Aux termes de l’article L. 225-100, alinéa 3, du code de commerce, le rapport de gestion « […] comporte le cas échéant des indicateurs clés de performance de nature non financière ayant trait à l’activité spécifique de la société, notamment des informations relatives aux questions d’environnement et de personnel ».
La directive 2003/51/CE du Parlement européen et du Conseil du 18 juin 2003 modifiant les directives 78/660/CEE, 83/349/CEE, 86/635/CEE et 91/674/CEE du Conseil sur les comptes annuels et les comptes consolidés de certaines catégories de sociétés, des banques et autres établissements financiers et des entreprises d’assurance offre aux États membres de l’Union européenne la possibilité de prévoir des dérogations à l’obligation de divulgation des informations de nature non financière au profit des entreprises n’atteignant pas une certaine taille. En vertu de cette directive, les obligations prévues à l’article L. 225-100, alinéa 3, du code de commerce ne sont pas applicables aux sociétés non cotées ne dépassant pas les seuils suivants :
- total du bilan ou montant net du chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros et nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice supérieur à 5 000, aux exercices ouverts après le 31 décembre 2011 ;
- total du bilan ou montant net du chiffre d’affaires supérieur à 400 millions d’euros et nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice est supérieur à 2 000, aux exercices ouverts après le 31 décembre 2012 ;
- total du bilan ou montant net du chiffre d’affaires supérieur à 100 millions d’euros et nombre moyen de salariés permanents employés au cours de l’exercice est supérieur à 500, aux exercices ouverts après le 31 décembre 2013.
L’obligation pour les sociétés cotées d’inscrire dans le rapport de gestion annuel du conseil d’administration ou du directoire des informations sociales et environnementales est issue de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, dite « loi NRE », complétée par la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite « loi Grenelle II ». La loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives, dite « loi Warsmann » du nom du rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois au moment de l’adoption du texte, s’inscrit dans cette lignée. En son article 12, cette loi vient modifier l’article L. 225-102-1 du code de commerce en exonérant les filiales ou sociétés contrôlées dépassant les seuils mentionnés de publier les informations requises en matière sociale et environnementale dès lors que ces données ont été publiées par la société-mère du groupe, de manière détaillée, pour chacune des filiales, et que ces dernières indiquent dans leur propre rapport de gestion comment y accéder. Le but de cette disposition est, d’une part, d’éviter les redondances entre le rapport de gestion de la société-mère et le rapport de gestion de ses filiales, et, d’autre part, de dispenser les sociétés concernées de faire certifier leurs informations par un tiers indépendant, laquelle certification occasionne ainsi un coût important pour les entreprises.
En effet, aux termes de l’article L. 225-102-1, alinéa 7, du code de commerce, « les informations sociales et environnementales figurant ou devant figurer au regard des obligations légales et réglementaires font l’objet d’une vérification par un organisme tiers indépendant […]. Cette vérification donne lieu à un avis qui est transmis à l’assemblée des actionnaires ou des associés en même temps que le rapport du conseil d’administration ou du directoire ». Le décret n° 2012-557 du 24 avril 2012 relatif aux obligations de transparence des entreprises en matière sociale et environnementale précise que seuls pourront procéder à la vérification les organismes ayant reçu une accréditation à cet effet par le Comité français d’accréditation (COFRAC) ou par un organisme signataire de l’accord de reconnaissance multilatéral établi par la coordination européenne des organismes d’accréditation.
Les informations devant figurer dans le rapport de gestion et donnant lieu à certification par un tiers indépendant figurent désormais à l’article R. 225-105-1 du code de commerce. Au titre des informations sociales, sont requis des éléments relatifs à l’emploi, l’organisation du temps de travail, l’état du dialogue social, la formation ou l’égalité de traitement entre hommes et femmes. Au titre des données environnementales, sont requis des éléments relatifs à la politique générale de l’entreprise en matière environnementale, la pollution et la gestion des déchets, l’utilisation durable des ressources, la protection de la biodiversité ou l’impact territorial, économique et social de l’activité de la société.
Ces exigences sont sanctionnées civilement. Ainsi, l’article L. 225-102 du code de commerce prévoit que « lorsque le rapport annuel ne comprend pas les mentions prévues au premier alinéa, toute personne intéressée peut demander au président du tribunal statuant en référé d’enjoindre sous astreinte au conseil d’administration ou au directoire, selon le cas, de communiquer ces informations ». Des sanctions pénales existent également. Ainsi, le défaut d’établissement du rapport de gestion est sanctionné d’une amende de 9 000 euros. Si le rapport est établi et valablement présenté mais comporte des mentions erronées, l’article L. 465-2, alinéa 2, du code monétaire et financier réprimant la diffusion d’informations fausses ou trompeuses pourrait s’appliquer, qui prévoit une peine de deux ans d’emprisonnement ainsi qu’une amende de 1 500 000 euros.
Au-delà des obligations techniques qui en découlent, le décret du 24 avril 2012 précité s’inscrit dans le cadre du développement de la responsabilité sociale des entreprises. Domaine émergent, lié à la recherche d’une maîtrise du processus de mondialisation de l’économie et des enjeux politiques et sociaux qui l’accompagnent, la responsabilité sociale des entreprises est à la croisée de deux influences : investisseurs, d’une part, et consommateurs, d’autre part, cherchent aujourd’hui à concilier taux de rentabilité élevé, pouvoir d’achat maximisé et comportement économique et social responsable. Si la responsabilité sociale des entreprises semble relever avant tout du volontarisme des entreprises, le droit appréhende toutefois cette notion de manière croissante et érige en obligations des pratiques volontaires. Le régime juridique de la responsabilité sociale des entreprises se construit.
Nicolas Guerrero
Avocat à la Cour