Désormais, lorsqu'on voudra créer une nouvelle marque de boisson alcoolisée, il va falloir être très attentif aux marques identiques ou similaires déjà déposées dans d'autres classes et utilisées pour des produits d'autres catégories.
Un producteur de cognac ayant déposé dans la catégorie des alcools, une marque identique à celle déposée antérieurement pour des bougies et des eaux de toilette, se trouve assigné en annulation de sa marque par la propriétaire de la marque antérieure car l'application de la loi Evin pour la publicité sur les boissons alcoolisées (codifiée dans le Code de la santé publique) pourrait gêner la libre utilisation de la marque pour les bougies et eaux de toilettes.
La Cour de Cassation en novembre 2012 a confirmé en tous points l'arrêt de la Cour d'Appel de Paris d'octobre 2011 et donne raison au fabricant de bougies et d'eaux de toilettes. Ces décisions sont accessibles dans la partie abonnés du site.
Pour les juges, du fait de l'application de l'article sur la publicité indirecte pour les boissons alcoolisées, une publicité pour des bougies et des eaux de toilettes pourrait être regardée comme une publicité indirecte « rappelant » une boisson alcoolique et entrainer l'application du Code de la santé publique.
Le Code de la santé publique n'interdit nullement la publicité indirecte pour les boissons alcoolisées, comme le rappelle très clairement la Cour de cassation dans ses attendus, mais la soumet aux dispositions concernant les supports autorisés.
Pour les juges, l'existence de la marque d'alcool est de nature à paralyser l'usage de la marque de bougies dès lors que sa propriétaire ne peut plus exercer pleinement son droit de propriété sur sa marque et est notamment limitée quant aux supports autorisés pour la publicité. Par exemple sa présence sur internet pourrait être encadrée en l'empêchant d'avoir des messages interstitiels, ou elle ne pourrait faire des publicités sur des chaines télévision ou au cinéma. Il y aurait de ce fait perte d'efficacité de la marque antérieure et c'est une atteinte aux droits de propriétaire de la marque.
Ces deux décisions qui constituent une brèche dans le principe de spécialisation pour le dépôt des marques, est donc fort importante et ses conséquences asses lourdes. Elle est contestable. Elle entraîne, pour les producteurs de boissons alcoolisées et leurs prestataires, une obligation de grande prudence dans le choix des marques. Notamment les recherches d'antériorités ne devront plus se limiter aux marques déposées dans la classe des boissons alcoolisées. Ce choix étant déjà difficile comme pour toute création de marque, va s'en trouver compliqué de manière spécifique pour les boissons alcoolisées.