Depuis mon dernier article, les choses ont bougé.
Notre ministre de la justice a demandé au Parquet via une circulaire d’être présent à toutes les audiences intéressant le barème MACRON et a demandé au même parquet de recenser toutes les décisions rendues sur ce sujet.
Jusque-là pourquoi pas, même si ce type de demande est rarissime en droit du travail et en principe réservé au droit pénal.
Mais, là où c’est plus étonnant c’est que la circulaire est très fortement orientée puisqu’elle explique en quelque sorte le « bienjugé ». Elle rappelle les décisions du Conseil d’Etat et du Conseil Constitutionnel semblant « valider » le barème et demande au parquet de rappeler aux conseillers prud’homaux les textes à appliquer.
Madame la Ministre ne communique pas, par contre, la décision du Comité européen des droits sociaux (CEDS) saisi par la Finlande sur un problème lié à un barème similaire et qui a estimé que ledit barème n’était pas conforme à la Convention n°158 de l’OIT et à la Charte Sociale Européenne du 3 mai 1996.
Elle ne rappelle pas non plus que la décision du Conseil d’Etat n’a aucune autorité de chose jugée et ne lie pas les juges ou conseils prud’homaux.
Elle oublie enfin que le Conseil constitutionnel n’est juge que de la conformité des lois à la Constitution et ne se prononce pas sur la conformité des textes nationaux aux textes internationaux.
Le Conseil Constitutionnel n’a par conséquent jamais eu à se prononcer sur la conformité du barème MACRON à la Convention n°158 de l’OIT ou à la Charte Sociale Européenne.
La circulaire de Madame la Ministre est ainsi en quelque sorte à charge, ce qui peut poser quelques problèmes vis-à-vis de l’indépendance des juges.
Au surplus, elle n’a pas réellement changé les choses puisque les conseils de prud’hommes continuent à juger que le barème ne doit pas être appliqué.
Le dernier jugement rendu en ce sens est celui du Conseil de prud’hommes de DIJON en date du 19 mars 2019.
La Cour d’Appel de PARIS saisie de ce problème de barème a préféré renvoyer une affaire à une audience ultérieure, afin de pouvoir demander l’avis du Parquet Général.
Encore une fois ce type d’interrogation est rarissime en droit social.
La décision de la Cour devrait être rendue le 23 mai prochain.
L’argumentation de l’avocat de l’appelant était intéressante puisqu’elle consistait à affirmer que les décisions du Conseil d’Etat et du Conseil Constitutionnel ne s’imposent pas au juge contrairement aux textes internationaux tels que la convention n°158 de l’OIT et la Charte Sociale Européenne, ces deux textes prévoyant qu’un plafond d’indemnisation ne peut exister que s’il est dissuasif pour l’employeur et compense intégralement le préjudice subi.
Pour être tout à fait complète, il faut encore souligner que le CEDS a été saisi du problème du Barème MACRON par la CGT et FO. Le verdict est attendu l’année prochaine.
Toutefois, au regard de la décision rendue par ce comité à propos du barème finlandais, il est à prévoir que le barème français ne va pas être applaudi.
Le feuilleton n’est pas encore terminé…