Le 11 janvier dernier, une ancienne journaliste de BFMTV et de RMC déposait plainte contre Jean-Jacques Bourdin pour tentative d’agression sexuelle. Les faits se seraient déroulés en octobre 2013, alors que les deux journalistes couvraient l’Open de pétanques de Calvi, en Corse.
Selon la plaignante, l’animateur phare aurait tenté de l’embrasser de force alors qu’elle se trouvait dans la piscine de l’hôtel où ils séjournaient tous les deux. Le présentateur vedette lui aurait ensuite envoyé des messages insistants, par sms et courriels, pendant plusieurs mois.
Potentiel cumul d'infractions pénales
Rappelons que pour la Cour de cassation, le simple fait d’embrasser une personne sans son consentement peut parfaitement caractériser le délit d’agression sexuelle1. Les faits allégués par la plaignante, s’ils étaient avérés, tomberaient donc sous le coup de la loi pénale. Hors circonstance aggravante, l’agression sexuelle, comme sa tentative, est punie de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende2.
Quant aux messages insistants, ceux-ci pourraient caractériser l’infraction de harcèlement sexuel3 dès lors qu’ils ont été réitérés et qu’ils ont créé à l’égard de la plaignante « une situation intimidante, hostile ou offensante ». qu’ils ont créé à l’égard de la plaignante « une situation intimidante, hostile ou offensante ». Ce délit est puni de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.
Ouverture d'une enquête préliminaire, malgré la prescription
Quid de la prescription, alors que cette plainte intervient près de 10 ans après les faits ? Jusqu’en 2017, la prescription des délits n’était que de trois années à compter de leur commission4, contre six aujourd'hui. Les faits visés dans la plainte étant intervenus en 2013, l’action publique est donc a priori éteinte depuis octobre 2016.
Est-ce à dire que cette affaire ne connaîtra aucune suite ? Non.
Le parquet de Paris a annoncé ce mardi l'ouverture d'une enquête, confiée au commissariat du XVIe arrondissement de la capitale. Comme le rappelait d'ailleurs le ministre de la Justice dans une dépêche de février 20215, aucune disposition légale n’empêche un procureur d’investiguer sur des faits prescrits. Même face à des faits anciens, libre donc au parquet d’initier ou non une enquête préliminaire.
Enquête interne diligentée par Altice Media
Par ailleurs, et comme les investigations ne sont pas l’apanage de la justice, le groupe Altice Media, propriétaire de BFMTV et de RMC, a d’ores-et-déjà pris les devants, indiquant diligenter une enquête interne.
Jean-Jacques Bourdin reste bien entendu présumé innocent6. En attendant d’éventuels développements, le présentateur devrait continuer à assurer son émission politique, Bourdin Direct, qui rassemble chaque matin près de 730 000 auditeurs sur la radio RMC.
Par Jérôme Navy,
Avocat au barreau de Paris
Associé du cabinet Rift
(1) Crim. 19 juin 2019, 18-83.523
(2) Art. 222-27, C. pén.
(3) Art. 222-33, al. 1er, C. pén.
(4) Art. 8, al. 1, C. proc. pén.
(5) CRI M-BOAP N°2021-0023-C10
(6) Article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789