Aux termes de l'article 1792-6, « la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ».
Elle intervient donc lorsque les travaux sont terminés.
La réception est unique et doit intervenir à l'achèvement de tous les travaux, même lorsque ceux-ci sont réalisés en corps d'état séparés.
La réception à proprement parler peut être précédée d'opérations préalables à la réception lorsque l’importance du projet le justifie. De telles opérations permettent de faciliter la réception de l’ouvrage et de faire réaliser, au fur et à mesure, certaines reprises, limitant ainsi la liste des réserves à la réception.
Organisée à la demande de la partie la plus diligente, la réception est le plus souvent amiable, mais elle peut être organisée judiciairement si besoin.
Dans tous les cas, la réception est réalisée contradictoirement entre le maître de l’ouvrage et l’entreprise ou les entreprises. Le maître d’ouvrage peut-être assisté du maître d’œuvre.
L'entrepreneur dont les travaux sont examinés doit être obligatoirement présent ou avoir été dument convoqué. A défaut la réception lui serait inopposable.
La réception a donc pour objet de permettre de constater l’achèvement des travaux, leur bonne exécution et la conformité de ces travaux par rapport à ce qui était prévu sur les plans et dans la notice descriptive du contrat.
Si les travaux ne sont pas achevés, il faut donc refuser la réception de l’ouvrage et reporter la réception ou solliciter du juge qu’il condamne la ou les entreprises à procéder à l’achèvement des travaux.
Si les travaux sont achevés et qu’il n’y a ni désordre ni défaut de conformité, aucune réserve ne sera portée au procès-verbal. Toutefois, il convient d’être vigilant car la réception sans réserve exonère l’entrepreneur de toute responsabilité au titre de désordres apparents au jour de la réception et interdit ainsi toute action ultérieure pour de tels désordres.
En cas de désordres apparents (qu’il s’agisse de défauts de conformité ou malfaçons), il est essentiel de les mentionner dans le procès-verbal – sous forme de réserves – afin de solliciter que les entreprises reprennent les travaux pour y remédier et, de façon générale pour pouvoir ensuite faire jouer les garanties légales.
Ces travaux pour remédier aux réserves doivent, de manière usuelle, intervenir dans les 90 jours de la réception. S’ils ne sont pas faits, l’action en justice doit être intentée dans le délai d’un an à compter de la réception.
Les effets de la réception sont nombreux.
Tout d’abord, elle constate l’achèvement de l’ouvrage et donc la possibilité de l’utiliser conformément à la destination qui était prévue.
Elle a ensuite pour effet de permettre la réalisation des comptes entre les parties et de liquider les sommes restant dues aux divers intervenants à l’acte de construire.
La réception permet également de transférer la garde de l’ouvrage au maître d’ouvrage. Il sera dès lors seul responsable si l’ouvrage cause un dommage à un tiers.
Enfin, et c’est là l’essentiel, la réception marque le point de départ des garanties légales dues par les constructeurs, à savoir :
- La garantie de parfait achèvement qui est d’une durée d’un an (article 1792-6 du code civil),
- La garantie de bon fonctionnement des équipements dissociables (garantie biennale prévue à l’article 1792-3 du code civil),
- La garantie décennale (article 1792 et suivants du code civil).
Ainsi, si des défauts – qui n’étaient pas visibles à la réception – apparaissent à l’usage, il est possible d’invoquer :
- La garantie de parfait achèvement pour les désordres ayant fait l’objet de réserves et pour les désordres qui apparaissent dans l’année de la réception. L’action doit être mise en œuvre dans le délai d’un an à défaut de quoi elle serait prescrite.
- La garantie biennale en cas de dysfonctionnement des équipements dissociables de l’ouvrage (portes, radiateurs…) qui doit être mise en œuvre dans un délai de deux ans à compter de la réception pour éviter toute prescription.
- La garantie décennale qui permet de couvrir les dommages qui portent atteinte à la solidité de l’ouvrage ou le rendent impropres à sa destination. Ici aussi la garantie doit être mise en œuvre dans un délai de 10 ans à compter de la réception pour éviter la prescription.
En cas de litige entre les parties, il convient d’être attentif à la possible réception tacite et de garder à l’esprit la possibilité de faire procéder à une réception judiciaire.
En effet, la Cour de Cassation a précisé que la réception peut être tacite. Elle doit néanmoins résulter d’éléments démontrant la volonté du maître d’ouvrage de procéder à la réception et elle doit avoir un caractère contradictoire.
Pour démontrer la volonté non équivoque du maître d'ouvrage de réceptionner l’ouvrage, il est possible de recourir à tout élément de preuve tels que prise de possession, le paiement du prix...
En cas de contestation par le maître d’ouvrage de la réception tacite, la réception devra être prononcée judiciairement.
Le juge fixera donc la date de la réception, généralement après avoir désigné un expert, en fonction de la prise de possession, de l’achèvement effectif des travaux et de tout élément qui lui est soumis. La seule prise de possession n’est pas suffisante pour établir la manifestation d’une volonté non équivoque d’accepter l’ouvrage.
La réception judiciaire a des effets rétroactifs, jusqu’à la date à laquelle la réception est fixée. Toutefois, elle ne comporte généralement pas de liste de réserves, faute d'avoir pu l'établir d'un commun accord entre le maître d'ouvrage et l'entrepreneur.
Le refus du maître d'ouvrage de procéder à la réception quand les travaux sont achevés peut donc se révéler contraire à ses propres intérêts.
Ces éléments étant rappelés, l’essentiel à garder à l’esprit est qu’en l’absence de réception, les garanties légales ne peuvent pas être mises en œuvre.
Il convient donc de juger de l’opportunité d’accepter ou non la réception en fonction du risque d’apparition de désordres de nature décennale.
Victoire de Bary
Avocat Associé
OCEAN Avocats AARPI
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