L’article 6-1 dans la loi du 6 juillet 1989 dispose : « Après mise en demeure dûment motivée, les propriétaires des locaux à usage d’habitation doivent, sauf motif légitime, utiliser les droits dont ils disposent en propre afin de faire cesser les troubles de voisinage causés à des tiers par les personnes qui occupent ces locaux ».
Le bailleur doit ainsi s’assurer que son locataire ne trouble pas la tranquillité de ses voisins.
Lorsqu’un tiers est victime de troubles de voisinage émanant d’un locataire, il peut agir directement contre l’auteur de ces agissements répréhensibles et obtenir une condamnation à verser des dommages et intérêts ainsi qu’une condamnation sous astreinte à cesser lesdits troubles. Il peut également se retourner contre son propre bailleur, si celui-ci est également le bailleur de l’auteur des troubles sur le fondement de l’article 1725 du code civil. Si ce dernier article évince la responsabilité du bailleur en cas de troubles de jouissance suite à des voies de fait commises par des tiers, le locataire du même bailleur n’est pas considéré comme un tiers et, ainsi la responsabilité du bailleur peut être recherchée par le locataire victime.
Dans ce cadre, une fois informé des troubles de jouissance subis, le bailleur doit agir de façon effective afin de les faire cesser. Il a été récemment jugé par une Cour d’appel que le bailleur manque à son obligation de permettre au locataire de jouir paisiblement de la chose louée, s’il se contente d’adresser à son autre locataire, occupant l’appartement situé au-dessus de celui qui l’a poursuivi et dont le comportement est à l’origine de dégâts des eaux récurrents du fait d’une utilisation inappropriée de ses toilettes, des mises en demeure et des sommations demeurées sans effet d’avoir à cesser les troubles. Le bailleur commun a donc quasiment dans ce cas une obligation de résultat : si les troubles persistent malgré les mesures prises pour les faire cesser, la responsabilité du bailleur est engagée.
L’argumentation développée par l’organisme HLM qui était dans cette affaire le bailleur commun consistait, sur le fondement de l’article 1725 du code civil, à s’exonérer de sa responsabilité en soulignant la qualité de tiers du locataire auteur des troubles (tiers à la relation contractuelle entre l’organisme HLM et le locataire victime).
En principe, le tiers victime n’étant pas lié contractuellement avec le bailleur de celui qui trouble la jouissance du bien, ce tiers ne disposait pas d’action spécifique à son encontre.
L’objectif de l’article 6-1 dans la loi du 6 juillet 1989 est de donner un fondement légal au recours du tiers victime, autre que l’article 1382 du code civil, puisqu’il peut reprocher au bailleur de l’auteur des troubles son inaction (en pratique de ne pas avoir intenté une action en résiliation du bail), peu importe dès lors que ce dernier soit commun ou non aux locataires.
Source : CA.Rouen, 11 juin 2015, n° 14/07217
Par Maître Karim DJARAOUANE
Avocat au barreau de Paris