Et oui, certains salariés ont la chance de bénéficier d’une rémunération variable qui est l’une des composantes de la rétribution globale que peuvent proposer les entreprises à leurs salariés. Par opposition au salaire de base qui constitue une rémunération fixe, la rémunération variable est calculée en fonction des résultats ou performances atteintes soit au niveau individuel soit au niveau collectif. Elle reste donc par nature variable et réversible d’une période de performance à la suivante...
Le fait générateur de ce processus est la proposition faite par l’entreprise à ses collaborateurs d’un enjeu pour récompenser leur réussite suivant les axes de performance qu’elle a choisis. Le dispositif de rémunération variable comprend l’ensemble des modalités qui constituent cette proposition. Il est gage de motivation pour le collaborateur qui va chercher à atteindre la performance attendue par l’entreprise pour que ce variable s’ajoute à son salaire fixe.
Cependant, l’ensemble des modalités du dispositif de rémunération variable peut être très varié et plus ou moins élaboré. En tout état de cause, sa structure de base doit toujours prendre en compte les variables de performance ou de résultat. Il s’agit alors de définir la période de performance, le périmètre pris en compte et l’indicateur du critère retenu pour chaque variable de performance.
Quid juris : l’absence de visibilité et l’affaissement de la conjoncture économique peuvent-ils « anesthésier » l’application d’un dispositif contractuel de rémunération variable ?
Dans cette affaire, un salarié avait été engagé par une société dans le secteur de la finance en qualité de directeur technique. Après sept brillantes années de carrière qui l’avait mené jusqu’au poste de directeur technique national, il fût licencié pour motif économique et décida de saisir la juridiction prud'homale de diverses demandes.
« L’ex directeur » faisait grief à l'arrêt de l’avoir débouté de sa demande en paiement d'une prime sur objectifs calculée sur deux années.
Pour sa défense, il arguait que si le contrat de travail d'un salarié prévoit une rémunération comportant une partie variable dont le montant est fixé par accord annuel entre les parties, il incombe au juge, à défaut de conclusion d'un accord sur ce point, de déterminer cette rémunération en fonction des critères visés au contrat et des accords conclus les années précédentes.
Selon lui, la cour d'appel de Chambéry avait méconnu son office en s'abstenant de déterminer elle-même les objectifs au titre des années litigieuses et en se bornant à considérer que la situation économique de l'employeur et du secteur d'activité dont celui-ci relevait excluaient une reconduction des objectifs fixés et donc de la prime sur objectifs antérieurement servie.
Quid juris : la prime contractuelle sur objectifs devait-elle être « écartée » pour ces deux années compte-tenu de la conjoncture économique difficile impactant le secteur d’activité de la société ?
La Haute Cour estima que les juges chambériens avaient pu légitimement décider que l’ex salarié-directeur ne pouvait prétendre au paiement d'aucune prime sur objectifs au titre de ces deux années « de panne économique ».
En effet, elle confirma le constat de la Cour d’appel de Chambéry s’agissant d’une réelle inversion de tendance dans l'activité globale de la société de finance. De plus, l’employeur se trouvait dans un contexte particulièrement aléatoire et régressif qui ne permettait aucune visibilité concernant ces deux années.
Dès lors, l’ex-directeur fût condamné aux dépens et son pourvoi fût rejeté.
Chacun sait qu’en matière de détermination des objectifs le salarié a intérêt à ce que soit fixé un objectif minoré, facile à dépasser et qui lui permette d’accroître sans effort sa rémunération.
Seulement, l’entreprise n’aurait aucun avantage à récompenser la réalisation d’objectifs médiocres ! En revanche, des objectifs ambitieux ont un effet dynamisant sur les performances et c’est le fondement même de l’instauration d’une prime sur objectifs. Aussi, l’association du collaborateur à la définition de ses objectifs ainsi que la corrélation du montant de sa prime avec ses résultats sont primordiales. Plus le résultat est élevé, plus la prime doit être importante pour pouvoir à son tour promouvoir l'ambition et la fiabilité des objectifs sur le long terme. Il ne reste qu’à l’expérimenter maintenant…
Nadia RAKIB
Sources
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 12 février 2015, n°13-22.098, Inédit
Cour d’appel de Chambéry, 30 mai 2013, rendu sur renvoi après cassation Soc. 10 mai 2012, n° 11-14.635
Article 1134 du Code civil