En effet, la loi américaine Sarbanes-Oxley, du 30 juillet 2002, exige des sociétés cotées aux USA et de leurs filiales, y compris françaises, qu’elles disposent de dispositifs d’alertes. Mais l’on peut s’interroger sur quels domaines reposent-ils ?
- Infractions financières :
- Infractions comptables :
- Infraction en matière de concurrence :
Ces domaines de contrôle sont admis par la loi française, mais qu’en est-il des autres éléments qui pourraient être divulgués à l’employeur par un salarié, plus ou moins bien intentionné, comme on n’a pu en avoir un exemple dans l’affaire Renault ?
I. Concernant l’employeur :
Le mode de preuve des éléments invoqués à l’appui des sanctions prises contre l’auteur présumé des faits est libre. Toutefois, il convient de rappeler d’utiliser avec prudence les informations ainsi obtenues. Sauf à imposer à l’employeur les obligations d’un véritable inquisiteur, il convient tout de même d’analyser concrètement la situation et d’en circonscrire au maximum le risque.
II. Concernant le dénonciateur :
A. Les dispositifs d’alerte :
Par principe, les différents dispositifs d’alerte qui peuvent être mis en place par une société internationale soumise à la loi précédemment visée, pourra utiliser tous les moyens qui sont à sa disposition pour atteindre cet objectif. Mais, en pratique, ces entreprises ont recours le plus souvent à des modes de délation « à distance » soit via l’intranet de l’entreprise soit de manière externalisée par un site internet géré par un sous-traitant. Hélas, le plus souvent ces mécanismes dans les autres pays sont plus légers que les dispositifs stipulés par la loi française. Il est à rappeler que comme tout traitement de donnée à caractère personnelles est soumis au contrôle de la CNIL, par une déclaration.
NB : Tous les articles cités sont issus du Code du travail
B. Les protections accordées par la législation :
Au-delà de ces éléments, la loi française semble favoriser la connaissance par l’employeur de certains faits, en accordant une protection aux salariés qu’ils en soient victimes ou non. Quels sont ces comportements ?
- La Corruption : Art. L1161-1
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte (…) pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, soit à son employeur, soit aux autorités judiciaires ou administratives, de faits de corruption dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions. »
- Art. L1132-3
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux articles L1132-1 et L1132-2 ou pour les avoir relatés. »
-
- La Discrimination :
- La Grève :
- Le Harcèlement qu’il soit moral (L1152-2) ou sexuel (L1153-3) :
« Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte (…) pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés. »
Circulaire sur le dispositif d’alerte professionnelle DGT n°2008-22 du 19 novembre 2008
Quel constat porté sur ces éléments ? Le dénonciateur, au travers de ces quelques cas, bénéficie d’une réelle immunité. Toutefois, eu égard à la jurisprudence en matière de harcèlement moral, cette immunité cessera en cas de mauvaise foi. On tombe ainsi dans sur une notion pour le moins nébuleuse ! A titre d’exemple, la Cour de cassation a rappelé, dans un arrêt du 10 mars 2009, que la mauvaise foi ne peut résulter de la seule circonstance que les faits dénoncés ne sont pas établis. Toutefois, on peut imaginer pouvoir tout de même sanctionner quelqu’un qui a menti ouvertement sous deux conditions :
- Rapporter la preuve de l’inexistence matérielle des faits soulevés.
- Rapporter la preuve que le salarié était au courant au moment de la dénonciation, que les faits étaient inexacts.
Mais, a priori, la preuve appartenant à la partie défenderesse, celle-ci devra combattre une preuve négative : comment prouver que l’on n’a pas commis une corruption ? un harcèlement ? une grève ? une discrimination ?
Tout au plus, l’employeur qui tiendrai compte de ces éléments, bénéficiant d’une règle de preuve allégée, ne saurait être dispensé d’établir la matérialité des éléments de faits précis et concordant qu’il présente au soutien de son allégation.
La sanction : le licenciement du salarié qui aurait pour fondement ( = cause première et déterminante) la dénonciation des faits énumérés ci-dessus, est nul. Ce qui a priori, entraine la possible réintégration du salarié licencié.
III. Concernant l’auteur présumé des faits :
L’auteur présumé des faits peut très bien ne jamais avoir connaissance de ces éléments, sauf à ce que l’employeur les utilise comme preuve dans une éventuelle procédure disciplinaire, conduisant ou non au licenciement. Si c’est le cas, le salarié sera amené à prendre connaissance des éléments de preuve invoqués par l’employeur, à charge pour lui d’en rapporter la preuve contraire. Mais sur ce renversement de la charge de la preuve il convient d’en apprécier la portée :
- En matière de harcèlement moral ou sexuel, il y a bien un renversement de cette charge de la preuve sous réserve, d’apporter des éléments suffisants.
- Dans les autres cas, le salarié devra là aussi rapporter la preuve, en effet, en pratique, il sera le demandeur à l’action, en vue d’établir que son licenciement n’est pas fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Seule issue possible, selon l’article L1235-1, le doute profite au salarié.