprudence et notamment quant aux indemnités décidées entre les juridictions judiciaires et celles administratives (contentieux hospitalier, contentieux médical, indemnisation du préjudice corporel, ….).
Enfin, le Conseil Constitutionnel deviendrait une Cour répondant dans son organisation aux exigences d’impartialité et de neutralité, d’objectivité nécessaire à toute juridiction. Les membres seraient désignés selon leurs compétences juridiques et la validation parlementaire, et son accès serait ouvert à tout justiciable, son champ de compétences étant étendu aux décisions de justice.
C’est une « refondation radicale de la justice ». Ces propos ouvrent un chantier de réflexions intéressant.
Michel BENICHOU