L’action en réparation d’un préjudice résultant d’un vice caché peut être engagée de manière autonome par rapport à l’action rédhibitoire ou estimatoire qui n’est offerte qu’aux parties au contrat de vente. Le syndicat des copropriétaires qui a qualité pour agir en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble peut engager une action en réparation des désordres affectant les parties communes de l’immeuble contre le vendeur.
Une société a acquis un immeuble entier puis l’a rénové, divisé et vendu par lots de copropriété. Les actes de vente comportaient, en annexe, un rapport établi par un bureau de contrôle technique relatif à l’état de la couverture.
Le syndicat des copropriétaires avait engagé une action à l’encontre du vendeur professionnel, de son assureur, ainsi que du bureau de contrôle technique, afin de les voir déclarés solidairement responsables du désordre survenu en toiture sur le fondement de la garantie des vices cachés.
Les défendeurs ont soulevé l’irrecevabilité des demandes. La Cour d’appel de Paris, dans une décision du 16 janvier 2014, avait accueilli les arguments de ces derniers estimant que l’action en réparation du préjudice subi du fait d’un vice caché ne peut être valablement engagée que par les acquéreurs, seuls titulaires de l’action, cette dernière trouvant son origine dans le contrat de vente auquel le syndicat des copropriétaires n’était pas partie.
La troisième chambre civile de la Cour de Cassation censure l’arrêt d’appel et consacre la jurisprudence récente de la chambre commerciale puis de la première chambre civile de la Cour de Cassation, selon laquelle l’action en réparation du préjudice subi du fait d’un vice caché n’est pas subordonnée à l’exercice d’une action rédhibitoire ou estimatoire (c’est-à-dire la restitution du prix de vente ou une indemnisation au titre d’un moindre prix) qui par définition ne peut être engagée que par l’acquéreur, partie au contrat de vente, mais peut-être engagée de manière autonome.
L’application de cette jurisprudence précitée entraîne la recevabilité de l’action engagée par le syndicat des copropriétaires, qui n’est pas partie au contrat de vente, mais qui sollicite cette branche indemnitaire autonome pour le préjudice causé par le vice caché.
La Cour de Cassation rend sa décision au visa des dispositions des articles 14 et 15 de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 1641 et 1645 du Code civil.
L’article 15 de la loi précitée prévoit la possibilité pour le syndicat des copropriétaires d’agir en justice en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble et donc pour tous désordres affectant les parties communes.
Les défendeurs soutenaient que l’action en garantie des vices cachés ne pouvait être attachée qu’à chacune des fractions de l’immeuble objet d’un contrat de vente et que par conséquent seuls les copropriétaires acquéreurs pouvaient agir sur ce fondement et non le syndicat des copropriétaires.
Avant même la jurisprudence sur le caractère autonome de la demande indemnitaire de l’article 1645 du Code civil selon lequel le vendeur qui connaissait les vices de la chose est tenu à des dommages et intérêts envers l’acheteur, l’action en garantie des vices cachés exercée par le syndicat des copropriétaires à l’encontre du vendeur sur le fondement de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965 ainsi que des articles 1641 et suivants du Code civil était admise par la Cour de Cassation.
Par Maître Karim DJARAOUANE
Avocat au Barreau de Paris
Source : Cass.3e Civ., 24 juin 2015, n°14-15.205
Cass.com., 19 juin 2012, n°11-13.176
Cass.1ère Civ, 26 septembre 2012, n°11-22.399 et n°11-22.164
Cass.3e Civ., 21 novembre 1969 Bull. civ. III, n°755