Les faits sont les suivants: une SCI a, le 20 décembre 2000, contracté auprès de la société la banque un prêt remboursable en dix-sept ans, en vue de financer l'acquisition et la rénovation d'un bien immobilier destiné à la location. Le gérant âgé de soixante ans, s'étant rendu caution du remboursement de ce prêt, la société a adhéré pour lui au contrat d'assurance de groupe couvrant les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie, invalidité et incapacité de travail souscrit par la banque. Que le gérant ayant été atteint, au cours de l'année 2005, d'une maladie lui interdisant d'exercer son activité professionnelle, l'assureur a pris en charge les échéances du prêt jusqu'au 1er janvier 2006, date à laquelle il a refusé de maintenir sa garantie, l'assuré ayant atteint l'âge de 65 ans. |
Le 27 mai 2014, la Cour d’Appel de Paris a rejeté les demandes de la SCI formées contre l'assureur. La SCI se pourvoi en cassation. Le 1er décembre 2015, la Cour de cassation confirme l’arrêt d’appel. La Cour de cassation considère que l’assureur n’a pas manqué à son obligation de conseil et que l’obligation de conseil du souscripteur n’est pas limitée à la simple remise de la notice. (Cour de Cassation 1 décembre 2015 N° de pourvoi: 14-22134)
- Cette obligation se manifeste, notamment, par la rédaction de façon claire et intelligible du contenu de la notice. « que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que "la cour d'appel a retenu que l'article 7, mentionnant que les garanties incapacité de travail et invalidité permanente prenaient fin au plus tard au 31 décembre suivant le soixante-cinquième anniversaire de l'assuré, n'était pas en contradiction avec l'article 4.II du même document, indiquant que la garantie incapacité de travail n'était accordée qu'aux personnes physiques exerçant une activité leur procurant un revenu, puisque, le plus souvent, les salariés cessent leur activité professionnelle au plus tard à soixante-cinq ans". Ainsi, "en déduisant que cette notice donnait une information claire et précise sur la durée de la garantie, ce dont il résulte que l'assureur n'avait pas manqué à ses obligations à cet égard, la cour d'appel a légalement justifié sa décision". - L’obligation à l’adhérent de démontrer le manquement de l’obligation d’information et de conseil. « SCI ne rapporte pas la preuve qu'un autre contrat serait susceptible de couvrir le risque incapacité de travail de M. X... au-delà de soixante-cinq ans, qu'il est de la nature même de cette garantie de prendre fin à la date habituelle de cessation de l'activité professionnelle de l'assuré et que la grande majorité des contrats d'assurance de prêt n'offrent pas de garantie incapacité de travail au-delà de cet âge, qui est celui maximum auquel la plupart des salariés cessent leur activité professionnelle ; qu'en l'état de ces seuls motifs, desquels il résulte que la perte de chance pour la SCI de souscrire un contrat offrant des garanties mieux adaptées à sa situation n'était pas démontrée ». Il s’agit d’une application pu et simple de l’article 1147 du code civil ; la responsabilité contractuel est engagée dès lors qu’une faute(le non-respect d’une obligation de conseil), un préjudice et un lien de causalité sont réunies. |
- Obligation de conseil et d'information de l’établissement de crédit souscripteur.
« l'assureur de groupe n'est pas tenu d'éclairer l'assuré sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d'emprunteur ou à celle de celui qui cautionne ses engagements, cette obligation incombant au seul établissement de crédit souscripteur du contrat d'assurance » (Cour de Cassation 1 décembre 2015 N° de pourvoi: 14-22134)
- Cet arrêt confirme une position jurisprudentielle antérieure.
2èmech civ : 13 janvier 2005 reconnaît sa responsabilité et reconnaît le manquement qui a été commis par l’établissement de crédit. En l’espèce, un particulier a souscrit une assurance de groupe auprès d’un établissement de crédit qui est le souscripteur, accessoirement à un prêt immobilier contracté sur 14 ans. Le risque garanti : de décès, d’invalidité et d’incapacité de travail. Le risque invalidité se produit 5 ans après la conclusion du contrat. Dans un premier temps, l’assureur accepte de payer le risque, dure 3 ans et l’assureur arrête de prendre en charge le remboursement de prêt et arrête sa garantie. Un moment donné, l’assureur cesse de payer le risque en invoquant une clause qui précisait la cession de garantie pour le risque de validité à compter des 65 années de l’assuré. L’assuré entame une action contre établissement de crédit et notaire qui avait rédigé l’acte en leur demandant de rembourser le prêt. La Cour d’appel reconnaît la faute, du fait du manquement au devoir d’obligation d’information et de conseil. La seconde Chambre Civile par un arrêt du 13 janvier 2005 confirme l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Riom. En effet le juge constata que la banque avait remis un tableau d’amortissement incluant des cotisations constante jusqu’au terme du prêt créant ainsi l’apparence trompeuse d’une garantie totale jusqu'à cette date alors que la notice prévoyait une cessation partielle des garanties avant la fin du contrat. L'établissement de crédit est tenu envers l'emprunteur d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'achève pas avec la remise de la notice.
Arrêt du 2 mars 2007, l’Assemblée Plénière a renforcé cette obligation. Les faits sont quasis similaires à ceux présentés précédemment : une assurance de groupe souscrite par un établissement de crédit. Un exploitant agricole, a adhéré à des assurances de groupes souscrites par le prêteur auprès de l'assureur. En ce qui concerne le risque, seule l’invalidité totale et définitive était garantie de sorte que si l’inaptitude concernait que la profession d’agriculteur, la garantie n’allait pas jouer. L’agriculteur devient invalide ; il ne pouvait plus exercer sa profession d’agriculture or son invalidité n’était pas totale. L’adhérent appelle l’assureur en garantie, ce dernier refuse. Estimant que l’établissement de crédit avait manqué à son devoir d'information et de conseil en faisant adhérer le mari à une assurance de groupe inadaptée, l’agriculteur et son épouse l'ont assigné en réparation du préjudice subi du fait de la situation de non-assurance .
La Cour d’Appel pour débouter la demande de l’agriculteur avait relevé la présence « d'une clause claire et précise des contrats d'assurance » qui indiquait que l'assurance de groupe ne couvrait que l'invalidité totale et définitive et ne s'appliquait pas, par déduction, à la seule inaptitude à la profession d’agriculteur. Ainsi l’établissement n'avait pas l'obligation de conseiller à l’adhérent de souscrire une assurance complémentaire d’où l’absence d’un manquement à son obligation de conseil et d'information »La Cour de Cassation casse l’arrêt et réitère le principe selon lequel la remise de la notice d’info ne suffit pas à satisfaire l’obligation de conseil à la charge de la banque : l’obligation relative à l’adéquation des risques couverts à la situation de l’emprunteur en d’autres termes le souscripteur aurait dû conseiller l‘adhérent l’agriculteur de souscrire une assurance complémentaire pour qu’il soit davantage couvert.
- La sanction du non-respect du devoir de conseil et d’information : application de l’article 1147 du code civil
La mise œuvre de la responsabilité va permettre d’obtenir des dommages et intérêts en démontrant que l’adhérent, le preneur d’assurance n’a pas pu prendre un contrat adapté à ses besoins; la perte d’une chance de conclure un contrat adapté à ses besoins Les dommages-intérêts ne vont pas correspondre au montant des prestations que l’assureur aurait versé si ce contrat pertinent avait été souscrit mais vont correspondre à un pourcentage de cette prestation.
Samira Saidi