Condition de vie des étrangers face à l’histoire foncière
1. GENERALITES:
Le problème de la condition des étrangers concerne, lato sensu, toutes les règles juridiques propres aux relations des étrangers. Partant de l’idée de l’éminent Gilbert KISHIBA recteur de l’université de Lubumbashi et professeur en droit "il consiste en droit international à délimiter la personnalité juridique de l’étranger pendant son séjour sur un territoire notamment le territoire congolais".
Il s’agit, en d’autres termes, de déterminer les droits dont jouissent les étrangers dans différents pays. Dans ce sens, on désigne la condition de vie des étrangers du nom de jouissance des droits, pour la distinguer du conflit des lois qui concerne l’exercice des droits concédés. La question de savoir quels sont les droits qu’une loi nationale réserve à ses ressortissants et ceux qu’elle confère indifféremment aux étrangers et aux nationaux est préalable à celle des conflits de lois. Dans les communautés humaines, il a toujours existé un sentiment de « méfiance », « d’hostilité » vis-à-vis des étrangers, quel que soient le pays, l’époque envisagée.
L’étranger n’est pas sur le même pied d’égalité que les nationaux. Malgré notre soutenance L’étranger a toujours été plus ou moins défavorisé par rapport aux nationaux. Et pour diverses raisons, chaque Etat contrôle de façon plus ou moins sévère, mais selon ses intérêts immédiats, l’entrée et le séjour des étrangers sur son territoire. On ne peut pas concevoir qu’une loi étrangère ait le soin de déterminer quels sont les droits dont un national peut jouir dans son propre pays.
2. DONNEES HISTORIQUES FONCIERES
La situation historique Congolaise part de L’acte General de Berlin du 26 février 1885 qui a fait du Congo, une terre largement ouverte au commerce et à la navigation.
Les étrangers y bénéficiaient d’un régime extrêmement favorable, car, en ce qui concerne la protection de leur personne et de leurs biens, l’acquisition et la transmission de leur propriété immobilière, ainsi que l’exercice des professions, ils jouissaient du même traitement et des mêmes droits que les nationaux.
Quant aux Etats signataires de l’Acte, ils avaient l’obligation de protéger et de favoriser, sans distinction de nationalité ni de culte, toutes les entreprises religieuses, scientifiques ou charitables créées et organisées en vue de supprimer l’esclavage et la traite ; l’article 6 du même Acte « garantissait en outre aux nationaux et aux étrangers la liberté de conscience et la tolérance religieuse et stipulait que le libre et public exercice de tous les cultes ainsi que le droit d’ériger des édifices religieux et d’organiser des missions ne seraient soumis à aucune restriction ni entrave »
Dans le but toutefois d’ouvrir largement au commerce les terres africaines, les grandes puissances ont introduit dans l’Acte Général de Berlin une clause qui affranchissait « de tout droit d’entrée et de transit, les marchandises importées dans le bassin conventionnel du Congo ; mais, devant les conséquences fâcheuses de cette clause pour la survie de l’E.I.C. qui se voyait acculé à la faillite, cette mesure ne put être appliquée longtemps et la Déclaration de Bruxelles du 2 juillet 1890 autorisa, sous certaines conditions, une taxation des marchandises importées à concurrence de 10 % de la valeur au port d’exportation.
Pendant la colonisation du Congo par la Belgique, ces clauses firent l’objet de vives controverses et l’Acte Général de Berlin fut remplacé par la Convention de Saint-Germain du 10 septembre 1919.
Celle-ci, tout en maintenant les grands principes de l’Acte Général de Berlin relativement à la liberté de navigation et de commerce, innova « en subordonnant l’égalité de traitement des nationaux et des étrangers aux nécessités de l’ordre et de la tranquillité publics » ([54]).
Depuis l’accession de la République Démocratique du Congo à son indépendance le 30 juin 1960, il est à noter que la Loi Fondamentale du 19 mai 1960 ainsi que la Constitution de Luluabourg (Kananga) du 1er Août 1964 sont silencieuses sur la question de la condition des étrangers. Malgré ce silence, on peut affirmer que les textes pris sous le régime de l’E.I.C. et celui de la colonisation restaient en vigueur, pour autant qu’ils n’aient pas été abrogés par la Constitution. De plus, le Congo n’ayant « jamais appliqué les directives d’égalité et de liberté commerciales énoncées par la Convention de Saint-Germain, s’est au contraire conformé à la ligne de conduite habituelle des Etats souverains qui défavorisent généralement l’étranger par rapport au national et établissent, selon les intérêts du moment des discriminations parmi les étrangers ».
