Quand une IRM peut changer une peine de prison…

Publié le 21/02/2025 Vu 140 fois 0
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Un homme jugé pour meurtre voit sa peine réduite parce qu’une IRM cérébrale a révélé un trouble neurologique influençant son comportement. Science-fiction ? Non. Un fait divers bien réel.

Un homme jugé pour meurtre voit sa peine réduite parce qu’une IRM cérébrale a révélé un trouble neuro

Quand une IRM peut changer une peine de prison…

Les neurosciences sont souvent mises au service de la criminologie et de l’étude de l’action criminelle et de son intention. Plusieurs cas dans le monde ont permis de mettre en exergue l’apport des neurosciences et leur utilité pour les juges.

La porte d’ouverture vers le neurodroit qui est une contraction entre les neurosciences et le droit est l’article 16-14 du code civil qui autorise l’utilisation des techniques d’imagerie cérébrale à l’occasion d’expertises judiciaires.

Ainsi, l’inclusion des neurodroit a notamment permis, comme le souligne Laura Pignatel dans son livre intitulé « L’émergence d’un neurodroit » édition Dalloz, de mettre en place une nouvelle méthode de classification des criminels. La question qui se posait était de savoir si « Les résultats d’imagerie cérébrale permettent-ils d’établir de nouvelles typologies de délinquants ? »

Plusieurs études ont été menées, plusieurs classifications ont été proposées et certaines se réfèrent au critère principalement psychologique. D’autres se réfèrent au critère physico-constitutionnaliste biologique ou comportemental.

Je vous invite à prendre connaissance des théories de Lombroso et Ferri et de leurs classifications entre le « criminel-né », le « criminel-fou », le « criminel par passion » et le « criminel d’occasion ».

Après Lombroso et Ferri, d’autres théories de classifications ont été proposées telles que celles de Benigno Di Tullio qui s’est fondé sur une classification anthropologique et psychiatrique.


Un tribunal italien a récemment réduit la peine d’un meurtrier après qu’une IRM cérébrale a révélé des anomalies neurologiques affectant son contrôle des impulsions. Ce cas relance le débat sur la responsabilité pénale face aux troubles cognitifs.

L’objectif d’utilisation des neurosciences notamment en matière pénale est de permettre l’obtention d’une neuro-preuve pénale de culpabilité ou d’irresponsabilité pénale. Elle est étudiée aussi pour prouver un jour l’amnésie traumatique de la victime.

Mais les neurosciences ce n’est pas uniquement l’imagerie cérébrale. Il existe d’autres techniques d’utilisation des neurosciences dans le droit qui ne sont pas acceptée par toutes les juridictions du monde.

En 2008, Aditi Sharma a été jugée en Inde car soupçonnée d’avoir empoisonné son petit ami à l’arsenic. Lors de son interrogatoire, elle a été soumise à la technique de BEOS (Brain Electrical Oscillations Signature) 215 est l’œuvre de Champadi Raman Mukudan.

Il s’agit d’une méthode qui consiste à enregistrer l’activité électrique du cerveau telle qu’elle se reflète à la surface du crâne et qui réagit lorsque le sujet entend un terme qui lui est familier.

Dans les années 1960, des chercheurs ont découvert une composante qui s’obverse 300 millisecondes après que le sujet ait observé un stimulus qui lui est familier. C’est la raison pour laquelle cette onde est appelée P300.

C’est sur cette découverte que d’autres chercheurs ont créer un neuro-détecteur de mensonge. Lawrence Farwell a alors commercialisé sa technique dite de l’empreinte cérébrale.

L’idée de l’onde P300 est qu’elle est une mesure qui permet de déduire si le prévenu est ou non confronté pour la première fois à l’objet utilisé comme stimulus. L’idée étant de prouver ainsi sa culpabilité. Mais l’inconvénient est que, pour le cas d’Aditi Sharma, le terme d’arsenic n’est pas un terme inconnu. L’onde P300 a-t-elle permis de déterminer qu’Aditi Sharma a fait l’usage de l’arsenic pour empoisonner son petit ami ? ou  a-t-elle juste permis de déterminer qu’Aditi Sharma connaît simplement cet objet ?

Le 5 mai 2010, la Cour suprême de l ’Inde a déclaré l’utilisation de l’imagerie cérébrale et des tests polygraphique dans le cadre de procédures judiciaires était «illégale et contre la Constitution » (Math, S.B. (2011). « Supreme Court judgment on polygraph, narco-analysis & brain-mapping: A boon or a bane », Indian Journal of Medical Research, 134(1), 4–7).

La frontière entre la connaissance d’un objet et son usage est quasi-impossible à trouver. L’onde P300 ne permet que de caractériser le caractère familier d’un objet mais ne permet pas, à mon sens, de prouver sans faille la culpabilité d’un prévenu.

Pourtant, avec les progrès liés à la technologie actuelle, les neurosciences pourraient révolutionner l’évaluation de la culpabilité :

  • Vers un "droit neuro-compatible" ? Demain, les avocats de la défense pourraient exiger des expertises cérébrales pour prouver une altération de la volonté comme cela est déjà le cas aux Etats-Unis, en Angleterre et en Italie.
  • Mais à quel point doit-on intégrer ces preuves ? Un risque majeur est l’effet "machine à innocenter" : certains avocats pourraient systématiquement plaider des troubles cognitifs pour alléger les peines.

 Ces questions sont d'actualités et devraient trouver des réponses juridiques appropriées avant que ce sujet n'échappe au droit en raison de ses progrès rapides. 

 

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