En ces temps « de dégraissage économique » des entreprises, rappelons que lorsqu’il s’agit d’un licenciement d’ordre personnel, celui-ci repose sur la personne du salarié : son comportement (faute…), une insuffisance professionnelle… Aussi, pour être valable, la cause du licenciement doit être à la fois réelle et sérieuse. Dans le cas contraire, le licenciement sera qualifié d’injustifié ou d’abusif.
La cause est réelle si elle repose sur des faits objectifs, vérifiables et non sur une impression ou un jugement subjectif.
La cause est sérieuse lorsqu’elle s’avère suffisamment grave pour rendre inévitable le licenciement. En tout état de cause, il convient d’apprécier les événements au cas par cas, selon leur ampleur, leurs conséquences sur la bonne marche de l’entreprise, le passé professionnel du salarié.
Il faut savoir que des absences non autorisées, des indiscrétions, certaines fautes professionnelles peuvent, selon les circonstances, constituer une faute simple mais, suffisante pour justifier le licenciement ou bien une faute grave.
Dans une récente affaire, un salarié avait été licencié et sa lettre de licenciement indiquait le motif d’un usage abusif de son véhicule de fonction durant son dernier arrêt de travail. Cependant, les juges du fond avaient retenu un autre grief que celui écrit dans la lettre soit un usage abusif de la carte de paiement liée au véhicule de fonction.
Quid juris : puisque ce dernier fait n’était pas mentionné par la lettre de licenciement, les juges pouvaient-ils s’extraire du motif de la lettre de licenciement qui en principe fixe les limites du litige ?
La Haute Cour répond par la négative dans son arrêt de principe suivant sa jurisprudence constante sur cette question juridique.
Elle rappelle qu’un employeur ne peut pas invoquer d’autres griefs que ceux qu’il a mentionnés dans la lettre de licenciement et quand bien même ceux-ci se fonderaient sur des faits véritables. De son côté, le juge n’est pas libre d’examiner des griefs qui ne figurent pas dans la lettre de licenciement. Il doit s’en tenir aux motifs rédigés.
Enfin, il convient de préciser que des motifs issus de la vie personnelle ne peuvent justifier un licenciement sauf cas exceptionnels ayant des répercussions directes sur l’entreprise.
Ainsi, le licenciement ne peut pas reposer sur l'un des motifs suivants :
- un motif discriminatoire (l'origine, l'orientation sexuelle, les mœurs, la situation de famille, la nationalité, l'appartenance ethnique ou religieuse...),
- un fait relevant de la vie privée (sauf s'il crée un trouble objectif dans l'entreprise ou qu'il s'accompagne d'un manquement à l'obligation de loyauté vis-à-vis de l'employeur),
- l'état de santé ou le handicap (sauf en cas d'inaptitude constatée par le médecin du travail),
- la grossesse, la maternité, l'adoption.
La semaine dernière, « l’histoire » d’une jeune salariée étudiante en CDI chez un géant du fast food qui a été licenciée pour avoir passé ses examens a fait du bruit dans la sphère médiatique. Cette étudiante avait pourtant précisé à son manager, lors de son embauche dans ce restaurant, qu'elle aurait besoin de s'absenter en fin d'année pour réviser et passer ses partiels.
Cette information soumise au moment du recrutement avait été acceptée par l’équipe managériale mais, ce fût une promesse non tenue le moment venu. S’étant tout de même rendue à ses examens, la jeune étudiante fût sanctionnée par un licenciement pour «absence injustifiée perturbant le bon fonctionnement de l'entreprise».
Les prud’hommes saisis du litige par la jeune étudiante devront se prononcer sur la cause réelle et sérieuse du licenciement. Nul ne doute que ce géant des fast food va devoir réviser ses copies de lettres de licenciement à l’avenir car s’absenter pour passer des examens de fin d’études est un droit reconnu par le Code du travail. Et puis, c’est un comble qu’un groupe qui emploie majoritairement des étudiants dans ses restaurants l’ait oublié …
Nadia RAKIB
Source
Cass. soc., 17 sept. 2014, n° 13-17.279, D