Avant l’avènement de la 2ème République, seules deux circulaires ont été pris en ce domaine : la circulaire n°1 du 20 Août 1960 et la circulaire n°3 du 5 janvier 1962 qui précisent les mesures applicables au personnel de l’O.N.U. au Congo.
Sous la 2ème République, le premier texte qui réglemente la police de l’immigration est l’Ord-loi n°67/302 du 2 Août 1967 qui porte les dispositions organiques sur la police des étrangers. Cette Ord-L fut soit modifiée, soit complétée en certaines de ses dispositions par des nombreux textes suivants :
- O.L. n° 67/462 du 2 novembre 1967 et 67/477 du 29 novembre 1967 sur la circulation des étrangers.
- O.L. n° 67/478 du 29 novembre 1967 portant titre de séjour des étrangers.
- O.L. n° 67/479 du 29 novembre 1967 sur la police des étrangers.
- O.L. n° 67/483 du 30 novembre 1967 fixant la procédure devant la commission consultative des étrangers (M.C. n° 23 du 1er déc. 1967 p. 929 à 931
- O.L. n° 68/1 du 02 janvier 1968 sur le Statut des réfugiés.
A ces textes, il faut évidemment y ajouter de nombreux arrêtés ministériels portant mesures d’exécution de ces divers textes légaux réglementant la police des étrangers.
Les grands traits caractéristiques de l’Ord-Loi n°67/302 du 2 août 1967, telle que modifiée et complétée, sont notamment :
- la détermination de l’étranger visé par le règlement (articles 1 et 2)
- la situation des réfugiés (article 6)
- l’institution des commissions consultatives relatives aux étrangers (article 18) ;
- la répartition des étrangers en catégories suivant la durée de leur séjour ; résidants temporaires, résidants ordinaires et résidants privilégiés (articles 7 à 10) ;
- les limitations à la liberté de séjour et de circulation (articles 12-13) ;
En 1983, sur base des options politiques arrêtées par le comité central du M.P.R. qui était, à l’époque, l’organe suprême de l’Etat, par sa décision d’Etat n°16/CC/81 du 30 septembre 1981 relative à la police des étrangers, la loi de 1967 fut révisée et remplacée par l’ordonnance-loi n°83/033 du 12 septembre 1983 relative à la police des étrangers. Cette ordonnance-loi qui, s’inspire largement des textes antérieurs, innove principalement sur les points suivants :
- elle inclut les obligations internationales auxquelles la République Démocratique du Congo a souscrit ;
- elle accorde aux pouvoirs publics la possibilité et les moyens d’endiguer l’immigration massive des étrangers qui viennent s’établir en République Démocratique du Congo (art. 18)
- elle institue la commission nationale de l’immigration ;
- elle améliore la situation des étrangers du Congo, spécialement en ce qui concerne les voies de recours : - recours aux services administratifs qui ont pris la mesure privative de liberté autrefois, recours au pouvoir judiciaire ; - recours de révision à adresser au Président de la République, après avis de l’a commission nationale des étrangers ;
- elle supprime la classification des régimes accordés aux étrangers.
L’O.L. n° 87-033 du 8 août 1987 modifie et complète l’O.L. n 83-033 du 12 septembre 1983 relative à la police des étrangers.
Il faut enfin signaler l’ordonnance n° 83-033 précitée, plus spécialement en ce qu’elle précise les divers documents dont doit se munir un étranger pour être admis à pénétrer au Congo.
Pour clore ces notions générales, il faut rappeler une fois encore que la question de la condition des étrangers se limite au problème de la jouissance des droits par l’étranger ; elle étudie les discriminations auxquelles l’étranger est assujetti en tant que tel.
Seule une loi nationale décide du point de savoir dans quelle mesure l’étranger est regardé comme sujet de droits dans son système juridique. Même si l’art. 6 de la Déclaration Universelle de Droits de l’Homme énonce la reconnaissance pour chacun en tous lieu, de sa personnalité juridique, cela ne signifie nullement pas une égalité nécessaire avec les nationaux. Et le statut applicable divergera suivant qu’il s’agit de personnes physiques ou de personnes morales.
3. CONDITION DES PERSONNES PHYSIQUES ETRANGERES
·En Droits Prives Ou Civils
Il s’agit ici de déterminer les divers droits dont les étrangers peuvent jouir, droits conférés par la loi congolaise. On va distinguer successivement.
Cependant, nous allons nous base sur le droits civil vu l’angle de notre travail. Ils concernent les droits qui fixent la situation juridique des individus et les relations privées dans leur vie sociale.
Les diverses constitutions de la République Démocratique du Congo stipulent que tout étranger, qui se trouve sur le territoire de la République, jouit de la protection accordée aux personnes et aux biens sauf les exceptions établies par la loi. Il ne peut jouir des droits réservés aux congolais que dans les cas définis et dans les conditions déterminées par la loi.
