Dans un contentieux de harcèlement moral, la chambre sociale de la Cour de cassation est venue préciser, sans surprise, que la salariée qui revient d'un congé parental est fondée à prendre acte de la rupture du contrat de travail en raison d'un harcèlement moral subi antérieurement lorsque l'employeur n'a pris aucune mesure pour le faire cesser.
Dans cette affaire, une salariée s'est trouvée en arrêt de travail pour état pathologique résultant de sa grossesse puis en congé parental du 3 juillet 2010 au 30 avril 2011. Mais, avant de retourner au travail, celle-ci notifie le 26 avril 2011 sa démission puis décide, le 30 novembre 2011, de saisir la juridiction prud'homale pour requalifier la rupture aux torts de l'employeur.
La salariée invoque des faits constitutifs d'un harcèlement moral qui se sont produits antérieurement à son arrêt de travail. L'employeur tente alors de soutenir que la prise d'acte n'était pas justifiée car la salariée ne pouvait prendre acte de la rupture aussi tardivement pour des faits de harcèlement qui se sont déroulés antérieurement à l'arrêt de travail de la salariée. En d'autres termes, la salariée aurait dû, dès que les faits de harcèlement se sont produits, prendre acte de la rupture.
Tel n'est pas l'avis de la Cour de Cassation. La victime peut toujours prendre acte de la rupture du contrat si l'employeur connaissait les faits de harcèlement et n'a pris aucune mesure pour le faire cesser. Par conséquent, la salariée pouvait légitimement craindre, à son retour dans l'entreprise, la perpétuation des agissements de harcèlement moral car l'auteur du harcèlement était toujours présent dans l'entreprise.
La solution est dans la continuité jurisprudentielle en matière de contentieux harcèlement : l'employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser le harcèlement dès qu'il a connaissance de tels faits. Mais la précision qui ressort de cet arrêt est essentielle : une prise d'acte est encore justifiée presque un an après la survenance de faits constitutifs d'un harcèlement moral ! Mais, nuance : c'est parce que la salariée devait retourner dans l'entreprise et donc que les faits étaient susceptibles de se reproduire que la Cour de cassation confirme l'arrêt rendu par les juges du fond...
En somme, ne pas prendre immédiatement des mesures pour faire cesser un harcèlement est risqué, ne rien faire est suicidaire.
Cass. Soc. 08/07/2015 n°14-13324