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Prise d'acte et ATMP : la charge de la preuve.
Cet arrêt est innovant en ce qu'il censure la Cour d'appel de Toulouse du 9 septembre 2009, au visa de l'article L.4121-1 et -2, pour avoir adopté une solution conforme à la jurisprudence ultérieure de la Cour de Cassation. En effet, elle renverse la charge de la preuve des faits constitutifs de la prise d'acte du salarié, victime d'un ATMP, sur l'employeur. Elle déclare ainsi qu'il « appartient à l'employeur qui considère injustifiée par prise d'acte de démontrer que la survenance de cet accident est étrangère à son obligation de sécurité de résultat ». L'expression est jetée ! La Cour se fonde une fois de plus sur l'obligation de sécurité de l'employeur pour ainsi décharger le salarié de la charge de la preuve. En l'espèce, la Cour d'appel avait refusé d'admettre comme suffisant le Procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail pour infraction aux articles R.4324-2 (concernant la protection des équipements mobiles).
- Comment expliquer ce revirement ?
On pourrait penser que la Cour vise une facilitation de la preuve mais il s'agit ici de fondement plus poussé. Déjà en 2009, la Cour de Cassation s'était affranchie du sens de la charge de la preuve en matière d'inaptitude et de reclassement (Soc.14/10/2009). En effet, l'obligation de reclassement incombe légalement à l'employeur, si celui-ci ne le met pas en œuvre. La Cour a imposé à l'employeur de justifier pourquoi il n'a pas suivi les recommandations du médecin du travail. Aussi, dans le présent arrêt, la Cour passe au-delà du fondement légal et fait prédominer la jurisprudence.
- Les conséquences du revirement:
L'employeur, qui n'arrive pas à rapporter la preuve, sera confronté à un licenciement sans cause réelle et sérieuse et encourra au minimum les 6 mois de salaires.
2. Suspension du contrat et ATMP : la déclaration d'inaptitude.
La Cour de Cassation dans un arrêt du 5 janvier 2011 confirme la solution retenue par la Cour d’appel de Metz dans un arrêt du 26 mai 2008 concernant la validité d’un licenciement consécutif à un arrêt maladie et dont l’inaptitude totale a été reconnue au cours de l’arrêt. D’une part, il convient de faire un point de procédure pour comprendre comment une inaptitude peut être déclarée en cours de suspension du contrat de travail et d’autre part, la solution qui a été posée.
- La procédure :
Une inaptitude qu’elle soit totale ou partielle doit nécessairement être constatée par un médecin du travail soit dans le cadre de sa surveillance générale soit dans le cadre de la visite médicale de reprise or cette dernière à nécessairement lieu lors du retour du salarié dans l’entreprise à l’issue de la suspension de son contrat de travail durant son arrêt maladie. D’autant que durant cette suspension du contrat pour cause de maladie professionnelle, l’employeur a l’interdiction de rompre le contrat pour une cause inhérente à la maladie.
Aussi, comme au cas d’espèce, le salarié pouvait se sentir protégé par cette disposition, mais il ne l’est pas.
En effet, au cas présent, on se situe non pas dans le cadre de la visite médicale de reprise mais dans le cas d’une visite de pré reprise au sens de l’article R.4624-23. Cette dernière peut être demandée au médecin du travail par différentes personnes (par le salarié lui-même, son médecin traitant, le médecin conseil de l’assurance maladie), avec l’accord toujours du salarié, mais a contrario l’employeur ne peut y recourir.
- La solution :
En dépit du fondement jurisprudentiel certes ancien (Soc. 12/11/1997), la Cour de Cassation a validé le licenciement. Toutefois, l’argument développait l’idée selon laquelle la visite de pré-reprise ne dispense pas l’employeur d’une visite de reprise, reconnaissant ainsi implicitement une période franche ne permettant pas à l’employeur d’avoir recours au licenciement. Aussi, méfiance en cas de visite de pré-reprise, en cas de déclaration d’inaptitude, cette déclaration marque la fin de la suspension du contrat de travail et autorise l’employeur à procéder à son licenciement.