La R.D.C. reconnaît aux étrangers la jouissance de tous les droits qui ne leur sont pas spécialement refusés par la loi et les seuls droits civils dont la jouissance est déniée aux étrangers sont ceux qu’un texte de loi réserve spécialement aux congolais.
La Constitution de la Transition dispose dans son article 58 : « Sous réserve de la réciprocité, tout étranger qui se trouve légalement sur le territoire national bénéficie des mêmes droits et libertés que les Congolais, exceptés les droits politiques.
En effet, les étrangers bénéficient de la protection accordée aux personnes et à leurs biens dans les conditions déterminées par les traités et les lois.
Il est tenu de se conformer aux lois et règlements de la République ».
·Les étrangers visés par l’ordonnance-loi n° 83/033
Sous réserve des conventions internationales ou des lois apportant dérogations à ce texte, celui-ci est applicable à tous les non-congolais c’est-à-dire à tous ceux qui ne possèdent pas la nationalité congolaise, non seulement parce qu’ils ont une autre nationalité, mais également en cas d’apatridie.
·Les apatrides
L’apatridie est la situation de la personne qu’aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation. Elle se caractérise par l’absence de nationalité et, partout, par l’absence de protection diplomatique ; un tel individu est privé de tous les avantages attachés à la possession d’une nationalité. Des législations ont cherché à améliorer le statut de l’apatridie, soit en invoquant les dispositions du texte de base qu’est la convention relative au statut des apatrides, signée à New York le 28 septembre 1954 et dont le but est de limiter au maximum le nombre de cas d’apatridie, soit en ratifiant ladite convention.
4. ADMISSION DES ETRANGERS SUR LE TERRITOIRE CONGOLAIS
- L’entrée (Ord 1983 art. 3)
Pour pénétrer au Congo, l’étranger doit remplir les conditions suivantes :
1°) Etre muni des documents, des visas requis par la loi c’est-à-dire d’un passeport (c’est une carte d’identité nationale ou internationale en cours de validité ou tout autre titre de voyage, un tenant lieu) et du visa (donné par les agents diplomatiques ou consulaires congolais en poste à l’étranger préalablement à l’entrée au Congo) ainsi que de certificat de vaccination (prescrit par les règlements de police sanitaire pris en application des conventions internationales).
- L’étranger non résidantau Congo: celui-ci ou celui egalement qui n’est pas autorisé à y résider, est tenu de présenter un billet de transport valable pour le retour ou la continuation du voyage en dehors du Congo, à moins de disposer d’un moyen autonome de déplacement.
L’étranger qui se présente aux frontières pour entrer au Congo sans être muni des documents et visas requis est refoulé par l’agent préposé au contrôle de l’immigration. L’étranger s’il ne remplit pas les conditions d’accès au territoire congolais mais se trouve sur ce territoire, fera l’objet de renvoi par l’officier d’immigration constaté dans un P.V. d’in désirabilité dressé par l’officier d’immigration et notifié à l’intéressé.
5. CONDITION DES PERSONNES MORALES ETRANGERES
La question de la condition des étrangers se présente sous un double aspect. Celui de la jouissance des droits par l’étranger et celui de l’exercice de ces droits. Or, la capacité de jouissance suppose l’existence de certains documents notamment la possession d’un certificat d’enregistrement etc.
Ainsi, la condition des personnes morales étrangères pose des problèmes propres parce que leur existence juridique elle-même est en question. Outre des discussions en droit interne sur leur réalité, il y a des contestations sur leur existence dans les relations internationales. Pour les personnes morales étrangères, il y a 2 problèmes à résoudre :
D’une part, la question relative à la détermination de la loi qui régit la société ou le groupement et d’autre part celle de savoir dans quelle mesure l’on reconnaît la personnalité juridique d’une société étrangère en lui conférant la qualité de sujet, de droit (détermination des droits dont la société ou le groupement aura la jouissance du Congo, ces droits pouvant varier suivant que le groupement sera « congolais » ou « étranger ».
En effet, la question de la condition des étrangers se présente sous un double aspect : celui de la jouissance des droits par l’étranger et celui de l’exercice de ses droits. Or, la capacité de jouissance suppose l’existence. Et toute contestation quant à l’existence d’une personne morale mettra, par conséquent en cause la capacité de celle-ci. Si les controverses se posent moins pour les personnes morales publiques, qui participent de la nationalité de l’Etat et relèvent à tous points de vue de l’Etat dont elles émanent, elles sont plus vives pour les personnes morales de droit privé.
NOM/PRENOM : pierre pierrot kafunda
SUJET : Le progrès de la loi foncière face aux conditions de vie des étrangers en droit congolais
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